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Droits fondamentaux, lutte contre la discrimination - Traités et Affaires institutionnelles
Le gouvernement luxembourgeois expose son argumentation sur la conformité de la loi sur les aides financières de l’Etat pour études supérieures dans une réponse à une question parlementaire du député CSV Marc Spautz
26-10-2010


Dans le cadre de la controverse qui oppose le gouvernement luxembourgeois aux syndicats sur la question de la nouvelle loi sur les aides financières de l’Etat pour études supérieures qui a conduit à la suppression de l’allocation familiale pour les jeunes âgés de plus de 18 ans, et qui a donc par ricochet entraîné des conséquences pour les enfants de travailleurs frontaliers, le gouvernement a répondu à une question parlementaire du député CSV Marc Spautz, ancien secrétaire général du syndicat LCGB et actuellement chargé de mission auprès du même syndicat, sur la conformité de la loi avec le droit européen et sur la manière dont il va réagir à la réponse de la Commission datant du 21 octobre 2010 à une question de deux eurodéputés verts.

La réponse du gouvernement luxembourgeois

"Le gouvernement  luxembourgeois a pris acte de la réponse du 21 octobre 2010 de Monsieur le Commissaire László Andor au nom de la Commission à une question avec demande de réponse écrite formulée par deux députés européens de la fraction Verts/ALE. La réponse de M. László Andor indique que la Commission procède à l’examen de la législation en cause et qu’elle prendra les contacts nécessaires afin de recueillir des précisions sur des faits qui ont été dénoncés par des plaintes introduites.

Le gouvernement luxembourgeois réitère que la législation afférente est conforme au droit européen et à l’esprit européen.

1. Les aides financières de l’Etat  pour études supérieures sont régies par la loi du 22 juin 2000, loi modifiée successivement par la loi du 4 avril 2005 et par la loi du 26 juillet 2010. Les aides financières pour études supérieures sont de la compétence du Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche et sont un élément de la politique du Gouvernement en matière d’enseignement supérieur, dont l’un des objectifs est d’augmenter la proportion de personnes résidentes titulaires d’un diplôme d’enseignement supérieur, conformément aux objectifs tels qu’énoncés dans le cadre d’EU 2010 "une stratégie pour une croissance intelligente, durable et inclusive".

2. Les aides financières de l’Etat pour études supérieures sont conformes à l’esprit européen du Processus de Bologne visant à créer un espace européen de l’enseignement supérieur basé sur la mobilité la plus parfaite. Dans le cadre des discussions sur le volet social du Processus de Bologne, le droit personnel pour tout étudiant à un financement équilibré permettant de financer ses études en toute indépendance des parents est revendiqué par les associations d’étudiants. Accorder des aides financières aux étudiants résidents sur le territoire du Grand-Duché de Luxembourg permet de rendre accessible l’enseignement supérieur à tous les jeunes quel que soit le milieu social dont ils sont issus.

3. Du fait de leur "portabilité" sans limites, les aides financières pour études supérieures permettent à tout jeune résident de faire ses études dans l’institution d’enseignement supérieur et dans le pays de son choix. A noter que le Luxembourg est l’un des très rares pays de l’UE 27 à avoir érigé en principe cette "portabilité" illimitée, alors que pour l’étudiant ressortissant de la communauté française de Belgique, de France ou d’Allemagne les aides accordées par ces pays ne le sont que pour des études supérieures effectuées dans ces mêmes pays.

4. La condition de domicile, sur le territoire du Grand-Duché de Luxembourg, pour les non-luxembourgeois, est incluse dans la loi dès le texte initial du 22 juin 2000. En 2005, et comme suite à une décision du Tribunal administratif luxembourgeois se basant sur l’arrêt Meeusen si souvent cité à tort ces dernières semaines, le Gouvernement a décidé de modifier la législation en vigueur pour la rendre conforme au droit européen. Ainsi, la loi du 4 avril 2005, qui introduit la condition de domicile aussi pour les étudiants luxembourgeois, a été votée à l’unanimité des 60 députés. La loi du 26 juillet 2010 en reprenant telles quelles les dispositions de la loi du 4 avril 2005 ne restreint donc en rien la législation existante pour ce qui est de la condition de domicile. Au contraire, elle élargit le cercle des bénéficiaires ressortissants de l’Union européenne en accordant le droit à l’aide financière de l’Etat aux étudiants ressortissants de l’Union européenne qui bénéficient du droit de séjour permanent sur le territoire du Grand-Duché de Luxembourg.

5. Les conditions d’octroi de l’aide financière sont donc fondées sur des considérations objectives de domicile, indépendantes de la nationalité et reposent sur la seule exigence que la personne soit établie au Luxembourg, c’est-à-dire qu’elle ait établi un lien réel avec la société du Grand-Duché de Luxembourg. Il est rappelé dans ce contexte que la Directive 2004/38 relative aux droits des citoyens de l’Union européenne et des membres de leurs familles de circuler librement et de séjourner sur le territoire des Etats membres dispose:  "l’Etat membre d’accueil n’est pas tenu, avant l’acquisition du droit de séjour permanent, d’octroyer des aides d’entretien aux études, y compris pour la formation professionnelle, sous la forme de bourses d’études ou de prêts, à des personnes autres que les travailleurs salariés, les travailleurs non salariés, les personnes qui gardent ce statut ou les membres de leur famille."

6. La législation luxembourgeoise en matière d’aide financière pour études supérieures a fait sien  ce principe tel qu’il a été aménagé ultérieurement par les décisions de la Cour de Justice des Communautés européennes dans les affaires Bidar de 2005 (C 209/03) et Förster de 2008 (C 158/07). Ces deux arrêts confirment qu’il est légitime pour un Etat membre de n’octroyer une aide couvrant les frais d’entretien des étudiants qu’à ceux qui ont démontré un certain degré d’intégration dans la société de cet Etat et qu’une condition de résidence ininterrompue d’une durée de cinq ans ne peut pas être considérée comme excessive compte tenu, notamment, des exigences invoquées à l’égard du degré d’intégration des non-nationaux dans l’Etat membre d’accueil. 

7. Il est par ailleurs à souligner que, tant la communauté française de Belgique, que la France et l’Allemagne soumettent également l’attribution d’aides financières pour études supérieures à des conditions de domicile de l’ayant droit.

S’agissant de la deuxième question de l’honorable Député Marc Spautz, le gouvernement luxembourgeois n’a à ce jour pas encore été saisi d’une quelconque demande officielle par la Commission, bien que ceci ait été annoncé dans la réponse du 21 octobre 2010 par le Commissaire européen László Andor. Il entend cependant susciter le dialogue avec la Commission européen.

1. Une mise en cause du principe de domicile pour l’attribution de l’aide financière de l’Etat pour études supérieures aurait des répercussions sur les législations en la matière des autres Etats membres de l’Union européenne. Cette condition de domicile a été confirmée à ce jour et de façon récurrente par des arrêts de la Cour de Justice européenne.

2. L’abandon de la condition de domicile entraînerait des répercussions financières et l'octroi des aides financières pour études supérieures à des étudiants non-domiciliés au Luxembourg deviendrait une charge déraisonnable pour l'Etat luxembourgeois. Par ailleurs, cet abandon comporterait le risque de discrimination à rebours à l'encontre des étudiants domiciliés au Luxembourg. 

3. Le gouvernement luxembourgeois reste tout à fait d’accord à discuter avec la Commission européenne et les autres Etats membres de l’Union européenne sur un système d’aide financière véritablement européen, système qui devrait prévoir une portabilité de l’aide dans tous les pays de l’Union européenne, un droit autonome à l’aide financière ainsi que la levée de toutes les restrictions d’accès aux universités nationales. "