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Economie, finances et monnaie - Emploi et politique sociale
Gouvernance économique de l'UE: L'examen annuel de la croissance 2012 de la Commission
23-11-2011


La Commission européenne intensifie son action en faveur du renouveau économique par des initiatives destinées à relever trois défis indissociables auxquels sont confrontées l'UE et la zone euro en particulier:

  • la faiblesse générale - avec certes des divergences - des performances en matière de croissance et d'emploi,
  • le manque de coordination et de discipline des politiques budgétaires et
  • l'instabilité des marchés de la dette souveraine souffrant d'un manque de liquidité.

José Manuel Barroso et Olli Rehn lors de la présentation du paquet pour le renouveau de la croissance dans l'UE, le 23 novembre 2011. (Source: Commission)Le 23 novembre 2011, elle a présenté lors d’une conférence de presse conjointe de son président, José Manuel Barroso, et de son vice-président, Olli Rehn, un paquet de rapports et de mesures qui contient quatre éléments qui répondent au contexte de crise :

  • l'examen annuel de la croissance 2012 ou EAC 2012 fixant les priorités économiques pour l'année à venir,
  • deux règlements visant  à renforcer la surveillance économique et budgétaire dans la zone euro et
  • un livre vert sur les obligations de stabilité.

Le message clé véhiculé par l'examen annuel de la croissance 2012, ou EAC 2012, est que, face à la détérioration de la situation économique et sociale, il convient d'intensifier les efforts pour remettre l'Europe sur les rails et soutenir la croissance et l'emploi. L'examen appelle l'UE et les États membres à se concentrer sur cinq priorités:

  • la poursuite d'un assainissement budgétaire différencié et propice à la croissance,
  • la reprise des activités normales de prêt à l'économie, 
  • la promotion de la croissance et de la compétitivité,
  • la lutte contre le chômage et les conséquences sociales de la crise, ainsi que
  • la modernisation de l’administration publique.

L'examen annuel de la croissance contient une liste de propositions pendantes ou à venir qui visent à stimuler la croissance et dont la Commission souhaite qu'elles fassent l'objet d'une procédure accélérée tout au long du processus législatif de l'UE.

L'EAC 2012 est le point de départ du second semestre européen sur la gouvernance économique. Il a été présenté le 23 novembre 2011 plutôt qu'en janvier 2012 afin de laisser amplement le temps aux États membres et aux institutions de l'UE de l'examiner. Le Conseil européen du 9 décembre devrait en prendre acte, mais l'EAC est avant tout la contribution clé de la Commission au Conseil européen de printemps des 1er et 2 mars 2012.

Les programmes nationaux de réforme (sur les réformes structurelles) et les programmes de stabilité et de convergence (consacrés aux politiques budgétaires) que les États membres soumettront au printemps, ainsi que les recommandations par pays, nouvelles ou actualisées, que la Commission présentera en juin doivent être conformes aux priorités politiques formulées dans ce document. Pour la première fois, les nouveaux outils de surveillance convenus dans le cadre du «Six Pack» seront aussi utilisés dans le cadre du semestre européen.

L’examen de croissance dans le détail

Les prévisions d’automne, constate l’EAC 2012, ont clairement montré que l’UE, et en particulier la zone euro, entre en termes de croissance, dans une période de stagnation, et donc aussi de chômage élevé sur fond de crise des dettes souveraines. Et "sans réponse convaincante à la crise dans la zone euro, les perspectives économiques de toute l’UE se détérioreront rapidement". Les décisions du 26-27 octobre 2011 sont un début et incluent la possibilité d’un changement du traité européen. Mais selon la Commission, il faut aller au-delà des mesures d’urgence et changer les politiques afin que les efforts entrepris aient un effet durable sur la croissance.

S’il est encore difficile pour la Commission de faire le bilan de l’effet de l’examen de croissance de 2011 et de la mise en œuvre des engagements subséquents des Etats membres, notamment en ce qui concerne la consolidation budgétaire, elle peut déjà dire qu’en ce qui concerne les réformes sur le marché du travail, des progrès ont été faits dans le domaine de la formation tout au long de la vie, mais seulement peu en termes de politique salariale. La compétitivité, les services et les réseaux ont par contre été négligés.

Bref, il faut mettre l’accent sur la mise en œuvre de ce qui a été décidé, et de ce point de vue là, "les progrès dans les Etats membres restent en-deçà des attentes", constate le rapport. Il y a un problème d’appropriation au niveau national, des changements radicaux qu’implique la future gouvernance économique, constate la Commission. L’urgence d’agir devrait donc être à l’ordre du jour en 2012. L’UE en tant que telle n’est pas en reste avec des retards dans l’achèvement du marché intérieur ou des fonds structurels qui ne sont pas absorbés par les pays auxquels ils sont destinés. D’où la nécessité de travailler sur les cinq priorités : la poursuite d'un assainissement budgétaire différencié et propice à la croissance, la reprise des activités normales de prêt à l'économie, la promotion de la croissance et de la compétitivité, la lutte contre le chômage et les conséquences sociales de la crise, et la modernisation de l’administration publique.

1. La poursuite d'un assainissement budgétaire différencié et propice à la croissance

Cet objectif est la voie vers le rétablissement de la stabilité macro-financière, point de départ de la croissance et du modèle social européen. 85 % de dette publique dans l’UE et 90 % dans la zone euro en 2012, ce n’est pas acceptable. Les déficits budgétaires doivent descendre en dessous de 3 % en moyenne en 2013. Les choses devront se passer selon la situation des pays.

La Commission distingue trois catégories d’Etats membres et donc trois approches. Les Etats membres qui reçoivent une assistance financière et ceux qui sont dans la mire des marchés devront veiller à atteindre les objectifs budgétaires sur lesquels il y a eu des accords, même si les conditions macroéconomiques devaient changer. Les Etats membres qui sont soumis à une procédure de déficit excessif ou à haut déficit devraient accélérer leurs efforts de consolidation et éviter les retards. Les Etats membres qui n’ont pas de déficit excessif et qui sont sur le point d’atteindre leurs objectifs à moyen terme (pour le Luxembourg un excédent budgétaire en 2014), pourront utiliser leurs budgets à des fins anticycliques tant qu’ils ne mettent pas en cause l’atteinte de ces objectifs et leur durabilité financière.

En gros, les budgets des Etats membres ne devraient pas afficher un taux de croissance supérieur à celui de la tendance moyenne de la croissance de l’Etat membre concerné.

Les budgets devraient investir dans des secteurs qui contribuent à la croissance: l’éducation, la recherche, l’innovation, l’énergie, ou bien dans les agences pour l’emploi et des politiques actives sur le marché du travail.

Un autre volet sur lequel la Commission insiste est la réforme des systèmes de pensions, "dans le respect des traditions nationales du dialogue social", avec l’idée de créer un équilibre entre l’âge de départ à la retraite et l’espérance de vie, de dissuader d’un départ précoce à la retraite, de soutenir des durées de vie de travail plus longues, de mettre l’âge de départ à la retraite des hommes et des femmes au même niveau et de soutenir la création de formes d’épargne privée qui viendraient renforcer les revenus des pensions. Les systèmes de santé devraient être réformés sur base de l’efficacité des coûts et de la durabilité.          

La politique fiscale des Etats membres devrait éviter les distorsions fiscales, notamment en matière de TVA (exemption, taux réduits) et de fiscalité des entreprises et des revenus. Les Etats membres devraient moins imposer les revenus du travail que la consommation, l’environnement, la fortune. Les administrations des contributions des Etats membres devraient devenir plus efficaces, notamment dans la lutte conter l’évasion fiscale. D’autres voies à suivre sont l’assiette commune consolidée pour l’impôt sur les sociétés (ACCIS, ou CCCTB en anglais) et la taxe sur les transactions financières (TTF). 

2. La reprise des activités normales de prêt à l'économie

Pour soutenir la croissance, l’économie a besoin d’un secteur bancaire sain. Les excès des banques ont conduit à un effondrement de la confiance des investisseurs qu’il faut restaurer. La réglementation du secteur bancaire doit être revue pour permettre aux banques d’avoir accès à des fonds par des garanties publiques, tout en veillant à ce que les risques excessifs pris avant la crise soient écartés. Parmi les priorités, la Commission cite les propositions de l’EBA pour renforcer le capital des banques systémiques plutôt que de ralentir l’activité de prêts à l’économie réelle. Des régimes spéciaux de crédit pour les PME assortis de règles prudentielles adéquates sans pénaliser les PME devraient être envisagés. La BEI, le FEI devraient aussi jouer un rôle ici. Un nouveau régime européen de capital-risque s’avère nécessaire au sein du marché intérieur. Finalement, il faudrait un nouveau cadre réglementaire pour les marchés financiers de l’UE.

3. La promotion de la croissance et de la compétitivité

La Commission pense que le potentiel de croissance de l’UE est à portée de main: des réformes qui créent un cadre favorable, par exemple dans le domaine des services, de l’industrie des réseaux (transports, énergie) et du secteur public. S’y ajoute l’efficacité dans l’utilisation des ressources, la réduction de la fragmentation du marché européen, de plus grandes facilités pour financer l’innovation. Il faut un marché unique numérique, un vrai marché intérieur des services et créer de la croissance en se projetant sur de nouveaux marchés extérieurs. 

Le budget de l’UE devrait être mobilisé sur ces objectifs : les fonds de cohésion, 347 milliards d’euros pour 2007-2013, dont une bonne partie sont encore disponibles et peuvent être reprogrammés. Le taux de cofinancement est en train d’être revu pour les pays qui reçoivent une assistance financière. Des "projects bonds" pour les réseaux de transports d’énergie et de TIC ont été proposés.

Pour la Commission, il faut aller au-delà des décisions déjà prises et accélérer tous ces processus.

4. La lutte contre le chômage et les conséquences sociales de la crise

L’UE compte 23 millions de chômeurs. La crise est responsable d’un grand nombre de pertes d’emploi. Les restructurations, les conditions d’emploi et de travail soumis à la pression des changements ont fait qu’une "part significative de la population » voit ses perspectives se détériorer et « n’arrive pas à gérer ces transitions". Le nombre des chômeurs de longue durée augmente. Dans un contexte pareil, la Commission reprend son plaidoyer pour la "flexicurité". En même temps, une grande vague de départs de la vie active de personnes expérimentées s’annonce, et il sera difficile de la compenser. Chômage et emplois non pourvus se développent en même temps. Pour la Commission, ce qui est en cause est une politique des salaires inadéquate, un manque de formation et une mobilité géographique limitée.

Pour mobiliser les travailleurs en faveur de la croissance, il faut, selon la Commission, revoir les systèmes salariaux et les mettre en relation avec la productivité, et "adapter les allocations de chômage" (en anglais, ce qui n’est pas neutre, "bénéfices du chômage") de manière à faciliter le retour à un emploi, favoriser la mobilité de la main d’œuvre, prolonger la durée de la vie de travail par des formations et des emplois pour les travailleurs plus âgés, promouvoir la création de mini-entreprises et d’auto-emploi, développer les secteurs de l’économie verte, de la santé et socio-éducatif, et évidemment l’économie numérique.

La Commission veut accorder une attention particulière aux jeunes, les plus touchés par le chômage (entre 20 et 40 %), les plus nombreux travaillant sous le régime de CDD (40 %) et quittant souvent l’école sans formation (14,4 %). Les Etats membres devraient miser sur la formation, veiller à ce que les jeunes aient une expérience du monde du travail, cela en coopération avec le secteur privé, qui devrait plus s’engager à former des apprentis. Mais ils devraient aussi "réformer la protection de l’emploi, de concert avec les partenaires sociaux, en réduisant les rigidités excessives des contrats permanents et donner une meilleure protection et un accès plus facile au marché du travail à ceux qui en sont exclus, en particulier les jeunes." L’école et la formation professionnelle devraient par ailleurs être mieux adaptées aux besoins du marché du travail, par exemple dans le secteur des TIC qui manque cruellement de diplômés, 700 000 d’ici 2015. Tout un travail de vérification doit aussi être fait sur la qualité de l’emploi des fonds destinés aux universités.

La protection des plus vulnérables fait partie du discours de la Commission, consciente qu’ils ont été les plus touchés par la crise. Elle appelle les Etats membres à veiller à ce que leurs systèmes de protection sociale soient ici effectifs et ne privent pas ces personnes de couverture, mais elle les invite aussi à mener des politiques actives d’inclusion et à leur garantir accès au marché du travail, à un compte bancaire de base, à l’électricité et à un logement élémentaire.

5. La modernisation de l’administration publique

Pour la Commission, "la qualité de l’administration publique au niveau de l’UE, national, régional ou local est un élément déterminant de la compétitivité et un important facteur de productivité", surtout lorsque la pression sur les finances publiques est grande.

Selon la Commission, les Etats membres devraient prendre quelques mesures prioritaires :

  • améliorer le climat économique en réduisant les obstacles administratifs au strict nécessaire;
  • numériser les relations entre administrations et entreprises comme avec les citoyens, ce qui serait plus transparent, plus efficace et plus favorable aux PME ;  
  • faciliter la création de nouvelles entreprises et réduire les délais de création à 3 jours ;
  • mettre en place des capacités administratives et de gestion capable de résorber les fonds structurels disponibles.