Un an après une première conférence consacrée aux perspectives de l’économie solidaire au Luxembourg, le département de l’Economie solidaire du Ministère de l’Economie a convoqué, avec l’aide du CRP Tudor, une nouvelle conférence sur le développement et la promotion de l’économie solidaire au service d’un développement durable à Luxembourg. Une conférence qui s’est tenue le 24 novembre 2011 au Grand Théâtre, dans une salle comble.
Le ministre délégué à l’Economie solidaire, Romain Schneider, a ouvert la journée de discussion en présentant le résultat des travaux menés de manière participative et ainsi largement ouverte à toutes les parties intéressées, depuis la mise en place de ce nouveau département. Ces travaux ont en effet permis l’élaboration d’un premier plan d’action qui poursuit un objectif stratégique : inscrire l’économie solidaire dans les politiques de développement économique, social et environnemental.
Ce plan comprend plusieurs mesures à court terme ciblant trois objectifs clés pour la promotion et le développement de l’économie solidaire au Luxembourg :
Ainsi que l’a souligné le ministre, ce plan s’inscrit dans la droite ligne de l’appel lancé par la Commission européenne dans le cadre de la récente Initiative pour l’entrepreneuriat social pour mettre en place des mesures de soutien, de promotion et de financement des entreprises sociales.
Le terme social exprime par essence une dimension de solidarité ainsi l’économie solidaire, telle que promue par le ministre Romain Schneider, couvre tous les types d’entreprises sociales et solidaires au Luxembourg, indépendamment de leur statut juridique et de leur secteur d’activité. Elle vise à remettre à l’honneur ce qui devrait être la vocation première de toute activité économique, à savoir répondre avant tout aux besoins de l’Homme et de son environnement. Dans ce sens, l’économie solidaire repose selon lui sur une économie qui conjugue activités économiques et finalités sociales, mais aussi sur une économie qui s’inscrit dans une démarche de développement durable.
Paulette Lenert a présenté ce plan de façon plus détaillé, revenant sur sa genèse suite aux perspectives lancées lors de la conférence de 2010 qu’il s’est agi de mettre en œuvre en appliquant, dès le commencement, une méthode participative. Après l’appel aux acteurs de l’économie solidaire, trois groupes de travail ont pu être constitués en mars 2011 pour élaborer des thèmes, proposer des actions et les évaluer selon différents critères, notamment celui de leur faisabilité. A suivi un travail de "teasing" de ces propositions d’actions qui a permis d’établir une feuille de route. L’objectif était de donner à l’économie solidaire une reconnaissance dans la société, mais aussi d’œuvrer à la mise en place d’une société responsable et engagée basée sur un tissu socio-économique solide et solidaire.
Les trois objectifs visés par ce plan sont d’une part une meilleure connaissance d’un secteur qui est encore méconnu et dont on n’a qu’une représentation assez vague, d’autre part une plus grande solidité du secteur qu’il s’agit de renforcer avec l’aide d’acteurs privés, et enfin une meilleure intégration du secteur dans l’économie.
Paulette Lenert a donc présenté les quatre axes de développement qui ont été définis : il s’agit de sensibiliser, de fédérer, d’accompagner et de concilier.
Le PLES prévoit de sensibiliser tant le grand public que les entreprises classiques, sans oublier les acteurs institutionnels, comme les communes notamment. Un plan de communication prévoit ainsi l’édition d’une brochure d’informations, la réalisation d’une exposition de photos et enfin la tenue d’une conférence nationale qui aurait lieu fin 2012 ou début 2013.
Face au constat de l’absence de plateforme de l’économie solidaire à Luxembourg, le plan entend en fédérer les acteurs. Un appel aux acteurs à se regrouper a permis de voir se constituer en juillet 2011 un comité constitutif qui leur donne la possibilité de se réunir et de travailler ensemble. Un comité qui rassemble déjà nombre de structures et qui est représentatif de la diversité du secteur, mais qui est ouvert, comme n’a pas manqué de le souligner Paulette Lenert, lançant un nouvel appel. Ce comité a pour missions d’élaborer un modèle de fonctionnement, d’être un espace d’échanges et de concertation, mais aussi d’ouvrir un espace de dialogue au-delà du cercle des acteurs du secteur. L’objectif est de faciliter les synergies, de créer et renforcer les liens entre les acteurs ou encore de jouer le rôle d’interlocuteur du discours politique. Plusieurs groupes de travail ont été créés. L’un d’entre eux se penche ainsi sur la question du statut légal, menant un travail qui va prendre du temps car il convient d’évaluer les statuts spécifiques qui existent ailleurs, le tout en concertation avec le Ministère de la Justice. Un autre chantier ouvert par le comité est celui de la mise en œuvre sur le terrain de la loi de 2009 sur les initiatives pour l’emploi, un travail qui est mené en lien avec le Ministère de l’Emploi.
Le plan 2012 prévoit aussi d’accompagner les acteurs de l’économie solidaire, comme ceux de l’économie classique le sont. Ainsi, par exemple, une version "sociale" du programme 1,2,3 GO va être expérimentée dans le cadre d’un projet pilote mené avec la Chambre de Commerce et le Ministère de l’Economie.
Enfin, dans un souci de concilier économie solidaire et économie classique, afin de répondre aux inquiétudes exprimées par le patronat, un projet pilote mené conjointement avec l’UEL entend identifier les problèmes soulevés, les évaluer, en discuter pour pouvoir les régler. Un rapport sera présenté d’ici un an afin d’aborder la problématique d’une façon constructive, car après tout, l’économie solidaire est une réalité sur le marché.
Pour ce qui est de la mise en œuvre, Paulette Lenert a rappelé son souci d’impliquer autant d’acteurs que possible. Un comité de pilotage va fixer les objectifs, évaluer les actions et suivre le planning de mise en œuvre.
Une première table-ronde réunissait un panel très varié d’intervenants avec l’idée de faire un tour des expériences existantes, de voir le rôle des autorités locales, mais aussi d’identifier des projets concrets qui auraient pu être au service de ce plan d’action.
Le ministre Romain Schneider comptait parmi les intervenants de cette table ronde dont il espérait qu’elle permettrait de collecter les idées et expériences faites par ces acteurs afin d’identifier des pistes à suivre, mais aussi les erreurs à ne pas commettre. Le ministre s’est particulièrement réjoui de la présence des communes – la ville de Lille était représentée, mais aussi celle d’Esch/Alzette – qui sont selon lui les plus proches des citoyens et donc les mieux à mêmes de mettre en place des services qui répondent à leurs besoins, mais aussi de l’implication d’acteurs œuvrant au niveau européen. Car il est encore possible d’intégrer de nouvelles idées au plan d’actions présenté, ainsi que l’a souligné le ministre.
Christiane Bouchart, conseillère municipale de Lille déléguée à l’économie sociale et solidaire, a souligné à quel point l’économie solidaire est une politique transversale qui traverse l’emploi – et elle appelle à ce titre à sortir de la logique de "réparation" en innovant par l’entrepreneuriat collectif, notamment dans le secteur environnemental -, l’utilité sociale, ou encore la démocratie participative.
Son expérience n’est pas celle d’une logique de dépendance, mais d’un partenariat de la collectivité territoriale avec la société civile, une expérience qui renouvelle à ses yeux la relation entre élus et société civile. C’est en tant que partenaire que peut se positionner la collectivité, qui a besoin du débat, et qui peut accompagner les structures afin qu’elles se réalisent. Dans la logique du 1er plan de la Ville de Lille, il s’est agi d’identifier les besoins et de co-construire avec les acteurs, qu’il a fallu structurer, accompagner, les services y répondant.
"Il faut pouvoir irriguer l’ensemble des politiques publiques avec ce modèle", plaide l’élue lilloise qui a expliqué la possibilité d’utiliser par exemple les marchés publics comme leviers pour l’économie solidaire. Citant l’exemple de l’alimentation, Christine Bouchart a relevé la possibilité de structurer toute une filière pour répondre à la préoccupation d’avoir une alimentation à la fois saine et locale. Le deuxième plan de développement de l’économie sociale et solidaire de la ville de Lille a vu la création de 480 emplois, ainsi que la mise en place de coopérations d’intérêt collectif dont les collectivités peuvent être au capital au côté des salariés et des usagers. Une société d’auto-partage fonctionne par exemple de la sorte.
Isabelle Ballay, directrice du Pôle lorrain de l’utilité sociale (PLUS), structure qui réunit l’ensemble des acteurs de l’économie sociale et solidaire et qui est née de la volonté de la Région Lorraine, du Ministère de l’Emploi et de la Caisse des Dépôts, a expliqué que l’organisation qu’elle dirige a vocation à structurer et fédérer, à optimiser les compétences de l’économie solidaire tout en alimentant la réflexion politique. Ainsi, les acteurs de l’économie sociale et solidaire ont-ils pu par exemple apporter une réponse collective à un appel à projet pour pouvoir promouvoir l’entrepreneuriat social, accompagner la création d’entreprises, mener une étude sur l’opportunité d’un fonds de confiance lorrain visant à appuyer des projets novateurs.
L’objectif, c’est de pouvoir articuler les ressources, de travailler sur le maillage territorial et de favoriser les synergies entre acteurs du territoire. La complémentarité sur le territoire entre économie classique, et notamment le tissu des PME, et économie sociale et solidaire, est un des grands chantiers en cours. L’économie sociale et solidaire, "une économie à part entière, mérite d’être valorisée et promue", estime en effet Isabelle Ballay qui travaille à l’idée de labelliser les entreprises sociales.
Parmi les autres chantiers en cours, la directrice du PLUS a aussi évoqué le travail mené pour prévenir les risques dans les structures de l’utilité sociale, des risques qui relèvent tant de la gouvernance, de la gestion financière que des relations aux pouvoirs publics. L’idée est d’offrir une boîte à outils aux structures, de façon à ce qu’elles puissent anticiper certaines de ces difficultés. Le PLUS est par ailleurs engagé dans l’animation d’une chaîne régionale de l’accompagnement de l’entrepreneuriat social.
Lydia Mutsch a insisté quant à elle sur la coresponsabilité entre secteurs public et privé pour promouvoir la cohésion sociale et créer des emplois. La bourgmestre de la ville d’Esch/Alzette, qui se félicite des discussions récentes au Luxembourg sur l’économie sociale et solidaire, a identifié des pistes au niveau local - services à la personne, réduction du fossé numérique, création et culture, environnement et développement durable ou encore patrimoine -, relevant qu’il n’y a pas de domaines dans lesquels l’économie solidaire n’intervient pas. A Esch, a raconté la bourgmestre, le premier projet solidaire d’envergure s’appelait Vel’Ok , un projet au service des citoyens qui avait en plus le mérite de créer des emplois. "Un projet parfait", pour Lydia Mutsch.
Selon elle, l’essentiel est d’avoir le réflexe de penser, pour tout projet innovateur, à intégrer l’idée d’engagement solidaire, ce qui n’est pas encore automatique. Un exemple ? Au cours de la journée de concertation avec le Ministère de l’Emploi sur le chômage des jeunes, l’idée est venue, au fil des discussions avec les acteurs de terrain, d’inscrire une charte d’emploi des jeunes dans la philosophie de l’économie solidaire. Autre idée avancée par Lydia Mutsch, un concept de city-line, permettant de relier entre eux les différents pôles de commerce d’Esch, qui va s’inscrire dans l’économie solidaire et permettre d’engager six personnes.
Lydia Mutsch estime que le plan d’action mis sur la table montre qu’il y a des bonnes pratiques, et elle est pour sa part "demandeur pour participer à ces projets en les accompagnant, en sponsorisant des prix pour promouvoir cette idée ou encore en finançant une chaire universitaire dans le domaine de l’économie sociale et solidaire".
Ralph Böhlke, président du réseau IRIS, la plateforme européenne de l’économie sociale, a pour sa part présenté la méthodologie SPIRAL, méthodologie élaborée par le Conseil de l’Europe dans son travail dans les pays de l’Est, où l’absence de société civile va souvent de pair avec l’existence de peu de services sociaux. L’objectif ? C’est d’identifier les besoins des citoyens en leur donnant un rôle actif. Car si l’équation "croissance économique = bonheur" marche parfois, ce n’est pas toujours le cas, le bien être étant bien souvent difficile à quantifier. Cette méthode développée par le Conseil de l’Europe permet ainsi de mesurer le bien-être humain auprès de groupes de citoyens représentatifs qui peuvent ainsi évaluer, mais aussi infléchir, les politiques mises en place. Une méthode qui peut être appliquée sur les territoires, mais aussi dans les entreprises ou les hôpitaux par exemple, l’idée étant de mettre en avant la valeur ajoutée apportée, en dehors de l’argent généré.
Une méthode appliquée au Luxembourg avec le réseau OPE dans le cadre du projet Access.LU. Romain Biever, du réseau Objectif Plein Emploi, a pu témoigner de la mise en œuvre de ce projet qui s’inscrit dans la continuité des travaux de l’OPE et dont l’objectif est de détecter les indicateurs du bien-être pour pouvoir offrir une économie qui répond aux besoins et aux ambitions locales et durables. Il s’agit selon lui de "démocratiser l’économie". Ce projet pilote est mené au Luxembourg en partenariat avec Pétange, Schifflange, Grevenmacher et Wiltz, la première phase consistant à constituer des groupes homogènes et représentatifs avant de mettre en place des "comités arc-en-ciel" pour pouvoir formuler dans un troisième temps des propositions locales pour améliorer le bien-être. "Il n’est pas évident de démarrer un tel projet, car dans les communes, il faut démontrer qu’il ne s’agit pas d’un cahier de doléances, mais qu’il y a une plus-value", a témoigné Romain Biever.
Claude Haas, chercheur auprès de l’unité INSIDE à l’Université de Luxembourg s’est vu demander quel lien existait entre ses travaux de recherche sur l’insertion professionnelle et le plan d’action. Comme l’a rappelé le chercheur, la majorité des acteurs de l’économie solidaire trouvent leur origine dans la mise en œuvre de politiques de l’emploi et dans l’insertion professionnelle. Or, estime-t-il, l’économie solidaire à toujours un rôle à jouer dans l’insertion professionnelle des années à venir, à condition, précise le chercheur, qu’elle gagne en autonomie et sorte de la tutelle, notamment financière, des politiques de réinsertion. Pour développer son potentiel de développement local et d’emploi durable, il faut aussi que l’économie solidaire soit complémentaire de l’économie de marché et de l’entraide sociale. Pour Claude Haas, il importe que le département de l’économie solidaire soit doté d’une infrastructure pour pouvoir promouvoir l’économie solidaire. Mais il voit aussi dans la capacité à se mettre plus encore dans l’esprit de l’entrepreneuriat social, par la créativité, comme un des enjeux pour la suite. Enfin, relevant que l’avenir ne peut se construire sans le passé, Claude Haas a lancé l’idée de créer un centre de ressources sur l’économie sociale et solidaire.
A la lumière de l’expérience du projet PASE, qui réunissait 9 villes et régions d’Europe provenant de 7 pays différents, Denis Stokkink, du think-tank européen pour la solidarité, a souligné que la participation du Luxembourg à des projets transnationaux de ce type pourrait compléter les travaux engagés dans le cadre du plan national en contribuant à fédérer les acteurs, mais aussi à les former. Denis Stokkink a aussi fait la distinction entre le besoin de fédérer les acteurs, et l’écueil, à éviter, qui reviendrait à les confondre : "chacun a sa place et il faut travailler main dans la main et mettre en évidence les spécificités de chacun, la complémentarité des acteurs", a-t-il ainsi recommandé. A ses yeux, la question du levier que constitue pour l’économie sociale et solidaire les marchés publics, qui peuvent avoir des clauses sociales, est un enjeu essentiel : les commandes publiques de services et de produits qui sont durables et qui ont une plus-value sociale ne sont pas assez utilisées à son goût. Enfin, Denis Stokkink a relevé l’importance de constituer des filières économiques. Il est en effet essentiel d’avoir des complémentarités entre acteurs afin qu’ils travaillent sur des sujets qu’ils connaissent. Et il a cité pour exemples deux secteurs essentiels pour l’économie solidaire que sont les emplois "verts" et les emplois "blancs" (à savoir les services à la personne). Pour lui, de nombreux exemples pertinents pourraient se relier pour constituer des filières, vecteurs qui pourraient permettre au plan d’avancer plus vite.
La session de l’après-midi débuta avec une intervention d’Emmanuel Vallens, coordonnateur des politiques à la DG Marché Intérieur de la Commission Européenne. Celui-ci s’est évertué à convaincre son public que l’économie solidaire est considérée dans l’UE comme un des leviers pour faire avancer le marché unique, du simple fait que le rapport de Mario Monti a souligné l'importance de réconcilier les préoccupations sociales et le besoin d'approfondir le marché unique. L’orateur a poursuivi en expliquant qu’il y a différentes conceptions de ce qu’est l’économie sociale ou solidaire au sein des Etats membres et entre Etats membres. De toute façon, ce qui intéresse l’orateur, ce n’est pas le statut juridique d’une entreprise, mais son modèle. Pour l’UE, il y a trois critères principaux :
Quelle est l’action de l’UE en faveur de ces entreprises ? La Commission est pour un accès plus facile aux financements publics et aménagera donc un accès facilité aux fonds structurels. Pour que plus d’argent privé soit mobilisé pour ces entreprises, elle veut créer un cadre légal pour des fonds d’investissement sociaux, afin qu’ils soient plus souvent proposés aux investisseurs. La Commission se rend compte que le secteur a un problème de visibilité de son action qui se traduit par un manque de reconnaissance, voire de confiance dans les circuits de distribution et les marchés publics. Elle voudrait dans ce sens réviser la réglementation des marchés publics afin qu’ils tiennent compte de l’économie solidaire, ainsi que celle sur les aides d’Etat, notamment par le biais d’une révision des textes sur les services économiques d’intérêt général (SIEG). Et pour que les entrepreneurs sociaux connaissent eux-mêmes mieux la réglementation, un portail devrait être créé. Bref, l’économie solidaire ou sociale fait pour la Commission partie du Marché intérieur. Au cours des discussions qui suivirent, Emmanuel Vallens put encore exprimer la nouvelle préoccupation de la Commission après la publication de la communication : la mise en réseau de l’entrepreneuriat social dans l’UE. Mais qui est représentatif ? Qui prendrait en main la mise en place d’un forum ? Pour le ministre Schneider, toute initiative de ce genre devrait revêtir une dimension transfrontalière.
Dans l’exposé et la table ronde qui ont suivi, il fut possible de glaner nombre d’informations sur le Luxemburg et l’économie solidaire.
Une nouvelle perspective d’accompagnement de plan d’affaires d’entreprises sociales au Luxembourg fut expliquée par Frédérique Gueth de la Business Initiative asbl, qui a d’ores déjà, avec un réseau de 400 experts, accompagné en 11 ans 521 projets sur 2400 projets déposés et 1000 acceptés, dont 240 ont débouché sur une création d’entreprises et la création de1000 nouveaux emplois. Pour l’économie sociale, Business Initiative se propose d’accompagner de vrais projets économiques qui répondent à un vrai besoin d’utilité sociale et qui mettent en valeur une gouvernance particulière.
Thomas Seale, de la Sustainable Funds Technical Commission de l’ALFI, a apporté "le soutien moral de la place financière", mais il a souligné aussi la possibilité de développer d’autres segments de placements financiers. La micro-finance du type Mohammed Yunus a rassemblé quelques 2 milliards en des fonds d’investissements domiciliés au Luxembourg. L’ALFI est membre de la plate-forme européenne de la micro-finance. Le Luxembourg, a-t-il précisé, fournit un cadre juridiquement favorablement aux investissements responsables, qui se chiffrent à 8 milliards sur la place financière. Viennent ensuite les fonds écologiques et éthiques qui rassemblent 15 milliards sur une place financière où les actifs des OPC tournent autour de 2000 milliards. Ce sont donc, selon Thomas Seale, de "petits chiffres". Mais la différence entre l’économie sociale et ces fonds, c’est qu’il faut un rendement, même petit, et il faut éviter qu’il y ait trop d’argent dans trop peu de projets.
Ekkehart Schmidt-Fink a exposé les objectifs d’Etika, un projet d’épargne logé à la BCEE dont les fonds – 40 millions d’euros venant de 996 épargnants, ce qui a paru une somme énorme aux hôtes d’autres pays - sont orientés vers les secteurs écologiques et sociaux. Aucun des projets financés par Etika depuis la dizaine d’années de son existence n’a fait faillite.
Tonika Hirdman, directrice de la Fondation de Luxembourg, a défini sa fondation comme un organisme qui accompagne des donateurs – donc des personnes qui font un don qui est définitif - dans leurs visées philanthropiques. Cette démarche philanthropique peut aider un projet à démarrer ou à rebondir, à lui donner aussi une certaine visibilité. La Fondation de Luxembourg, a-t-elle précisé, soutient des personnes et des projets dont l’objet est d’arriver à s’autofinancer dans la durée.
David Hiez, professeur de droit à l’Université du Luxembourg, a souligné dans son intervention la situation particulière du Luxembourg par rapport à la discussion sur l’économie solidaire, où le pays n’a pas selon lui, une grande maturité. Les partis politiques en tant que tels en sont absents, de sorte que "la construction politique du secteur prend une voie différente". L’insistance sur la notion de "social business" rend la discussion plus complexe. D’autre part, par le fait que l’on ne fait pas la différence entre économie solidaire ou sociale et que l’on accepte donc une définition plus englobante, l’on suscite de nouvelles difficultés : de quoi parle-t-on vraiment, qui bénéficiera des mécanismes de soutien ? Pour David Hiez, le travail du secteur consistera à définir lui-même ce qu’il est. Et il doit bâtir ses réseaux.
Ce fut à Romain Schneider, le ministre délégué à l’Economie solidaire, de prononcer le mot de clôture. Pour lui, David Hiez a posé les bonnes questions et la Commission a aidé à cadrer le problème. Le cadre national doit être défini, mais il doit être plus relié à la Grande Région, à l’UE aussi, dans un esprit de subsidiarité bien sûr. Romain Schneider a surtout regretté que le débat ait encore manqué, faute de temps. Mais il a aussi promis un débat public, au cours de l’année, et jusqu’au prochain rendez-vous en 2012.