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TTIP - Selon les résultats d’une consultation publique publiés par la Médiatrice européenne, la plupart des répondants plaide pour une publication plus large des documents de négociation
07-01-2015


www.ombudsman.europa.eu : Le médiateur européenLa Médiatrice européenne Emily O’Reilly a publié le 7 janvier 2015 un rapport sur les résultats d’une consultation publique qu’elle avait lancée en juillet 2014 à propos de la transparence et de la participation du public au sujet des négociations sur le Partenariat transatlantique sur le commerce et l'investissement (TTIP) avec les Etats-Unis. 55 organisations, 3 eurodéputés et 257 personnes individuels ont participé à cette consultation qui était ouverte jusqu’au 31 octobre 2014. Parmi les organisations, il y avait des ONG environnementales, tout comme des organisations de l’industrie, du commerce, de l’automobile, de la santé, de l’agriculture, des services ou des consommateurs.

Le contexte

Ce rapport intervient alors que la Commission publiait le même jour une série de textes législatifs qui servent de base de négociation dans les négocions, lors d’une initiative de transparence après une multiplication des appels de la société civile à mettre fin à l’opacité qui entoure, selon elle, les négociations. La médiatrice avait pour sa part demandé en juillet 2014 à la Commission et au Conseil de l’UE d’adopter une "approche proactive" en termes de transparence et de publier davantage de documents liés aux discussions, dont les directives de négociation. Le mandat de négociation avait finalement été rendu public en octobre 2014, après avoir fuité dans la presse.

Le rapport de la médiatrice intervient alors que la Commission européenne doit publier le 13 janvier 2015 une analyse approfondie  de sa consultation publique sur les dispositions du TTIP relatives aux investissements, notamment le règlement des différends entre investisseurs et Etats (RDIE ou ISDS), lancée en mars 2014, après la publication d’un rapport préliminaire en juillet 2014. Le RDIE a été contesté par plusieurs Etats membres, dont l’Allemagne et le Luxembourg.

La plupart des répondants plaide pour une publication plus large des documents de négociation

La consultation, appelée enquête d’initiative, consistait en trois questions :

  1. Quelles mesures concrètes la Commission pourrait-elle prendre pour accroître la transparence des négociations sur le TTIP?
  2. Donnez des exemples de bonnes pratiques que vous avez rencontrées dans ce domaine.
  3. Comment une transparence accrue pourrait-elle influer sur les résultats des négociations?

Quant à la première question, le rapport résume que les participants demandent plus de documents et d’informations relatifs au TTIP publiés en ligne sur un site facile à trouver, et dans l’idéal disponible dans toutes les langues officielles de l’UE (alors que la plupart des documents est en anglais). Une partie des répondants a soutenu la suggestion de la Médiatrice de créer un registre public des documents relatifs au TTIP. Pour certains, la publication de positions de négociation (dont une partie a déjà été publiée) ne va pas assez loin – un participant a ainsi demandé que des avis juridiques relatifs à l’interprétation du projet de texte de négociation soient également publiés.

La question de la classification des documents est également un souci de certains répondants qui ont réclamé l’adoption de règles sans ambiguïté afin de prévenir les décisions arbitraires. D’autres ont souligné qu’il ne devrait exister aucun accès sélectif à aucun document, mais qu’un document disponible pour une personne devrait l’être pour tous.

Pour d’autres, la transparence risque de compromettre les négociations

Pour d’autres, les mesures de transparence déjà adoptées par la Commission, totalement inédites selon eux, risquent de compromettre les négociations. Ils estiment qu’il est en pratique impossible d’accroître la transparence si l’Union souhaite obtenir des résultats satisfaisants à l’issue des négociations, note le rapport.

De nombreux répondants ont reconnu que certains documents devaient rester confidentiels (par exemple, dans les domaines des tarifs douaniers ou de l’accès aux marchés de services et aux marchés publics).

Selon un répondant, une transparence accrue aurait pour l’UE des conséquences négatives (ou une absence totale de résultat) parce que "dévoiler son jeu à son partenaire durant des négociations commerciales affaiblit votre pouvoir de négociation". Ce répondant estime que les documents publiés fourniraient aux partisans du "non" d’innombrables détails techniques leur permettant de lancer des "affirmations fallacieuses".

Plusieurs contributeurs ont souligné que les intérêts stratégiques de l’Union devaient rester confidentiels pendant toute la durée des négociations.

Des mesures pour accroître la participation du public

De nombreux répondants ont avancé des idées pour accroître la participation du public, notamment dans le groupe consultatif du TTIP, créé par la Commission en janvier 2014. Il sera composé d’experts représentant un éventail d’intérêts, dont la mission sera de fournir aux négociateurs commerciaux de l’UE des avis spécialisés. Une autre idée est d’organiser des consultations publiques à plusieurs stades : pour les premiers documents de prise de position produits par la Commission, pour chaque chapitre spécifique après sa conclusion et sa publication ou bien pour le projet final de texte consolidé avant qu’il ne soit paraphé.

Un répondant a suggéré que la Commission crée un tableau chronologique incluant toutes les étapes des négociations et les documents publiés. Un autre répondant suggère que la Commission publie un calendrier des activités pour les prochains cycles de négociations du TTIP, indiquant pour les questions spécifiques une personne de contact à laquelle le public pourrait adresser ses suggestions. La Commission devrait organiser des conférences avec les parties prenantes avant et immédiatement après chaque cycle de négociations.

Quant aux structures du dialogue social, le représentant d’un syndicat a déclaré que les syndicats européens devraient avoir un accès aux négociateurs de l’UE comparable à celui des syndicats américains aux négociateurs des États-Unis. Certaines organisations représentant les entreprises ont suggéré de créer un service d’assistance pour les PME, qui servirait de point de contact pour les entreprises, réunirait des informations et offrirait des conseils sur les aspects relatifs à l’accès aux marchés.

Autre proposition relevée, la Commission pourrait mettre en place une salle de lecture numérique qui permettrait aux parties prenantes d’accéder à des documents confidentiels spécifiques grâce à un système de mot de passe accrédité. Cela permettrait également de remonter à la source de toute divulgation de documents protégés par la confidentialité.

Certains participants ont suggéré que la Commission devrait publier une liste de toutes les réunions organisées par les négociateurs avec les parties prenantes ainsi que toutes les communications écrites relatives aux négociations entre la Commission et les parties prenantes, y compris les propositions soumises. La composition et les déclarations des intérêts des négociateurs et de leurs équipes devraient être publiées pour éviter les conflits d’intérêts ou l’impression qu’il existe de tels conflits.

Selon une suggestion récurrente relative au rôle du Parlement européen, les membres du Parlement européen devraient être pleinement informés, y compris à la fin de chaque cycle de négociations. Selon certains répondants, l’accès aux textes consolidés devrait être étendu à toutes les commissions parlementaires (et non à la seule commission du commerce international), voire à d’autres instances.

Quant aux exemples de bonnes pratiques, l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), l’OMC ou la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) ont été citées, notamment pour la publication de projets de documents de négociation progressivement actualisés ou la diffusion en ligne des négociations. Selon plusieurs répondants, malgré l’absence d’accord final, la Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA) s’est révélée être l’un des meilleurs exemples de négociations commerciales ouvertes et soumises à l’examen du public durant tout le processus de négociation.

La transparence aidera à démonter les mythes et restaurer la confiance

En ce qui concerne la question sur les conséquences d’une transparence accrue sur les négociations, la plupart des répondants estime qu’elles seront positives : la transparence promouvra une légitimité démocratique, renforcera la confiance dans la Commission et constituera le meilleur moyen de démonter les mythes et de dissiper les malentendus concernant le TTIP. Elle améliorera la qualité du débat public lié au TTIP, ce qui permettra aux parties prenantes d’influer véritablement sur les négociations, en se fondant sur les faits, et augmentera la probabilité que les parlements soient en mesure de donner leur accord. Elle permettra d’identifier à un stade précoce les dispositions qui ne seront pas soutenues par les parties prenantes. Elle réduira le risque que le TTIP connaisse le même destin que le traité ACTA et garantira le respect de la confidentialité et la réduction de la divulgation non autorisée de documents.