Les eurodéputés ont en effet adopté, par 446 voix pour, 181 contre et 60 abstentions, une résolution dans laquelle ils reconnaissent que la proposition de la Commission de réviser le cadre financier pluriannuel (CFP) pour 2014-20, faite le 14 septembre 2016, répond à leurs souhaits exprimés dans un rapport de juillet 2016, en faveur de davantage de flexibilité et de la constitution d'une réserve en cas de crise. "Le Parlement est prêt à négocier avec le Conseil immédiatement, et souhaite vivement trouver un accord pour un budget qui puisse bien fonctionner pendant les quatre années restantes de ce CFP", a déclaré le rapporteur Jan Olbrycht (Verts/ALE), selon le communiqué de presse du Parlement européen.
Déjà lors de son adoption, en 2013, les eurodéputés avaient estimé que le cadre financier pluriannuel (CFP) 2014-2020 n'était pas suffisant. Mais, ils l'estiment d'autant moins suffisant pour une UE qui doit faire face aux nombreuses nouvelles crises et aux priorités qui ont émergé ces dernières années. Les eurodéputés insistent ainsi sur la flexibilité car ils pensent qu'elle permettra de répondre plus promptement aux défis tels que la crise migratoire, le terrorisme et les problèmes de sécurité intérieure, la crise agricole et le chômage élevé, en particulier chez les jeunes, indique la résolution.
Toutefois, le Parlement européen déplore que la Commission ne modifie pas les plafonds budgétaires, définis pour les rubriques "compétitivité, "cohésion", "justice et sécurité" et "UE dans le monde". Par le biais d'une révision de ces plafonds dès 2017, ils souhaitent obtenir des fonds supplémentaires pour les priorités de l'UE (migration, croissance et emplois). Ils regrettent ainsi que l'initiative pour l'emploi des jeunes, qui a utilisé pour l'heure 6 milliards de crédits, ne se voit pas octroyer plus que le milliard d'euros de renforcement jusqu'à 2020, proposé par la Commission. "Il faut a minima ajouter le même montant, soit six milliards d'euros pour la fin de la période budgétaire", a indiqué l'eurodéputée S&D, Isabelle Thomas, également rapportrice.
Concernant leur suggestion émise en juillet de créer une réserve permanente, au sein du budget européen, qui puisse être mobilisée en cas de crise afin d'éviter les solutions ad hoc telles que la mise en place de fonds "hors budget", laquelle a été intégrée dans la proposition de la Commission publiée le 14 septembre 2016, les eurodéputés insistent cependant pour que cette réserve soit suffisamment alimentée et soulignent qu'il faudra encore réfléchir à son périmètre et son financement.
Les députés estiment par ailleurs que chaque euro engagé dans le budget de l'UE devrait être utilisé, et tout surplus devrait rester dans le budget afin d'être alloué aux priorités et ainsi éviter la constitution d'impayés, comme ce fut le cas lors du précédent CFP. Le PE soutient aussi les propositions d'utilisation des "dégagements d'office" à l'intérieur du budget européen.
Par ailleurs, ils estiment que la révision du CFP devrait également mener à des engagements sur l'après-2020, au sujet de la réforme des ressources propres et de la suppression des rabais consentis à certains États membres.
Le projet de résolution souligne que toutes les modifications décidées pendant la révision à mi-parcours du CFP devraient être intégrées au budget 2017. Les eurodéputés ont ainsi convenu que la révision du CFP et le budget 2017 doivent être négociés ensemble. Ils veulent en conséquence que le Conseil adopte rapidement sa position sur le CFP, afin de faire avancer les négociations", a déclaré Isabelle Thomas (S&D). "Nous sommes déterminés à ce que les négociations avancent rapidement afin d'éviter la crise budgétaire qui menace l'Union", a-t-elle ajouté.
Si "la crise budgétaire" menace l'Union, aux yeux d'Isabelle Thomas , c'est aussi parce que les eurodéputés européens ont adopté, le même jour, leur position sur le projet de budget 2017, qui augmente fortement les crédits et font dépasser les plafonds (2017) de la quasi-totalité des rubriques du cadre financier pluriannuel (CFP).
Dans son projet de budget pour 2017, la Commission a proposé de fixer le niveau total des engagements à 157,66 milliards d'euros et celui des paiements à 134,9 milliards d'euros. Les eurodéputés tablent sur un budget 2017 pour l'UE de 160,7 milliards d'euros en engagements (+ 4,1 milliards d'euros par rapport au projet de budget de la Commission) et de 136,7 milliards d'euros en paiements (+2,5 milliards). Cela représente pour les engagements, 3,26 milliards d'euros de plus que les plafonds prévus par le CFP.
"Le combat va être dur, mais nous l'abordons avec confiance", a commenté le président de la commission des budgets du PE, Jean Arthuis (ADLE, français), à l'issue du vote. "L'Union doit faire face à un nombre sans précédent de défis. Si nous voulons vraiment nous y attaquer, il nous faut un budget à la hauteur. Lorsque nous avons négocié le cadre financier pluriannuel (CFP) pour la période 2014-2020 en 2013, beaucoup moins de réfugiés arrivaient en Europe chaque année. Nous devons reconnaître que la situation a changé. Il nous faut un budget plus ambitieux, et une révision intelligente du CFP car l'actuel est obsolète", a déclaré le rapporteur sur le budget général, Jens Geier (S & D), selon le communiqué du Parlement. Le chômage des jeunes est encore beaucoup trop élevé en Europe. "Nous demandons 1,5 milliard d'euros pour l'initiative pour l'emploi des jeunes, ce qui sera possible en révisant le CFP", a-t-il ajouté.
Le PE a notamment restauré les budgets initiaux au titre du Mécanisme pour l'interconnexion en Europe et du programme Horizon 2020, qui avaient subi des coupes afin de financer la contribution de l'UE au Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS), soit une hausse de 1,24 milliard d'euros par rapport à la proposition initiale. Ces fonds seraient obtenus par le biais de la révision à mi-parcours du CFP.
Par ailleurs, le Parlement européen a accepté les modalités de financement proposées par la Commission européenne sur les crédits supplémentaires pour gérer la crise des réfugiés.
Les députés ont augmenté les crédits d'engagement pour l'agriculture de 600 millions d'euros, afin de remédier à la crise dans le secteur du lait et aux effets de l'embargo russe sur les produits agroalimentaires de l'UE. Le PE a, enfin, renforcé le sous-programme MEDIA (+ 10,8 millions) et les actions multimédia (+ 13 millions).
Par ailleurs, le Parlement européenne a adopté un amendement plaçant 20 % des rémunérations des anciens commissaires en réserve, jusqu'à ce que la Commission mette en place un code de conduite plus strict pour empêcher les conflits d'intérêt et les pantouflages. "Nous frappons les anciens commissaires au portefeuille", a dit l'eurodéputé Verts/ALE, Indrek Tarand, en référence aux deux scandales les plus flagrants impliquant M. Barroso et Mme Kroes. "Je suis confiant que cela encouragera la Commission à agir, à la lumière des récentes révélations", a-t-il soutenu.
Le 26 octobre 2016, le Conseil a informé le Parlement européen qu'il n'était pas en mesure d'accepter l'ensemble de ses amendements pour le budget 2017 de l'UE, adoptés le même jour. Il a ainsi officiellement ouvert une période de conciliation d'une durée de trois semaines, à partir du 28 octobre 2016 pour permettre au Conseil et au Parlement de rapprocher leurs positions.
Le comité de conciliation se réunira le 8 novembre, puis le 16 novembre, date à laquelle un Conseil Ecofin/Budget se tiendra pour donner des orientations à la présidence en vue des négociations avec le Parlement. Si aucun accord n'est trouvé d'ici la fin de la période de conciliation, soit le 17 novembre, la Commission doit présenter un nouveau projet de budget pour 2017.
"Je suis heureux de constater que le Conseil et le Parlement partagent les mêmes objectifs pour le budget 2017 de l'UE: permettre à l'UE de faire face à la crise migratoire, de renforcer la sécurité, de stimuler la croissance et de créer des emplois. Je suis ainsi convaincu que nous pourrons nous mettre d'accord sur le meilleur budget possible pour l'UE – un budget qui bénéficie aux contribuables européens, aux citoyens européens et aux entreprises européennes", a déclaré Ivan Lesay, secrétaire d'État slovaque aux finances et président du Conseil européen. La position du Conseil établi en comité COREPER le 20 juillet 2016 révoit des montants de 156,38 milliards d'euros en engagements et de 133,79 milliards d'euros en paiements, soit une hausse des engagements de 0,9 % et une baisse des paiements de 7 %, en comparaison avec le budget 2016.
Le document énumère les principales difficultés pour parvenir à un accord sur le budget 2017 de l'UE.
Le premier point est la révision du CFP 2014-20, pour laquelle le Parlement défend un niveau des engagements "largement supérieur aux plafonds de dépenses prévus "nuirait fortement à la capacité de l'UE de faire face à des besoins imprévus". Lors du Conseil Affaires générales du 18 octobre 2016, les Etats membres contributeurs nets au budget de l'UE (Allemagne, France, Autriche, Pays-Bas, Suède, Finlande, Danemark notamment) avaient insisté sur le besoin de respecter, et donc de ne pas augmenter, les plafonds du CFP décidés en 2013.
Ensuite, le Conseil fait valoir que les Etats membres s'efforcent d'assainir leurs finances publiques, et qu'il ne serait donc pas pertinent de les obliger à apporter de nouvelles contributions au budget.
Le troisième point concerne le réexamen de l'accord intervenu avec le Conseil en 2015 sur le financement du FEIS qui, aux yeux du Conseil, "réduirait la marge de manœuvre financière de l'UE pour faire face à des besoins imprévus en matière de recherche et autres dépenses orientées vers l'avenir".
Ensuite, le Conseil déplore que le Parlement européen veuille limiter la réduction du personnel des institutions de l'UE, à un niveau bien en-dessous de l'objectif de 5 % d'ici 2017.
Enfin, le Conseil rejette l'idée de discuter ensemble le budget annuel de l'UE et l'examen à mi-parcours du CFP, "ce qui aurait pour effet de fusionner deux dossiers qui font l'objet de procédures de décision très différentes et qui devraient donc être traités dans le cadre de deux négociations distinctes". Pour cause, la révision du CFP est négociée par le Conseil Affaires générales tandis que le projet de budget 2017 est discuté au sein du Conseil ECOFIN.
Le Conseil note par ailleurs que la conciliation portera également sur la lettre rectificative n° 1 pour 2017, qui vise à augmenter le soutien pour stimuler la croissance, créer des emplois et s'attaquer aux causes profondes des migrations, au sujet de laquelle ni le Conseil ni le Parlement n'ont encore adopté de position.