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Élargissement - Fiscalité - Politique étrangère et de défense - Traités et Affaires institutionnelles
Dans une interview avec la journaliste autrichienne Margaretha Kopeinig, Jean Asselborn livre le fond de sa pensée sur les dossiers d’actualité d’une UE en transition
23-02-2010


KurierQuelques jours avant sa visite de travail en Autriche les 24 et 25 février 2010, le ministre des Affaires étrangères, Jean Asselborn a accordé une interview à la journaliste Margaretha Kopeinig du quotidien autrichien Kurier. A cette occasion, le ministre s’est notamment exprimé au sujet du secret bancaire et de la politique fiscale dans l’Union européenne. Par ailleurs, il a abordé le processus décisionnel de l’UE, et notamment le fait que les ministres des Affaires étrangères ne participent plus aux Conseils européens. Enfin, le ministre s’est penché sur les perspectives d’adhésion des pays des Balkans, le service diplomatique européen, ainsi que sur la social-démocratie en Europe.

Concernant le secret bancaire, Jean Asselborn a expliqué que les discussions y relatives doivent être menées au sein des gouvernements concernés et du Conseil des ministres des Finances de l’UE. "Je suis persuadé qu’une approche différente s’impose dans tous les pays en matière de secret bancaire", a souligné le ministre. Et d’ajouter qu’il faut éviter de se focaliser uniquement sur le secret bancaire, mais qu’il faudra aussi discuter des avantages fiscaux concédés aux entreprises qui existent dans de nombreux Etats membres de l’UE.

En ce qui concerne le fait que les ministres des Affaires étrangères ne participent plus aux Conseils européens, Jean Asselborn pense que, puisque les chefs de gouvernement n’ont pas le temps de se consacrer à la politique étrangère, les ministres des Affaires étrangères sont indispensables dans de nombreuses questions. Mettre la défense des intérêts aux mains de fonctionnaires serait, aux yeux du ministre, contraire à la diplomatie démocratique sous contrôle parlementaire. Pour lui, Bruxelles doit tenir compte du fait que de nombreux Etats membres sont dirigés par des gouvernements de coalition. Et d’ajouter que la politique étrangère de l’UE nécessite toujours le consensus des 27 qui s’obtient d’abord au Conseil.

"L’UE n’est pas un peuple ou un Etat, et elle n’a pas de gouvernement", a souligné Jean Asselborn. Il a également déclaré qu’"il y a une division du travail dans l’UE", dont la "structure diffère de celle des Etats-Unis, de la Chine et de la Russie". Selon le ministre, l’UE développe d’abord un point de vue commun et prend ensuite des décisions. Pour lui, la complexité de ce processus décisionnel ne tourne pas au chaos si tout le monde joue son rôle. "Le grand défi est de parler d’une seule voix sans disposer de structures hiérarchiques d’un gouvernement", a-t-il expliqué.

Jean Asselborn pense que les pays des Balkans doivent améliorer leur image et miser sur la collaboration régionale en vue d’adhérer rapidement à l’UE. Selon le ministre, 2010 sera d’ailleurs une année clé pour la Serbie, dont il espère qu’elle changera d’attitude vis-à-vis du Kosovo après l’avis juridique de la Cour internationale de Justice (CIJ). "Cela va faire mal, mais ce sera dans l’esprit d’une Serbie qui veut adhérer à l’UE". Abordant la question d’une éventuelle séparation de la Bosnie-Herzégovine, Jean Asselborn a tenu à souligner que "toute séparation des Balkans, tout nouveau conflit serait fatal", notamment pour l’UE qui est un projet de paix.

Le ministre des Affaires étrangères a par ailleurs abordé la question du service diplomatique européen, qu’il juge de très positif pour le Luxembourg. "L’UE doit offrir des effets de synergie", a-t-il souligné en ajoutant que de nombreux aspects se laissent regrouper au niveau consulaire. Et d’ajouter : "Pendant des temps de crise, la fermeture d’ambassades peut s’avérer avantageuse, mais elle peut aussi s’avérer profitable d’être présent. Chaque pays doit décider seul."

En guise de conclusion, le ministre des Affaire étrangères a abordé la question de la social-démocratie en Europe. Abordant le fait que la majorité des pays de l’UE sont dirigés par un gouvernement conservateur, Jean Asselborn a expliqué que les rapports de force ont changé et que la libéralisation a été le facteur qui a divisé la social-démocratie. Mais il pense que la social-démocratie peut faire bouger beaucoup de choses dans ce "monde nerveux", et notamment réduire la dynamique négative entre les cultures. "L’alliance des civilisations est importante, et le projet Turquie (…) pourrait aider à mettre l’Europe sur les bons rails", a-t-il expliqué. Il pense par ailleurs qu’il faut démonter les arsenaux nucléaires et renforcer la coopération avec les pays pauvres. Et Jean Asselborn de conclure : "Si cela ne réussit pas, nous vivons sur une planète explosive."