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Economie, finances et monnaie
Les députés luxembourgeois réagissent à l’idée d’une analyse ex ante par la Commission des orientations budgétaires nationales
19-05-2010


Lors du Conseil Ecofin du 18 mai 2010, les ministres des Finances ont débattu de la proposition de la Commission européenne d’analyser avant leur vote dans les parlements nationaux les orientations budgétaires des gouvernements des Etats membres selon les critères de stabilité fixés dans les traités.

La veille, à l’issue d’une réunion de l’Eurogroupe au cours de laquelle le sujet avait aussi été abordé, Jean-Claude Juncker avait précisé qu’il ne s’agissait pas de porter atteinte au premier pouvoir parlementaire qui est le pouvoir budgétaire, mais de favoriser la discussion entre ministres sur les grands axes de leur politique budgétaire à venir. Il avait ajouté, jugeant nécessaire de pouvoir évaluer les conséquences des décisions des uns sur la situation des autres  : "Il nous importe que les parlementaires nationaux puissent prendre leurs décisions en ayant à l’esprit les commentaires que les autres pays membres de la zone euro auront pu faire".

Le ministre des Finances, Luc Frieden, a de son côté estimé, selon l'édition du 19 mai 2010 du quotidien luxembourgeois La Voix, que "loin d’attenter à la souveraineté des Etats, cette coordination améliorera la décision des parlements nationaux en mettant un avis supplémentaire à leur disposition".

Les réactions du monde parlementaire

Le Luxemburger Wort rapporte dans son édition du 19 mai 2010 que le président de la Chambre des députés, Laurent Mosar, approuve le rôle de supervision de la Commission dans le domaine budgétaire. Mais il estime en même temps que les Etats membres doivent continuer à pouvoir fixer eux-mêmes leurs priorités budgétaires. Aucune décision n’ayant été prise encore et vu que ses détails n’ont pas encore été discutés, Laurent Mosar n’a pas voulu commenter plus avant l’idée d’une analyse ex ante des orientations budgétaires nationales par la Commission européenne.

Autre son de cloche du côté des députés. Le Tageblatt rapporte les réactions beaucoup moins consensuelles d’Alex Bodry (LSAP), Xavier Bettel (DP) et François Bausch (Déi Gréng).

Le président du LSAP, Alex Bodry est d’avis qu’une telle procédure ne vaut que pour des cas spécifiques où la dérive budgétaire est évidente. Selon lui, les traités européens ne confèrent pas à la Commission des compétences pour pouvoir évaluer en amont le projet de budget d’un Etat membre.

Xavier Bettel, le chef du groupe politique libéral, a du mal à imaginer qu’une instance supranationale puisse superviser la loi la plus importante sur laquelle un parlement national doit statuer. Le chef de file libéral ne nie pas la nécessité d’un contrôle, et suggère plusieurs façons d’impliquer la Commission, par exemple en lui permettant de déléguer un observateur à la commission des finances et du budget ou bien de présenter un avis, à l’instar des chambres professionnelles et du Conseil d’Etat.

François Bausch, le président du groupe politique des Verts, pense qu’une analyse des orientations budgétaires nationales par la Commission européenne ne serait utile que si l’UE disposait d’une véritable union économique et sociale, et pas seulement d’une union monétaire. Un avis de la Commission aurait aussi peu d’effets que n’en a eu selon lui le pacte de stabilité et de croissance pour éviter la crise grecque. François Bausch redoute qu’une telle façon de procéder risque même de déclencher des tendances nationalistes.

Seul Jean-Louis Schiltz, le chef de la fraction du CSV, trouve en fin de compte qu’une implication de la Commission européenne dans le débat budgétaire nationale ne serait "pas un drame", mais au contraire une bonne initiative pour empêcher des dérives qui s’annoncent. Comme Laurent Mosar, il voudrait voir les détails d’une décision avant de se prononcer plus. Mais il estime d’ores et déjà que la Commission ne pourrait se prononcer sur des orientations budgétaires nationales sans concertation avec le parlement national, qui sera toujours, de par ses droits, le dernier à décider.