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Politique étrangère et de défense
La question du gel des avoirs des proches d’Hosni Moubarak n’a été évoquée qu’en marge du Conseil Ecofin
15-02-2011


Suite à l’annonce, le vendredi 11 février 2011, de la démission du président égyptien Hosni Moubarak, laquelle a été accueillie avec soulagement par le ministre des Affaires étrangères luxembourgeois Jean Asselborn, l’UE se retrouve face à une nouvelle urgence : faut-il ou non geler les avoirs des responsables égyptiens ?

La question a surgi notamment le 14 février, alors que les ministres des Finances européens se retrouvaient à Bruxelles pour un Eurogroupe suivi d’un Ecofin. Si un certain nombre de ministres attendaient que les autorités égyptiennes leur fassent la demande de geler les avoirs d’ex-hauts responsables égyptiens, le Premier ministre luxembourgeois Jean-Claude Juncker se prononçait lui pour suivre l’exemple de la Suisse qui a décrété dès le 11 février, à titre préventif, un gel pour trois ans de tous les avoirs que pourraient détenir dans la Confédération l'ancien chef de l'Etat égyptien et son entourage. L’objectif était d'éviter d'emblée "tout risque de détournement de biens appartenant à l'Etat égyptien".Les ministres des Fiannces de l'UE érunis à Bruxelles le 15 févreir 2011. Source : le Conseil de l'UE

Entre temps, les autorités égyptiennes ont demandé à plusieurs pays européens de geler les avoirs d'ex-hauts responsables du régime de Hosni Moubarak, mais pas du président déchu lui-même.

Paris a été saisi par les autorités égyptiennes "d'une requête de gel des avoirs d'anciens responsables égyptiens", ainsi que l’a déclaré le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Bernard Valero, qui a ajouté que cette demande était examinée et qu’il s’agissait de coopérer avec les autorités égyptiennes. La France a d'ailleurs appelé le 15 février les opérateurs financiers à signaler tout mouvement suspect autour des avoirs égyptiens, selon un communiqué de Tracfin, la cellule anti-blanchiment du ministère français des Finances.

L'Allemagne a aussi annoncé avoir été approchée par l'Egypte qui lui a fait parvenir une "demande d'entraide judiciaire des autorités égyptiennes concernant le gel d'avoirs d'anciens membres du gouvernement et du parlement égyptiens". Une demande actuellement à l’examen selon un porte-parole du ministère allemand des Affaires étrangères.

A Londres, le ministre britannique des Affaires étrangères William Hague a indiqué également avoir "reçu une demande de la part du gouvernement égyptien de geler les avoir de plusieurs anciens responsables égyptiens". "Nous allons évidemment coopérer" avec les autorités égyptiennes "en travaillant avec l'Union européenne et les partenaires internationaux comme nous l'avons fait dans le cas de la Tunisie", a ajouté le ministre.

C’est donc notamment à la demande de la Grande-Bretagne que les ministres des Finances ont décidé de mettre la question d'un gel éventuel des avoirs de sept anciens responsables égyptiens à l’ordre du jour du Conseil du 15 février 2011.

"Cela sera décidé rapidement", rassure Wolfgang Schäuble alors que la question sera discutée par les ambassadeurs des 27 puis par les ministres lors du Conseil Affaires extérieures du 21 février

Si la question a bien été discutée "en marge" du Conseil du 15 février 2011, ainsi que l’a indiqué Wolfgang Schäuble, les ministres des Finances n’ont pas pris de décision à ce sujet. "Nous examinons cela. Cela sera décidé rapidement", a déclaré Wolfgang Schäuble.

Catherine Aston a confirmé par la voix de sa porte-parole que "les pays membres de l'UE ont reçu une requête du ministre des Affaires étrangères égyptien lundi pour le gel des avoirs de quelques hauts-responsables de l'ancien régime, mais pas pour l'ex-président Hosni Moubarak et sa famille".

La question est désormais à l'ordre du jour d'une réunion des ambassadeurs des 27 pays de l'UE et elle reviendra sur la table des ministres européens des Affaires étrangères lorsqu’ils se retrouveront pour le Conseil Affaires étrangères du 21 février.

Déi Gréng dénoncent au Luxembourg le non-gel des avoirs du clan Moubarak, véritable "coup porté à la face des manifestants de la place Tahrir" selon Sam Tanson

A peine bouclée la conférence de presse des ministres des Finances de l’UE, les Verts luxembourgeois réagissaient par voie de communiqué pour dénoncer avec vigueur le non-gel des avoirs du "clan Moubarak" par l’UE et le Luxembourg.

Pour les Verts, c’est là "un coup porté à la face des manifestants de la Place Tahrir" qui défilaient pour revendiquer "un pays propre, sans corruption ou abus de pouvoir et sans Moubarak et sa clique rapace". "Bien sûr il en allait de la liberté politique réprimée pendant trop longtemps, mais le déclencheur de cette révolte pacifique a été la situation sociale désolante des grands masses urbaines", expliquent les écologistes luxembourgeois dans leur communiqué.

Ils s’appuient sur un rapport publié en janvier 2011 par Global Financial Integrity selon lequel l’Egypte aurait perdu chaque année entre 2000 et 2008 près de 6,3 milliards de dollars du fait d’évasion fiscale et de fuites de capitaux. Le montant s’élèverait à plus de 13 milliards de dollars pour les seules années 2006 et 2007. Corruption et criminalité seraient liées à 60 % de ces sommes.

Pour la présidente du parti, Sam Tanson, "des prix du pain toujours plus élevés pour la majorité de la population alors que règne la corruption et que les puissants s’enrichissent  illégalement en toute impunité", sont "inacceptables" et elle appelle donc l’UE à "geler immédiatement les comptes de la clique de Moubarak"." L’UE a tout d’abord soutenu pendant des années les dictateurs de la région et elle empêche maintenant que de l’argent illégal soit saisi et remboursé", dénonce Sam Tanson.

François Bausch, président du groupe parlementaire, dit pour sa part "ne pas comprendre pourquoi le ministre Frieden laisse, comme dans le cas de Ben Ali, à nouveau filer les choses". "Une réaction rapide est dans ce cas la moindre des choses à faire vis-à-vis des Egyptiens et des Tunisiens", estime François Bausch qui ajoute que "nous n’avons pas le droit d’aider ces potentats qui pillent leur pays et nous devons rendre rapidement l’argent qui se trouve sur des comptes luxembourgeois".