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Economie, finances et monnaie
"Le pacte pour l’euro n’est pas anti-social en soi", selon Jean-Claude Juncker qui estime cependant que son exécution par les Etats membres pourrait l’être
24-03-2011


Jean-Claude Juncker a accordé au Luxemburger Wort un entretien publié le 24 mars 2011. S’il y évoque les sujets abordés la veille à l’issue d’un conseil de gouvernement marqué par la préparation du Conseil européen des 24 et 25 mars, le Premier ministre luxembourgeois et président de l’Eurogroupe fait aussi le point sur le pacte sur l’euro, l’impact de la crise économique ou encore l’introduction d’une taxe sur les transactions financières.

S’il reconnaît que certaines décisions n’ont pas été prises assez vite à son goût, le Premier ministre luxembourgeois estime cependant que la zone euro a montré au cours des derniers mois qu’elle était capable de réagir rapidement. "Au niveau de l’UE, j’ai rarement connu une période au cours de laquelle un si grand nombre de décisions ciblées ont été prises que dans les deux dernières années", relève Jean-Claude Juncker.

Quant à savoir si le Conseil européen des 24 et 25 mars est le dernier sommet de crise, comme le laissent entendre les journalistes, Jean-Claude Juncker se montre nuancé dans sa réponse. "En principe les ministres des Finances sont d’accord sur la mise en place d’une gouvernance économique, sur le pacte de stabilité, sur le mécanisme permanent de stabilité et sur les modifications à apporter à l’EFSF", indique-t-il, ce qui ne signifie pourtant pas à ses yeux que "le règlement politique de la crise est achevé". En témoigne d’ailleurs le fait que le pacte pour l’euro prévoit que les chefs d’Etat et de gouvernement s’entretiennent au moins une fois par an sur la crise et ses conséquences. "Le sujet restera d’actualité", conclut le président de la zone euro.

Pour Jean-Claude Juncker, l’UE devrait "insister sur la dimension sociale du marché intérieur"

Quant au pacte pour l’euro, il ne suffira pas de le mettre en œuvre pour coordonner les politiques économiques des Etats membres de l’avis de Jean-Claude Juncker. Il faut selon lui aussi accorder de l’attention aux domaines politiques susceptibles de renforcer la croissance, et c’est d’ailleurs pourquoi Jean-Claude Juncker a réclamé que les investissements dans les infrastructures soient pris en considération dans l’analyse de la compétitivité des Etats membres.

"L’UE aurait tout à gagner si elle insistait plus sur la dimension sociale du marché intérieur", estime Jean-Claude Juncker pour relancer son idée d’introduire un socle minimum en matière de droits des salariés, cadre dans lequel s’inscrirait aussi un salaire minimum légal dans tous les Etats membres.

Pour autant, le Premier ministre luxembourgeois ne partage pas l’avis des syndicats qui jugent le pacte pour l’euro  "antisocial". Pour Jean-Claude Juncker, "le pacte en soi n’est pas antisocial", même s’il concède que son exécution pourrait l’être dans la mesure où chaque Etat membre est laissé libre de mettre en œuvre les dispositions du pacte comme bon lui semble. Il assure cependant qu’au Luxembourg la mise en œuvre du pacte pour l’euro n’aura pas pour conséquence le début de la fin de la politique sociale. "Nous continuerons de maintenir notre mélange raisonnable d’efficience économique et de solidarité sociale", annonce le Premier ministre.

Rappelant sa position sur l’introduction d’une taxe sur les transactions financières exprimée le 18 mars dernier à Francfort, Jean-Claude Juncker précise aux journalistes du Wort qu’il est encore un peu tôt à ses yeux pour discuter de l’usage qui pourrait être fait des revenus provenant de cette taxe qui n’existe pas encore. "Il faudra encore du temps pour décider de cette taxe", prévient le Premier ministre. Mais si elle devait exister un jour, Jean-Claude Juncker imaginerait que ces ressources pourraient servir à garantir à long terme le financement de l’aide au développement, même s’il n’a rien contre l’idée d’en utiliser une partie pour la politique climatique.

"Rouvrir le paquet global n’est pas ce qu’il y a de mieux à faire pour le sommet européen", s’inquiète Jean Asselborn

C’est dans les colonnes de la Rheinische Post que s’exprime quant à lui le ministre des Affaires étrangères Jean Asselborn. Dans un entretien publié le 24 mars 2011, Jean Asselborn se montre critique vis-à-vis de l’attitude allemande à la veille du Conseil. Dans les négociations sur l’ESM, Jean Asselborn estime que la partie allemande aurait dû agir de façon "un peu moins agressive". Pour le ministre luxembourgeois, l’impression qui règne en Allemagne, selon laquelle la chancelière a donné bien plus qu’elle n’a reçu dans les négociations précédant le Conseil européen, ne correspond pas aux faits.

Pour autant le paquet global qui sera sur la table du conseil semble satisfaire Jean Asselborn qui émet l’espoir qu’il ne fera pas l’objet d’une nouvelle cible des spéculateurs. "Si toutefois il est adopté", ajoute le ministre qui s’inquiète de la volonté de la chancelière allemande de renégocier les modalités de versement de la contribution allemande au capital de base de l’ESM. "Rouvrir le paquet global n’est pas ce qu’il y a de mieux à faire pour le sommet européen", estime Jean Asselborn qui juge que "le gouvernement allemand ne devrait pas penser aux élections maintenant". "L’année 2013 va passer, mais l’Européen restera", donne pour sentence le ministre.

Jean Asselborn se montre agacé à l’égard des agences de notation qui, en abaissant la bonité d’un Etat font des victimes parmi les habitants de ce pays. "Nous devrions mettre en place aussi vite que possible une agence de notation de droit public pour l’Europe", plaide Jean Asselborn.

Pour le ministre luxembourgeois, le fait que l’EFSF et l’ESM puissent s’endetter sur le marché pour prêter de l’argent à des partenaires dans le besoin revient à avoir des obligations européennes communes. Mais Jean Asselborn entend cependant plaider aussi pour la mise en place de vraies euro-obligations dans un proche avenir. Selon lui, elles devraient servir non pas à financer la dette des Etats, mais des investissements communs dans les infrastructures. "La discussion sur les eurobonds n’est pas close", prévient à ce titre Jean Asselborn.