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Economie, finances et monnaie - Traités et Affaires institutionnelles
Les chefs d’Etat et de gouvernement de la zone euro sont parvenus à trouver un accord pour rétablir la confiance, répondre aux tensions actuelles, mais aussi "approfondir l’union économique afin qu’elle soit à la mesure de l’union monétaire"
26-10-2011


C’est au cœur de la nuit, après de longues heures de discussions, notamment avec les représentants des créanciers privés de la Grèce, que les chefs d’Etat et de gouvernement de la zone euro ont pu faire part des termes de l’accord qu’ils ont trouvé. Leur réunion, commencée le 26 octobre 2011 dans la soirée, après une rencontre informelle du Conseil européen qui avait permis de livrer "un consensus sur les mesures bancaires", s’est achevée le 27 octobre José Manuel Barroso et Herman Van Rompuy à l'issue de la conférence de presse qui a suivi la réunion des chefs d'Etat et de gouvernement de la zone euro le 26 octobre 2011 (c) Conseil de l'UE2011 au petit matin.

"Nous sommes convenus d'un vaste ensemble de mesures destinées à rétablir la confiance et à répondre aux tensions actuelles sur les marchés financiers", lancent-ils dans leur déclaration. "Ces mesures traduisent notre détermination sans faille à surmonter ensemble les difficultés actuelles et à prendre toutes les mesures nécessaires en vue d'approfondir notre union économique afin qu'elle soit à la mesure de l'union monétaire", poursuivent-ils.

Un accord devrait garantir la diminution du ratio de la dette grecque au PIB, l'objectif étant de parvenir à un taux de 120 % d'ici 2020

Un nouveau programme pluriannuel de l'UE et du FMI, qui financera jusqu'à 100 milliards d'euros, sera mis en place d'ici la fin de l'année à l'intention de la Grèce. Il sera accompagné d'un renforcement des mécanismes destinés à assurer le suivi de la mise en œuvre des réformes : la Commission, mettra en place, en coopération avec les autres partenaires de la troïka, une capacité de suivi sur le terrain, notamment avec le concours d'experts nationaux, afin de travailler en coopération étroite et continue avec le gouvernement grec et la troïka pour fournir des conseils et proposer une assistance, de manière à ce que les réformes soient mises en œuvre rapidement et complètement. Elle aidera la troïka à déterminer si les mesures que prendra le gouvernement grec sont conformes aux engagements prévus par le programme. Ce nouveau rôle sera défini dans le mémorandum d'entente.

Jean-Claude Juncker à son arrivée à Bruxelles le 26 octobre 2011 (c) Conseil de l'UELa participation du secteur privé devrait garantir la diminution du ratio de la dette grecque au PIB, l'objectif étant de parvenir à un taux de 120 % d'ici 2020. À cette fin, la Grèce, les investisseurs privés et toutes les parties concernées sont invitées à mettre en place un échange volontaire d'obligations avec une décote nominale de 50 % sur la dette nationale grecque détenue par les investisseurs privés. L'échange d'obligations devrait être mis en œuvre au début de 2012.

Les États membres de la zone euro contribueront à l'ensemble des mesures relatives à la participation du secteur privé à hauteur de 30 milliards d'euros. "Sur cette base, le secteur public est disposé à fournir un financement supplémentaire au titre du programme pour un montant allant jusqu'à 100 milliards d'euros jusqu'en 2014, y compris la recapitalisation requise des banques grecques", précise la déclaration.

Les chefs d’Etat et de gouvernement insistent une fois de plus sur le caractère unique d’une telle solution, et ils "réaffirment solennellement qu'ils sont fermement déterminés à honorer pleinement leur propre signature souveraine et tous les engagements qu'ils ont pris en matière de viabilité des finances publiques et de réformes structurelles".

Une optimisation significative des ressources de l’EFSF, sans accroissement des garanties qui le sous-tendent.

La capacité de l’EFSF renforcé sera utilisée pour optimiser les ressources disponibles, ont décidé les chefs d’Etat et de gouvernement qui précisent que "l'objectif visé est de faciliter l'accès au marché pour les États membres de la zone euro qui sont soumis à des pressions et d'assurer le bon fonctionnement du marché de la detteAngela Merkel en conversation avec Jean-Claude Juncker le 26 octobre 2011 (c) Conseil de l'UE souveraine de la zone euro, tout en conservant le crédit élevé dont jouit l’EFSF". Cet objectif sera atteint sans accroître les garanties qui sous-tendent le fonds et dans le respect des règles du traité ainsi que des dispositions et conditions de l'accord-cadre actuel, dans le cadre des instruments définis, et avec une conditionnalité et une surveillance appropriées, stipulent-ils encore.

Deux options de base sont arrêtées en vue de démultiplier les ressources de l’EFSF par un effet de levier :

  • fournir un rehaussement de crédit pour les nouvelles émissions obligataires d'États membres, ce qui permettra de réduire les coûts de financement. Les investisseurs privés se verront proposer la possibilité de souscrire cette assurance contre le risque lors de l'achat d'obligations sur le marché primaire;
  • optimiser les mécanismes de financement de l'EFSF en combinant les ressources d'investisseurs et d'institutions financières publiques et privées, ce qui pourrait être réalisé au moyen d'entités ad hoc. Ceci permettra d'accroître le montant des ressources disponibles pour octroyer des prêts, afin de permettre la recapitalisation de banques et l'achat d'obligations sur les marchés primaire et secondaire.

L’EFSF aura la latitude de recourir à ces deux options simultanément et de les déployer en fonction de l'objectif spécifique visé et de la situation sur les marchés. L'effet de levier de chacune des options variera, en fonction de leurs caractéristiques et de la situation sur les marchés, mais pourrait être de 4 ou 5, de sorte que le montant atteint devrait être de l'ordre du 1000 milliards d'euros (environ 1400 milliards de dollars).

L'Eurogroupe doit mettre au point définitivement, en novembre, les conditions de mise en œuvre de ces modalités. En outre, une coopération plus étroite avec le FMI est prévue pour renforcer encore les ressources de l’EFSF.

Renforcer la confiance dans le secteur bancaire.

Les chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE se sont entendus sur des mesures visant à rétablir la confiance dans le secteur bancaires. Elles devraient porter sur :

  • la nécessité d'assurer le financement à moyen terme des banques, afin d'éviter une raréfaction du crédit et de préserver le flux de crédit en faveur de l'économie réelle, et de coordonner les mesures à prendre à cette fin;
  • la nécessité de renforcer la qualité et la quantité des capitaux détenus par les banques pour faire face aux chocs et de faire la preuve de ce renforcement d'une manière fiable et harmonisée. La position en fonds propres des banques est donc portée à 9 % de capital de base de catégorie 1 d'ici à la fin juin 2012.

Pour ce qui est du financement de ces augmentations de capital, les banques devraient en premier lieu utiliser des sources privées de capitaux, notamment par la restructuration et la conversion de dette en instruments de capitaux. Elles devraient être soumises à des contraintes en ce qui concerne le versement de dividendes et le paiement de primes jusqu'à ce que l'objectif soit atteint. Le cas échéant, les autorités nationales devraient apporter un soutien et, dans l'hypothèse où ce soutien ne serait pas disponible, la recapitalisation devrait être financée au moyen d'un prêt de l’EFSF dans le cas des pays de la zone euro.

Un engagement sans équivoque à garantir la discipline budgétaire et à accélérer les réformes structurelles en faveur de la croissance et de l'emploi.

"Tous les États membres de la zone euro sont fermement déterminés à poursuivre leur politique d'assainissement budgétaire et leurs réformes structurelles", stipule la déclaration des chefs d’Etat et de gouvernement qui réaffirment être "pleinement résolus à mettre en œuvre les recommandations par pays formulées dans le cadre du premier semestre européen et à orienter les dépenses publiques vers les secteurs de croissance".

L'Espagne déploie actuellement des efforts particuliers. Si ces efforts sont salués dans la déclaration des chefs d’Etat et de gouvernement, ces derniers insistent sur la nécessité de mesures supplémentaires, notamment pour "approfondir les modifications apportées au marché du travail en vue d'accroître la flexibilité au niveau des entreprises et renforcer l'employabilité de la main-d'œuvre, tout en menant d'autres réformes destinées à renforcer la compétitivité, et notamment amplifier les réformes dans le secteur des services".

L'Italie a pris de nouveaux engagements sur des réformes structurelles dont les chefs d’Etat et de gouvernement se félicitent, tout en invitant ce pays "à présenter d'urgence un calendrier ambitieux pour ces réformes". L'Italie s’est engagée à atteindre l'équilibre budgétaire d'ici 2013 et à dégager un excédent budgétaire structurel en 2014, ce qui lui permettra de ramener la dette publique brute à 113 % du PIB en 2014. Elle a aussi fait part de son projet d'introduire une règle relative à l'équilibre budgétaire dans la constitution d'ici la mi-2012.

D’après la déclaration, l'Italie va maintenant mettre en œuvre les réformes structurelles proposées afin d'accroître la compétitivité en réduisant l'excès de formalités administratives, en abolissant les tarifs minimaux dans les services professionnels et en poursuivant la libéralisation des services publics et des services d'intérêt général au niveau local. Par ailleurs, l’Italie s’est dite déterminée à réformer le droit du travail et en particulier les règles et les procédures en matière de licenciement et à réexaminer avant la fin de 2011 le système d'allocations chômage qui est actuellement morcelé, en tenant compte des contraintes budgétaires. Elle a aussi pour projet de porter l'âge de la retraite à 67 ans d'ici 2026 et les chefs d’Etat et de gouvernement l’invitent à définir d’ici la fin de l’année le processus qui permettra d'atteindre cet objectif. L’Italie a par ailleurs l'intention de réexaminer les programmes relevant des fonds structurels en redéfinissant l'ordre de priorité des projets et en privilégiant l'éducation, l'emploi, la stratégie numérique et les chemins de fer/les réseaux, l'objectif étant de créer des conditions plus propices pour renforcer la croissance et s'attaquer à la fracture régionale.

Quant au Portugal et à l'Irlande, les chefs d’Etat et de gouvernement réaffirment leur détermination à les soutenir tant qu’ils poursuivent leurs programmes de réformes.

Un renforcement important de la coordination et de la surveillance en matière économique et budgétaire.

La déclaration mentionne, pour ce qui est du renforcement de la coordination et de la surveillance en matière économique, un ensemble de mesures très précises, allant au-delà du paquet sur la gouvernance économique qui vient d’être adopté.

A titre d’exemple, chacun des chefs d’Etat et de gouvernement s’engage ainsi à :

  • adopter des règles relatives à l'équilibre structurel des finances publiques traduisant dans la législation nationale, de préférence au niveau constitutionnel ou à un niveau équivalent, les règles du pacte de stabilité et de croissance, et ce avant la fin de 2012;
  • renforcer les cadres budgétaires nationaux au-delà de ce que prévoit la directive sur les exigences applicables aux cadres budgétaires des États membres. En particulier, les budgets nationaux devraient être fondés sur des prévisions de croissance indépendantes;
  • inviter les parlements nationaux à tenir compte des recommandations adoptées au niveau de l'UE sur la conduite des politiques économiques et budgétaires;
  • consulter la Commission et les autres États membres de la zone euro avant l'adoption de tout programme important de réforme de la politique budgétaire ou économique susceptible d'avoir des effets sur les partenaires, afin de permettre une évaluation des éventuelles conséquences sur la zone euro dans son ensemble;
  • suivre strictement les recommandations de la Commission et du commissaire compétent en ce qui concerne la mise en œuvre du pacte de stabilité et de croissance.

Il est par ailleurs prévu, pour les États membres de la zone euro faisant l'objet d'une procédure pour déficit excessif, que la Commission et le Conseil auront la possibilité d'examiner les projets de budgets nationaux et de rendre un avis sur ces projets avant leur adoption par le parlement national concerné. En outre, la Commission assurera le suivi de l'exécution du budget et, si nécessaire, proposera des modifications en cours d'exercice. De plus, en cas de dérapage d'un programme d'ajustement, une coordination et un suivi plus étroits de la mise en œuvre du programme seront assurés.

Dans l’attente de la proposition relative à un suivi plus étroit que la Commission présentera prochainement, les chefs d’Etat et de gouvernement saluent l'intention de la Commission de renforcer, en son sein, le rôle du commissaire compétent en vue d'assurer un suivi plus étroit et de mieux faire respecter les règles.

Dix mesures destinées à améliorer la gouvernance de la zone euro.

"Afin de relever plus efficacement les défis actuels et d'assurer une intégration plus étroite, la structure de gouvernance de la zone euro sera renforcée, tout en préservant l'intégrité de l'Union européenne dans son ensemble", indique la déclaration, dix mesures étant détaillées dans une annexe :

  1. Des sommets de la zone euro réunissant les chefs d'État ou de gouvernement de la zone euro ainsi que le président de la Commission seront organisés au moins deux fois par an, aux moments clés du cycle annuel de gouvernance économique; ils auront lieu après les réunions du Conseil européen, dans la mesure du possible. Les sommets de la zone euro permettront de définir des orientations stratégiques concernant la conduite des politiques économiques, l'amélioration de la compétitivité et le renforcement de la convergence au sein de la zone euro.
  2. Le président du sommet de la zone euro sera désigné par les chefs d'État ou de gouvernement de la zone euro lors de l'élection du président du Conseil européen et pour un mandat de durée identique. Dans l'attente de cette élection, les sommets de la zone euro seront présidés par l'actuel président du Conseil européen.
  3. Le président du sommet de la zone euro tiendra les États membres ne faisant pas partie de la zone euro étroitement informés de la préparation des sommets ainsi que de leurs résultats. Il informera également le Parlement européen de ces résultats.
  4. Comme il le fait déjà, l'Eurogroupe assurera une coordination sans cesse plus étroite des politiques économiques et favorisera la stabilité financière. L'Eurogroupe préparera les réunions du sommet de la zone euro et en assurera le suivi.
  5. Le président de l'Eurogroupe est élu conformément au protocole n° 14 annexé aux traités. La décision sur la question de savoir s'il devrait être élu par les membres de l'Eurogroupe en leur sein ou être un président à temps plein basé à Bruxelles sera prise à l'expiration du mandat de l'actuel président de l'Eurogroupe. Le président du sommet de la zone euro sera consulté sur le programme de travail de l'Eurogroupe et il pourra inviter le président de l'Eurogroupe à convoquer une réunion de ce dernier, notamment afin de préparer un sommet de la zone euro ou d'assurer le suivi de ses orientations. Les responsabilités et les modalités d'information entre le sommet de la zone euro, l'Eurogroupe et les instances préparatoires seront clairement délimitées.
  6. Le président du sommet de la zone euro, le président de la Commission et le président de l'Eurogroupe se réuniront à intervalles réguliers et au moins une fois par mois.
  7. Le groupe de travail Eurogroupe continuera à assurer les travaux préparatoires, en faisant appel aux compétences techniques de la Commission.
  8. La présidence du groupe de travail Eurogroupe sera assurée par un président permanent basé à Bruxelles, qui sera en principe élu en même temps que le président du Comité économique et financier (CEF).
  9. Les structures administratives existantes (c'est-à-dire le Secrétariat général du Conseil et le secrétariat du CEF) seront renforcées et coordonneront efficacement leur action afin de fournir un soutien adéquat au président du sommet de la zone euro et au président de l'Eurogroupe.
  10. Des règles et mécanismes clairs seront établis afin d'améliorer la communication et de garantir une plus grande cohérence dans les messages. Le président du sommet de la zone euro et le président de l'Eurogroupe exerceront une responsabilité particulière à cet égard. Le président du sommet de la zone euro, conjointement avec le président de la Commission, sera chargé de communiquer les décisions du sommet de la zone euro et le président de l'Eurogroupe, conjointement avec le commissaire chargé des affaires économiques et monétaires, sera chargé de communiquer les décisions de l'Eurogroupe.

Mandat est donné au président du Conseil européen pour définir des mesures visant à renforcer l'union économique, y compris en envisageant la possibilité d'apporter des modifications limitées au traité.

Les chefs d’Etat et de gouvernement demandent enfin au président du Conseil européen de définir, en étroite coopération avec le président de la Commission et le président de l'Eurogroupe, les mesures qui pourraient être prises pour que "l’union économique soit à la mesure de l’union monétaire".

L'accent sera mis sur la poursuite du renforcement de la convergence économique au sein de la zone euro, l'amélioration de la discipline budgétaire et l'approfondissement de l'union économique, notamment en envisageant la possibilité d'apporter des modifications limitées au traité. Un rapport intermédiaire sera présenté en décembre 2011 afin qu'un accord puisse intervenir sur de premières orientations. Il comportera une feuille de route sur la manière de procéder, dans le respect total des prérogatives des institutions. Un rapport sur les modalités de mise en œuvre  des mesures arrêtées sera mis au point d'ici le mois de mars 2012.