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Droits fondamentaux, lutte contre la discrimination
Dans sa réponse à une consultation publique lancée par la Commission sur les femmes dans les conseils d’administration des entreprises, l’UEL rejette l’idée d’objectifs chiffrés, de sanctions et de quotas
29-05-2012


Le 5 mars 2012, la Commission européenne publiait un rapport montrant les timides progrès réalisés en ce qui concerne l’augmentation du nombre de femmes dans les conseils d’administration des entreprises. Elle lançait par la même occasion une consultation publique visant à déterminer les mesures envisageables, y compris législatives, pour corriger le déséquilibre entre hommes et femmes qui caractérise les conseils d’administration des entreprises.Union des Entreprises luxembourgeoises

La consultation se terminait le 28 mai 2012, et quelques jours avant cette date, l’Union des entreprises luxembourgeoises (UEL) a répondu aux questions posées par la Commission. L’UEL affiche une position on ne peut plus claire : si l’UEL soutient l’idée de renforcer le rôle des femmes dans les fonctions décisionnelles des entreprises, elle estime qu’il convient de privilégier une approche par voie de sensibilisation et de créer un environnement propice pour les femmes à prendre en charge ce type de responsabilités, en promouvant notamment un changement de mentalité. L’UEL s’oppose ainsi fermement à toute instauration de quotas, d’objectifs chiffrés ou de sanctions.

Quelle est l’efficacité de l’autorégulation par les professionnels pour traiter le problème du déséquilibre des genres dans les conseils d’administration dans l’UE ? A cette première question de la Commission, la réponse de l’UEL est limpide : c’est bien "la voie à privilégier".  "Elle témoigne en effet à la fois d’une prise de conscience des inégalités existantes à ce niveau et d’une volonté de remédier à cet état des choses par les acteurs directement concernés", poursuit l’UEL qui observe que les milieux économiques en Europe et au Luxembourg s’engagent "dans cette voie de manière remarquable". L’Union des entreprises luxembourgeoises cite pour exemple "le succès croissant des Chartes de la Diversité qui incluent, le cas échéant implicitement, un volet mixité signées par les entreprises et les diverses conférences proposées par les organisations de professionnels à ce sujet". "Une fois les entreprises sensibilisées, il leur appartient ensuite de se doter elles-mêmes, le cas échéant, d’objectifs chiffrés en prenant notamment en compte leur propre culture d’entreprise, les contraintes sectorielles et le degré de féminisation du secteur", plaide encore l’UEL.

"Il n’y a pas lieu d’agir par voie contraignante en imposant par exemple des quotas", ajoute encore, un peu plus loin dans le questionnaire, l’UEL. Du point de vue des entreprises luxembourgeoises, "avec l’introduction de quotas, un certain nombre de femmes seraient placées dans les conseils d’administration simplement parce qu’elles sont du `sexe protégé´, sans égard pour leurs compétences". Un phénomène qui serait facilité, craint l’UEL, par "la possibilité de cumuler des mandats, utile en temps normal". "Cette position de femmes de paille ne serait pas valorisante pour la gente féminine qui se verrait instrumentalisée afin de remplir les exigences communautaires contraignantes à charge des entreprises", s’inquiète l’UEL.

L’UEL insiste aussi sur le fait qu’un certain nombre d’entreprises sont des entreprises familiales dont il "convient de respecter le fonctionnement sans interférer dans ce projet familial transmis parfois de génération en génération". Pour les grandes entreprises, argue l’UEL, "il faut garder à l’esprit que les administrateurs sont nommés par les actionnaires et que l’entreprise n’a en pratique que peu voire pas du tout d’influence sur ce choix, d’autant que cet actionnariat, parfois situé à l’étranger, est souvent difficile à identifier". L’UEL souligne aussi que dans des secteurs comme la construction ou la fabrication automobiles, les femmes sont peu présentes. Aussi, "imposer un quota dans ce contexte serait également artificiel".

Enfin, argue l’UEL, "interférer dans le mode traditionnel de nomination des administrateurs et gérants d’entreprises, basé sur la confiance, rendra le modèle sociétal européen atypique et certainement moins attractif au niveau mondial pour les milieux économiques et, en particulier pour les investisseurs".

L’UEL appelle donc à agir "plus en amont" en promouvant "la place des femmes dans le monde du travail en général, les femmes étant encore trop souvent victimes de préjugés ancestraux sur leur rôle dans la société et de leur propre retenue en termes de revendication au niveau professionnel". Il convient donc, propose l’UEL, de choisir une approche "bottom-up afin de légitimer la nomination de femmes comme administrateurs de société sur la base du mérite et de la compétence et non pour la seule raison qu’elles sont des femmes". En parallèle, explique l’UEL, il est essentiel de créer un environnement propice pour leur permettre de prendre pleinement leur place au sein des entreprises en créant davantage de structures pour accueillir les enfants et en incitant les pères à s’impliquer davantage dans leur éducation.

La Commission demande dans sa consultation quel objectif chiffré devrait être déterminé pour la participation du genre sous-représenté dans les conseils d’administration des entreprises. Pour l’UEL, aucun objectif chiffré ne devrait être fixé. Par ailleurs, l’UEL rejette toute idée de sanctions envers les entreprises qui ne rempliraient pas les objectifs fixés. Car si l’UEL reconnaît que les entreprises endossent une part de responsabilité, "elles ne sont pas coupables de la faible participation des femmes aux organes de décision, d’autant que leur marge de manœuvre à cet égard est plus limitée que d’aucuns ne voudraient le faire croire".

Pour ce qui est de savoir si la présence de femmes dans un conseil d’administration apporterait des avantages économiques, l’UEL avoue ne pas être "en mesure de chiffrer les bénéfices pour les entreprises ou même pour la société en général d’une participation accrue des femmes dans les conseils d’administration". Et elle prévient qu’elle n’entend pas "se lancer dans un tel exercice" dans la mesure où la question est, affirme-t-elle, "biaisée" : "seule une réponse positive ou neutre serait tolérable", explique en effet l’UEL.