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Economie, finances et monnaie - Emploi et politique sociale
Pour le syndicat OGBL, l’Etat luxembourgeois devrait être bien plus actif dans la lutte contre le chômage des jeunes et la relance de l’économie
21-05-2013


Jean-Claude Reding et André RoeltgenLe Conseil national de l’OGBL du 21 mai 2013 a consacré une grande partie de ses travaux à des sujets européens. Il a notamment scruté dans le détail la 14e actualisation du Pacte de stabilité et de croissance et le Programme national de réforme adoptés par le gouvernement luxembourgeois fin avril 2013.

Face à la presse, le président de l’OGBL, Jean-Claude Reding, a tenu à rappeler le contexte de récession et d’austérité dans lequel ces deux documents ont été réalisés. Jean-Claude Reding aura à plusieurs reprises formulé le regret, que cet environnement, bien que déterminant, n’ait pas été davantage discuté dans les débats sur la compétitivité et la politique économique, récemment menés à la Chambre des députés. Le blocage des investissements productifs et le pouvoir d’achat en berne sont pourtant aussi responsables de la hausse du chômage, a-t-il ainsi rappelé. Jean-Claude Reding a également cité comme cause amplificatrice de la morosité économique "un euro beaucoup trop fort" vis-à-vis du yen et du dollar notamment, ce "qui aggrave le problème pour une partie de l’économie en Europe".

Certes, le syndicaliste  voit qu’un débat sur la pertinence des politiques d’austérité a enfin éclos et même atteint la Commission européenne. Néanmoins, "nous n’avons pas encore vu de décision pour en changer", dit le syndicaliste. L’OGBL accueille par ailleurs avec enthousiasme, la récente annonce du candidat social-démocrate à la chancellerie allemande, Peer Steinbrück, de sa volonté de défendre un plan Marshall pour l’Europe tel qu’il a été avancé par le DGB. S’il venait à être élu, il resterait toutefois des obstacles à la réalisation de ce programme, pense Jean-Claude Reding, en évoquant les positions du Premier ministre britannique, David Cameron, qui vont "dans une tout autre direction", et son "chantage" sur le maintien ou pas du Royaume-Uni dans l’UE. Ce chantage pourrait d’ailleurs également servir de prétexte our d’autres gouvernements afin d’empêcher un tel plan de relance.

Dans ce contexte, Jean-Claude Reding a évoqué le besoin d’une réforme de l’Union européenne vers une démocratisation plus poussée, via le renforcement du pouvoir Parlement européen, notamment en rendant la Commission européenne responsable devant lui, et un budget européen plus important pour être en mesure de financer davantage de programmes de développement.

Jean-Claude Reding évoque également la nécessité d’ouvrir la discussion sur la politique menée par la BCE, qui continue d’agir à contre-courant de ce que font les banques centrales japonaise et américaine. Cela est d’autant plus utile en vue du Conseil européen de la fin du mois de juin qui portera principalement sur la gouvernance économique. En amont, le 7 juin 2013, l’OGBL, le LCGB, en compagnie de la présidente de la Confédération européenne des syndicats (CES), Bernadette Ségol, s’entretiendront d’ailleurs avec Jean-Claude Juncker et Jean Asselborn, pour faire entendre les revendications de la Confédération européenne des syndicats.

S’attardant plus précisément sur l’actualisation  du PNR et du PSC luxembourgeois, Jean-Claude Reding s’étonne d’abord de l’optimisme des prévisions économiques sur lesquelles s’appuie le PSC. Considérer qu’en 2015 la crise sera dépassée relève à ses yeux d’un "espoir très audacieux".

Cette année sera par ailleurs celle aussi de la perte de revenus liés au changement de régime de la TVA sur l’e-commerce, ce qui constitue "certainement un problème", que l’OGBL a évoqué déjà depuis trois ans. Le gouvernement avance "sans se découvrir" en disant que 400 des 700 millions d’euros seront compensés dans le cadre d’une réforme de l’impôt. Faisant remarquer qu’il manque encore 300 millions d’euros, l’OGBL prend au mot le gouvernement et estime ainsi que la conséquence de la disparition de ces recettes doit être un grand débat sur une réforme fiscale qui devrait être un "sujet principal discuté dans les détails et non de manière générale" lors de la campagne électorale pour les élections législatives de 2014. Le sujet occupera en tout cas de manière plus certaine la plus grande part des travaux syndicaux de l’OGBL, guidés par le souci de justice fiscale, notamment entre grandes et petites et moyennes entreprises du secteur privé.

Jean-Claude Reding constate que le PSC manque d’informations sur ce qui se fera en 2013, tandis qu’il est carrément muet sur 2014 en raison de l’échéance électorale qui attend le pays.

L’OGBL regrette par ailleurs les coupes annoncées dans la politique de l’emploi, pour ce qui est de l’aide au réemploi et la préretraite solidarité. Au lieu de sacrifier l’aide au réemploi, il faudrait rendre les conditions d’usage plus strictes et combattre les abus de certains patrons, plutôt que de justifier par ces derniers l’abolition d’un tel instrument. L’abolition de la préretraite solidarité est jugé contraire à aux besoins de l’époque temps, placé sous le signe de la lutte contre le chômage des jeunes. Cet instrument doit justement "aider les jeunes à arriver plus vite sur le marché du travail". "Ce n’est pas mauvais tant que nous avons un tel chômage. Je ne vois pas pourquoi on devrait abolir ce genre d’instruments", a déclaré Jean-Claude Reding.

L’OGBL remarque aussi que l’actualisation du PSC parle aussi de pensions, en mentionnant la possibilité d’abandonner l’ajustement et l’allocation de fin d’années au cas où la réforme adoptée fin 2012 n’était pas suffisante. Ce faisant, il ne mentionne pas de mécanisme alternatif tel qu’une éventuelle hausse des cotisations, ce qui fait penser à Jean-Claude Reding que cette option est en train de devenir "un thème tabou". "L’approche n’est pas juste. Il faut parler d’alternatives", estime-t-il en tout cas.

Jean-Claude Reding relativise d’ailleurs le problème que représenterait la dette luxembourgeoise, en mettant en regard la part du PIB (égale à 23,8 %) qu’elle représente, avec celle, autrement plus réjouissante et égale à 37,5 % du PIB, constituée par les réserves financières du système de pensions ( 27,5 % du PIB) et les participations de l’Etat dans les entreprises publiques et semi publiques (10 %).

A ce dernier sujet, l’OGBL souhaite que la discussion, "ouverte légèrement" par le ministre Etienne Schneider, sur le rôle de l’Etat soit "approfondie". Le syndicat est d’avis que l’Etat doit prendre ses responsabilités dans la situation actuelle. "Il doit être sur le devant de la scène, être un acteur actif de l’économie. Il ne faut en aucun cas se retirer." L’OGBL refuse ainsi que "pour des raisons cosmétiques" liées à la dette, l’on cède, comme envisagé lors de la déclaration sur l’Etat de la nation, la participation étatique dans la  BGL, laquelle a le double avantage de rapporter plus qu’elle ne coûte et de permettre à l’Etat d’exercer son influence sur l’économie locale. L’OGBL suggère d’ailleurs que la question puisse être tranchée au sein du Conseil économique et social.

Abordant ensuite le PNR dans la mesure où il est une "réponse aux critiques émises par le Conseil sous forme de recommandations", Jean-Claude Reding estime que le gouvernement luxembourgeois et Bruxelles, qui veut encore davantage de réformes, "vont trop loin".

Sur l’indexation des salaires, le gouvernement met en avant les modulations du système qu’il a obtenue jusqu’en 2014. L’OGBL constate que les esprits se sont apaisés sur ce sujet délicat. Néanmoins, le syndicat prévient qu’il reste vigilant et qu’il est en train de confectionner un document présentant à ses membres actifs, l’argumentaire en faveur de l’indexation.

Concernant la lutte contre le chômage des jeunes, troisième point évoqué par la Commission européenne, l’OGB-L pense que le gouvernement n’est pas assez actif. Les modifications des Contrats d’Appui-Emploi (CAE) et  d’Initiation à l’Emploi (CIE) survenues en février 2013, mentionnées dans le PNR, ne sont pas du genre à permettre une véritable lutte. L’Etat, les communes et les entreprises publiques seraient autrement plus efficaces s’ils assumaient la mission d’embaucher notamment les jeunes les moins qualifiés "de manière durable".  Le plan de lutte présenté par ailleurs par le gouvernement contient, selon Jean-Claude Reding,  beaucoup de promesses, même si elles ne sont pas immensément concrètes. Il y a quelques choses positives et pas de dégradation de la situation, ce qui permet à l’OGBL de l’approuver. Néanmoins, pour ce qui est de l’encadrement des stages et la transition entre le cursus scolaire et la vie professionnelle,  le syndicat est curieux de voir comment les choses seront appliquées sur le terrain.

L'OGB-L déplore que le gouvernement mette en avant sa réforme en cours de la formation professionnelle alors qu'elle serait selon lui en train de générer encore plus d’échecs. "Il ne faut pas envoyer à Bruxelles une réforme qui ne fonctionne pas", a-t-il estimé. De même, Jean-Claude Reding a mentionné les problèmes de "l’égalité des chances" insuffisante à l'école et de la sélection bien trop précoce qui s'y opère.

A noter par ailleurs, que l’OGBL a durant son Conseil national, discuté du Cadre européen sur le stress au travail, de telle sorte qu’il sera en mesure de transmettre pendant l’été au patronat ses propositions pour le transposer au Luxembourg.