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Economie, finances et monnaie - Emploi et politique sociale
Les trois pays du Benelux vont coordonner la lutte contre le dumping social en anticipant la mise en œuvre de la directive "détachement" révisée et accorder leurs positions sur les "arrangements contractuels"
12-12-2013


benelux-di-rupo-bettel-rutte-131212-senningen-sipDans le cadre de la Présidence luxembourgeoise du Benelux, le Premier ministre Xavier Bettel a reçu ses homologues belge et néerlandais, Elio Di Rupo et Mark Rutte, pour un sommet Benelux le 12 décembre 2013 au château de Senningen à Luxembourg.

Les entretiens ont porté sur la situation politique et économique des trois pays ainsi que sur les grands dossiers de l’actualité politique européenne et internationale. Les trois Premiers ministres ont également préparé la prochaine réunion du Conseil européen des 19 et 20 décembre 2013 à Bruxelles.

Pour le nouveau Premier ministre luxembourgeois, c’était la première rencontre avec des homologues, et lui-même a dit être "particulièrement heureux que cette première rencontre ait pu se faire avec les collègues du Benelux".

A l’issue de la réunion, les trois chefs de gouvernement ont donné une conférence de presse.

En ce qui concerne le volet européen, le Premier ministre Bettel a déclaré que "la semaine prochaine (celle où se tiendra le Conseil européen, ndlr) sera difficile", et c’est pourquoi il a tenu à expliquer à ses collègues "pourquoi le Luxembourg ira dans une certaine direction et pas dans une autre", sous-entendu sur la question de l’échange automatique d’informations entre administrations fiscales. Il a aussi été question en vue du Conseil européen lors de cette rencontre Benelux d’union bancaire, de défense et de questions sociales.

Les pays du Benelux vont anticiper la mise en œuvre de la directive révisée sur le détachement des travailleurs et coordonner leurs mesures contre le dumping social 

C’est Elio di Rupo qui a abordé la question du dumping social. Il a mis en avant comment les Pays-Bas, la Belgique et le Luxembourg "ont beaucoup travaillé pour mettre un terme au dumping social que constitue le détachement des travailleurs." Pour lui et ses collègues, "la directive actuelle a permis, au fil des années, des abus avec des détachements de personnels qui n’avaient pas ou peu de sécurité sociale, et ce ni dans le pays d’origine ni dans le pays du détachement, ce qui constitue une concurrence déloyale en Belgique où l’on assiste à des faillites dans la construction et une élévation du taux de chômage alors que des dizaines de milliers de travailleurs détachés arrivent."

Pour Elio Di Rupo, le projet de directive révisée sur le détachement des travailleurs approuvé lors du Conseil EPSCO du 9 décembre 2013 "contient des éléments positifs qui devraient permettre à tout Etat membre de prendre des mesures contre le dumping social et de revenir à une situation plus saine". Le Premier ministre belge a cité le cas d’ouvriers détachés dans son pays et qui travaillaient pour 2,06 euro l’heure. Pour lui, il ne s’agit pas d’aller contre ces travailleurs, mais d’agir en sorte que le détachement se passe dans des conditions dignes pour ces travailleurs et les systèmes de sécurité sociale des pays d’accueil.

Pour aller de l’avant, les trois pays du Benelux ont donc décidé de tenir, le 13 février 2013 à Bruxelles à l’ambassade des Pays-Bas qui détiendra à ce moment la présidence, un sommet qui réunira les Premiers ministres et les ministres des Affaires sociales et de l’Emploi des trois pays. Il s’agira, comme l’a expliqué Elio Di Rupo, de "mettre en œuvre de manière anticipée le projet de directive et les mesures anti-dumping social dans le respect de la libre circulation des travailleurs, de voir comment coordonner nos actions de contrôle qui permettront de mettre fin au dumping social".

Les "arrangements contractuels" posent problème

Un autre sujet ont été les arrangements contractuels. Les arrangements contractuels font partie d’un paquet de mesures que la Commission européenne a proposé le 20 mars 2013 qui sont liées aux prochaines étapes du projet de réalisation "d’une union économique et monétaire (UEM) véritable et approfondie". Il y avait d’abord une communication relative à une coordination préalable des projets de grandes réformes des politiques économiques qui présentait des options pour l’organisation de concertations à l’échelon européen avant toute décision prise au plan national concernant de grandes réformes économiques. Il s’agissait de voir comment les retombées éventuelles de ces réformes sur d’autres pays de la zone euro, positives ou négatives, peuvent être bien prises en compte à un stade précoce dans le processus de décision. Il y avait une deuxième communication qui traitait de l’instrument de convergence et de compétitivité (ICC). Celle-ci envisage d’une part la conclusion d’arrangements contractuels par lesquels les États membres devraient selon la Commission s’engager à entreprendre certaines réformes et prévoit d’autre part un soutien financier pour les aider à les mettre en œuvre.

Les trois du Benelux, a expliqué Elio Di Rupo, veulent savoir comment cette proposition s’articule avec les autres éléments et mécanismes du semestre européen, le six-pack, le two-pack, le TSCG, etc., et comment elle va être concrètement appliquée, par exemple pour ce qui est des soutiens financiers prévus et de leur financement. Les trois veulent que la discussion soit prolongée jusqu’en octobre 2014 afin que l’on sache mieux comment procéder.

La polémique autour de l’échange automatique d’informations

Lors du jeu des questions et des réponses, des journalistes ont voulu savoir comment Mark Rutte et Elio Di Rupo réagissaient aux attaques contre le Luxembourg dans le cadre de la discussion sur l’extension du champ d’application de la directive sur la fiscalité de l’épargne et l’harmonisation fiscale, notamment de la TVA.

Mark Rutte a expliqué que le débat était lié aux conclusions du Conseil européen de mai 2013 qui demandaient l’introduction de l’échange automatique d’informations. Mais cette demande ne concernait pas seulement l’Autriche et le Luxembourg, mais aussi cinq pays tiers européens (Suisse, Liechtenstein, Andorre, Monaco et Saint-Marin) afin qu’un "level playing field" soit établi. Partant de là, Mark Rutte a dit comprendre la position actuelle du Luxembourg et de son Premier ministre Bettel "qui ne veut pas que ce processus soit accéléré avant qu’il n’y ait de la clarté sur cette question". Quant à l’harmonisation fiscale au niveau européen, et notamment du taux de la TVA, Mark Rutte pense que les Etats membres "devraient pouvoir disposer d’une marge de manœuvre" dans ce domaine. Elio Di Rupo s’est par contre ici exprimé plus en faveur d’une harmonisation fiscale, mais aussi sociale.  

Xavier Bettel a quant à lui expliqué que "les critiques des derniers jours font mal qui veulent faire croire que l’Autriche et le Luxembourg veulent seulement protéger les fraudeurs". "Cela n’est pas vrai !", a protesté le Premier ministre qui a évoqué les engagements pris par le Luxembourg pour le 1er janvier 2015 et ceux pris au niveau du Conseil européen afin d’inclure ces pays tiers dans l’échange automatique d’informations. Il a jugé que la négociation avec ces pays "doit aller jusqu’au bout" et aussi insisté sur le fait que le Luxembourg ne cherchait pas à gagner du temps, mais qu’il voulait avant tout des règles claires.