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Economie, finances et monnaie
Eurogroupe et Conseil ECOFIN – La Grèce continue de poser problème, le Luxembourg doit refuser son accord à la directive révisée sur la fiscalité de l’épargne et le Conseil vise un accord sur la résolution bancaire avant le Conseil européen
10-12-2013


La réunion de l’Eurogroupe du 9 décembre 2013 a été, de l’aveu même de son président, Jeroen Dijsselbloem, le ministre néerlandais des Finances, une réunion assez courte. Elle s’est penchée sur les pays à programmes, dont la Grèce, Chypre et l'Irlande.

Dans sa déclaration sur la Grèce,  Jeroen Dijsselbloem a reconnu que depuis la dernière réunion de l’Eurogroupe, "les autorités grecques ont travaillé de manière constructive avec la Troïka, même si de nouveaux progrès sont encore nécessaires pour atteindre les objectifs fixés lors du dernier examen et en ce qui concerne les mesures budgétaires et structurelles pour l’actuel quatrième examen avant que nous puissions arriver à une conclusion positive", en d’autres mots être "en position de s'accorder sur le versement d'un milliard d'euros d'ici à la fin de l'année". Jeroen Dijsselbloem a confirmé que la Troïka retournerait à Athènes le 10 décembre 2013, mais, selon lui, "ce sera, pour être réaliste, très dur, sinon impossible, de finaliser l’examen avant la fin de l’année, de sorte que les travaux seront achevés en janvier", entre autres lors d’une réunion de l’Eurogroupe. Le président de l’Eurogroupe s'est dit conscient des "tensions sociales dans la société" grecque, qui rendent "de plus en plus difficile la mise en œuvre de mesures", notamment fiscales. Il a également souligné que le pays avait "fait de grands progrès en matière budgétaire en 2013", avec "un budget complètement sur les rails". Mais de l’autre côté, il a estimé que tout n’avait pas encore été fait.

Les problèmes sont multiples : le désaccord sur le montant du trou budgétaire pour 2014 et les mesures pour y faire face, l'avenir de l'entreprise publique d'armement déficitaire EAS, le sort du moratoire sur les saisies immobilières qui signifierait l’expulsion de milliers et de milliers de personnes de leurs logements, un changement dans les règles de licenciement collectif et la poursuite du plan de restructuration de la fonction publique, qui signifient de fait des milliers et des milliers de licenciements.

L'Eurogroupe de lundi a salué la conclusion de la mission sur le second programme d'ajustement de Chypre. Ce programme est "sur les rails", "les objectifs budgétaires ont été atteints avec des marges confortables et des progrès significatifs ont été faits vers une recapitalisation et une restructuration du secteur financier, ce qui permettra un nouvel assouplissement du contrôle des capitaux". De même, la stratégie de privatisation du gouvernement chypriote a été louée. La fin de l’examen en cours débouchera sur le déboursement de 100 millions d’euros par le MES et de 86 millions d’euros par le FMI.

Quant à l’Irlande, dont la sortie des programmes d’aides avait été annoncée en novembre, elle saura, selon les attentes de l’Eurogroupe, "marcher de ses propres jambes grâce au bon travail effectué pendant la durée du programme d’aide". L’Irlande, dont les efforts ont été salués par les marchés, se verra encore verser 800 millions d’euros de la part du MES et 600 millions d’euros par le FMI.

Le Luxembourg confirme, lors du Conseil ECOFIN, sa position en matière d'échange automatique d'informations et énonce de nouveau ses conditions

Lors de la réunion Ecofin du 10 décembre 2013, la révision de la directive fiscalité de l'épargne était à nouveau à l'ordre du jour. La présidence avait appelé les Etats membres à l’approuver comme l’avaient demandé les chefs d’Etat et de gouvernement. L’unanimité est requise sur ce dossier. Le Luxembourg et l’Autriche se sont de nouveau opposés à une approbation de la directive. 

gramegna-saccomanni-ecofin-131210Par voie de communiqué, le nouveau ministre des Finances luxembourgeois, Pierre Gramegna, a "confirmé l'engagement du Luxembourg à avancer en matière d'échange automatique d'informations" et a mis en exergue "les actions illustrant la détermination du Luxembourg".  Il évoque "l'application, à partir de 2015, de l’échange automatique d'informations pour les paiements d'intérêts au sein de l’UE", la "signature, le 3 décembre 2013, de la déclaration initiée par le pays du G5 soutenant le développement au sein de l'OCDE de l’échange automatique d’informations entre les autorités fiscales comme standard global unique", et finalement "le dépôt d'un projet de loi autorisant la ratification avant la fin de l'année de la convention OCDE sur l'assistance administrative mutuelle en matière fiscale".

Abordant l'extension du champ de la directive sur la fiscalité de l'épargne, le ministre "regrette que les travaux avec les pays tiers n’aient pas encore produit un résultat qui suffirait aux circonstances définies par le Conseil européen pour l’adoption de la directive révisée".
Finalement, le ministre insiste aussi "sur l’importance d'avancer dans ces négociations pour assurer que le même standard soit appliqué par toutes les grandes places financières (level playing field) afin d’éviter une fuite de capitaux hors de l’UE et de préserver la capacité de l’UE d'investir pour relancer l'économie et la croissance". Une avancée sur le dossier devra également "être en ligne avec celle de l'OCDE, visant la création et l'application d'un standard international "

Cette position a déclenché, selon l’agence AFP, l’irritation "de plusieurs ministres européens des Finances". L’agence de presse cite le ministre espagnol, Luis de Guindos, son collègue italien, Fabrizio Saccomanni et le ministre français, Pierre Moscovici, ce dernier, estimant "indispensable de faire remonter le dossier aux chefs d'Etat et de gouvernement" lors du Conseil européen des 19 et 20 décembre 2013. La DPA cite également le commissaire européen Algirdas Semetas, en charge du dossier, qui a exprimé sa déception et son incompréhension pour la situation.    

Après quelques progrès, un accord sur la résolution bancaire dans l’UE pourrait être trouvé le 18 décembre 2013

Le Conseil ECOFIN a également essayé de trouver un accord nouveau sur un mandat du Conseil en vue des négociations interinstitutionnelles sur les propositions de directive 'BRRD' visant à harmoniser les régimes nationaux de restructuration et de résolution bancaires et de directive 'DGS' visant à réviser les régimes nationaux de garantie des dépôts.

Les ministres des Finances de l'Union européenne ont réussi, lors d’une très longue réunion, à avancer sur le volet "résolution" de l'Union bancaire dans l'UE, mais ne sont pas encore parvenus à s'entendre sur l’ensemble du paquet. Ils se reverront le 18 décembre 2013, à la veille du Conseil européen pour trouver une solution sur les points en suspens. Le mécanisme de résolution doit permettre de régler le sort des banques en difficulté de la zone euro en évitant autant que possible de recourir à l'argent public.

Il n’y a pas encore d’accord sur le mécanisme de prise de décision. La solution qui semble se dégager est qu’un conseil de résolution, où seront représentés les Etats, sera chargé de décider du sort des banques. Mais pour des raisons juridiques, la décision formelle doit revenir à une institution européenne. La Commission a proposé d'endosser ce rôle. Il semble que le compromis attribuera au Conseil le rôle de prendre formellement les décisions finales, préparées en amont par le conseil de résolution et la Commission.  

Le champ d'application du mécanisme pose également problème. L'Allemagne voulait qu'il ne concerne que les 130 plus grandes banques de la zone euro. La France estimait qu'il devait couvrir les 6 000 banques de l'union monétaire. Au final, le mécanisme s'appliquerait directement à au moins 250 banques transfrontalières ainsi qu'à toutes les banques qui devront être liquidées.

La proposition d’un fonds unique de résolution qui serait financé par les banques n’a jamais eu les faveurs de l’Allemagne, qui est opposée à toute mutualisation du risque dans la zone euro. Le fonds de résolution sera vraisemblablement dans un premier temps "compartimenté" : chaque partie serait alimentée par les banques d'un Etat et ne permettrait de renflouer que les banques de cet Etat. Mais ces compartiments disparaîtraient progressivement avec de plus en plus de mutualisation pour aboutir à un fonds véritablement unique à l'issue d'une période de 10 ans. Ce fonds serait doté de 55 milliards d’euros.

L'une des principales avancées de la réunion du Conseil ECOFIN semble être un accord sur la base juridique du fonds de résolution. Il devrait finalement reposer sur un accord intergouvernemental prévu par l’article 114 TFUE, une solution qui convient aux Etats mais risque de déplaire au Parlement européen.

Une question qui n’a pas été tranchée non plus est celle du niveau cumulé de financement pour des fonds de résolution nationaux et des fonds de garantie des dépôts, où les chiffres varient entre 1 % des dépôts pour chacun des fonds et 0,8 % pour le fonds de résolution et d’autres niveaux pour les fonds de garantie nationaux. Une grande majorité de pays ont estimé que les fonds de garantie des dépôts ne devaient pas se convertir en fonds de sauvetage, même si, en guise de "filets de sécurité" en attendant que les fonds de résolutions soient opérationnels, des emprunts seraient possibles, tout comme le Mécanisme européen de stabilité pourrait jouer un rôle, qui reste à définir.

Un autre problème est la question du 'bail-in'. Le Parlement demande que des "outils de stabilisation gouvernementale" soient prévus.  De nombreux États membres et la Commission européenne craignent que ces outils puissent conduire à un retour vers le 'bail-out', par lequel les États injectent de l'argent public pour renflouer une banque. Cela remettrait en cause le principe du bail-in ou renflouement interne qui met d'abord à contribution les investisseurs privés (actionnaires, créanciers et déposants selon une hiérarchie établie, sachant que 100 000 euros de dépôts sont garantis par déposant) pour renflouer une banque avant toute injection d'argent public.

La présidence lituanienne a néanmoins proposé un compromis qui autoriserait le recours à l'argent public "en tout dernier ressort", mais seulement lorsque le Conseil aura établi l'existence d'une situation d'urgence. Mais au préalable, les règles de 'bail-in' devront avoir été appliquées aux actionnaires et aux créanciers subordonnés comme l'exigent les règles sur les aides d'État révisées en été 2013, et ce seulement après consultation de la Commission.

En ce qui concerne la recapitalisation préventive, une majorité de pays se sont déclarés favorables à la possibilité de recapitaliser, de façon préventive, une banque viable mais pour laquelle les prochains 'stress tests' de l'Autorité bancaire européenne (EBA) annoncés en octobre 2013 feraient apparaître des besoins supplémentaires en fonds propres.

La date de généralisation des outils de 'bail-in' dans l'UE est une question importante. Alors qu’il existe un accord sur 2018, plusieurs Etats ont demandé d’anticiper cette date à 2015, lorsque le mécanisme de résolution unique (MRU) pour la zone euro est censé entrer en vigueur, ou à 2016, lorsque la résolution bancaire au niveau de l’UE entrerait en vigueur, histoire dans les deux cas de raccourcir les délais qui permettent d’éviter la nécessité de recourir à des 'bail-out' et donc à l’argent public.