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Economie, finances et monnaie - Emploi et politique sociale
Le FMI recommande entre autres au Luxembourg d’accorder la croissance de ses transferts sociaux au taux de croissance du PIB et de faire passer la tranche indiciaire annuelle de 2,5 % à 2 %
04-03-2014


fmi-celine-allard-140304Le 4 mars 2014, Céline Allard, chef de division adjoint au Fonds monétaire international (FMI), a présenté à la presse les conclusions de sa mission au Luxembourg, mission qui s’inscrit dans le cadre des consultations périodiques au titre de l’article IV des statuts du FMI.

Pour la polytechnicienne et ancienne fonctionnaire du Ministère des Finances français, la reprise économique du Luxembourg est un fait qui est dû à la gestion prudente du gouvernement durant toute la crise.

Le Luxembourg devra cependant faire face à quelques difficultés dues à la baisse des revenus de la TVA découlant du commerce électronique à partir de 2015 et au passage à l’échange automatique d’informations (EAI). La croissance "inégale et fragile" de la zone euro jouera aussi un rôle, même si la croissance du Luxembourg sera supérieure à la moyenne de la zone. Le secteur financier sera quant à lui grevé par les efforts de réajustement au nouvel environnement règlementaire. Le secteur financier ne devrait pas, selon Céline Allard, retrouver le même rythme de croissance élevé qui a été le sien avant la crise.

Pour l’experte du FMI, le système socio-économique du Luxembourg est basé sur trois piliers : une situation budgétaire saine, un accompagnement par le gouvernement de la diversification du secteur financier et tous les ingrédients d’une diversification qui pourrait réussir sont en place.

La consolidation budgétaire

Comme d’autres institutions et le gouvernement lui-même, le FMI estime que la situation budgétaire pourrait néanmoins se dégrader en cas de politique inchangée et que la dette publique pourrait passer en cinq ans de 24 % en 2014 à 40 % du PIB en 2019. Le FMI soutient donc logiquement le gouvernement dans les efforts de consolidation qu’il compte mener. Ces efforts, s’ils sont menés de manière "modérée mais soutenue", permettront de stabiliser la dette publique à plus ou moins 30 % du PIB en 2019.

Fonds monétaire internationalLe Luxembourg recèle, selon Céline Allard, des "sources de revenu potentielles" : une hausse de la TVA et des impôts fonciers. La TVA est, comparée à celle pratiquée dans les autres Etats membres de l’UE et de la zone euro, très basse, et l’impôt foncier ne représente que 0,1 %  du PIB, contre 0,7 % du PIB en moyenne dans la zone euro. L’experte du FMI n’exclut pas un certain impact de la TVA comme un des volets de la consolidation budgétaire sur la demande intérieure. Mais la mesure est toujours envisagée par le gouvernement, et le FMI estime que cette démarche est "bonne".

Les transferts sociaux représentent 50 % de la dépense publique, estime le FMI, soit la dépense par habitant la plus élevée de l’UE. Le FMI estime, par la voix de Céline Allard, qu’il faudrait réduire la croissance de ces transferts sociaux, qui a été supérieure à celle de l’économie, notamment pour faciliter et rendre rentable le retour à l’emploi de nombreuses personnes. L’experte a admis que les programmes de transferts sociaux luxembourgeois jouent "un important rôle de redistribution", mais qu’il fallait trouver "un juste équilibre avec la durabilité des finances publiques".

L’évolution du secteur financier

La présence croissante de banques chinoises sur la place de Luxembourg est un signe que la diversification du secteur financier a commencé, estime Céline Allard. De même, les banques se préparent activement au passage à l’EAI.

Il est néanmoins nécessaire de renforcer la capacité d’analyse des superviseurs luxembourgeois de la CSSF pour accompagner ce processus. La transition vers le mécanisme de surveillance unique (MSU) doit être assurée tout comme la coopération doit être renforcée entre la CSSF et le volet "surveillance bancaire" de la Banque centrale européenne (BCE). Le FMI salue le fait que la CSSF insiste sur les minima micro-prudentiels prônés par l’accord Bâle III sur les capitaux propres, et ce tant pour les banques systémiques que pour les banques qui sont surtout actives sur le marché intérieur luxembourgeois.

Pour les banques qui sont avant tout présentes sur le marché luxembourgeois, le FMI constate qu’elles sont très actives sur le marché des prêts immobiliers, et que leur exposition est passée de 12 à 22 % en quelques années. Il félicite la CSSF d’être intervenu, car sur cette question, "il faut rester vigilant", même si actuellement, "il n’y pas de grand risque", lorsque le facteur "loan to value", le rapport entre les prêts et la valeur couverte, est pris en considération. Mais il y a eu des tendances à accorder des prêts qui couvraient 100 % de la valeur achetée, ce qui est une pratique risquée, et il vaudrait mieux retourner à des pratiques plus prudentes.

Le FMI estime ensuite qu’il serait important d’étudier les liens croissants entre les différents acteurs du secteur financier, notamment les banques et les fonds d’investissement, pour connaître l'impact éventuel d’un choc systémique sur la place. Ce serait une tâche importante pour le comité d’analyse du risque systémique qui doit être mis en place dans chaque Etat membre de la zone euro. Par ailleurs, les mécanismes de protection de l’investissement devraient être mieux communiqués aux milieux concernés.

La diversification économique

Pour Céline Allard, d’autres sources de croissance que le secteur financier doivent être étudiées. "Le Luxembourg doit rester compétitif", estime-t-elle, mettant en exergue le fait que les coûts salariaux ont augmenté, malgré le ralentissement économique et un marché du travail en difficulté.

Elle a critiqué le fait que l’indexation des salaires ne permette pas d’ajustement, par exemple quand la compétitivité est en baisse – en d’autres mots : une baisse des salaires en cas de baisse de compétitivité. Elle a par contre salué la limitation de l’indexation des salaires à une tranche annuelle, mais estimé que cette tranche ne devrait pas être de 2,5 %, mais tourner autour des 2 % qui équivalent à l’objectif de stabilité des prix de la BCE.

Céline Allard a finalement établi un lien entre la forte demande et la cherté de l’immobilier, d’un côté, et la pression salariale, de l’autre. Le FMI encourage le Luxembourg à simplifier les règles pour les terrains à bâtir, histoire de permettre d’augmenter  l’offre.