Principaux portails publics  |     | 

Entreprises et industrie
La Commission européenne propose de renforcer l’engagement des actionnaires et de leur donner un droit de regard sur la rémunération dans les grandes sociétés
09-04-2014


comite-administrationLa Commission européenne a adopté le 9 avril 2014 des mesures visant à améliorer la gouvernance d’environ 10 000 entreprises cotées sur les marchés boursiers de l’Union européenne afin de renforcer leur compétitivité et leur viabilité à long terme.

Elle a en outre présenté des propositions en matière de droit des sociétés visant à réduire les coûts supportés par les PME qui sont présentes au-delà de leurs frontières.

Cet ensemble de mesures est la concrétisation d’actions prioritaires définies par la Commission dans sa communication sur le financement à long terme de l’économie européenne, adoptée le 27 mars 2014.

Révision de la directive sur les droits des actionnaires

La proposition de révision de la directive sur les droits des actionnaires (directive 2007/36/CE) devrait permettre de remédier à des défaillances en matière de gouvernance qui trouvent leur origine dans les relations entre les entreprises cotées et leurs conseils d’administration, les actionnaires (investisseurs institutionnels et gestionnaires d’actifs), les intermédiaires et les conseillers en vote (les entreprises qui fournissent des services aux actionnaires, notamment des conseils de vote). Trop souvent, comme la crise l’a montré, les actionnaires ont encouragé une prise de risque à court terme excessive de la part des dirigeants d’entreprises et n’ont pas suivi d’assez près les sociétés dans lesquelles ils ont investi.

Les propositions permettraient aux actionnaires d’exercer plus facilement leurs droits à l'égard des entreprises et renforceraient ces droits lorsque c’est nécessaire. Cela favoriserait un plus grand engagement des actionnaires, responsabiliserait les dirigeants d’entreprise, en les obligeant davantage à tenir compte des intérêts à long terme de l’entreprise. Une perspective à plus long terme améliore les conditions de fonctionnement de l’entreprise et renforce sa compétitivité.

La proposition prévoit notamment que les investisseurs institutionnels et les gestionnaires d’actifs devront se montrer plus transparents quant à leurs politiques d’investissement et d’engagement à l’égard des sociétés dont ils sont actionnaires, et que l’identification des actionnaires soit facilitée afin que ceux-ci puissent plus facilement exercer leurs droits (notamment de vote), en particulier à l’international (on estime que 44 % des actions sont détenues dans un pays étranger, de l’Union ou autre). Les agences de conseil en vote devront également mieux expliciter comment elles élaborent leurs recommandations de vote et comment elles gèrent les conflits d’intérêts.

"Il n'y a souvent pas de vraie politique d'engagement vis-à-vis des entreprises" de la part des actionnaires, a souligné le commissaire européen en charge du dossier, Michel Barnier. Il a déploré que "les gestionnaires d'actifs soient souvent à la recherche de rendements à court terme" et cité le fait qu’un acheteur revend en moyenne ses actions huit mois après leur achat, "ce qui est trop court pour s'engager dans le développement de l'entreprise.".

Pour la première fois, les actionnaires auraient un droit de regard sur les rémunérations. À l’heure actuelle, le lien entre rémunération des dirigeants et performances de l’entreprise est insuffisant, ce qui tend à favoriser un court-termisme néfaste. Les propositions obligeraient les entreprises à publier des informations claires, comparables et complètes sur leur politique de rémunération et sur la manière dont celle-ci est appliquée. Il n’y aurait pas de plafond de rémunération contraignant au niveau de l’Union, mais chaque entreprise serait tenue de soumettre sa politique de rémunération à un vote contraignant des actionnaires. Cette politique devra prévoir un plafond de rémunération pour les dirigeants et expliciter comment elle contribue aux intérêts et à la viabilité à long terme de l’entreprise. Elle devra également préciser comment les conditions de rémunération et de travail des salariés de l’entreprise ont été prises en compte lors de la définition de la politique, y compris en expliquant le ratio entre la rémunération moyenne des salariés de l'entreprise et celle de ses dirigeants. Michel Barnier a rappelé dans ce contexte et à titre d’exemple qu’en France, la rémunération moyenne des administrateurs de sociétés cotées a augmenté de 94 % entre 2006 et 2012, alors que les prix moyens des actions a diminué de 34 %.

Recommandation de la Commission sur la qualité de l’information sur la gouvernance d’entreprise ("appliquer ou expliquer")

La recommandation de la Commission vise à améliorer d’une manière plus générale les informations que les entreprises cotées fournissent sur leur gouvernance. Pour l’essentiel, les dispositions en matière de gouvernance d’entreprise sont non contraignantes. Il est donc essentiel d’assurer le bon fonctionnement de l’approche «appliquer ou expliquer», selon laquelle une société qui ne respecte pas les codes de gouvernance doit expliquer pourquoi elle y déroge. Cette approche laisse aux entreprises une marge de manœuvre importante afin de tenir compte du fait que, dans certaines circonstances, il est dans l’intérêt de l’entreprise de déroger ponctuellement au code de gouvernance plutôt que de le respecter à 100 %. Mais il est fréquent que dans un tel cas, l'entreprise ne donne pas d'explications satisfaisantes. Il est alors difficile pour les investisseurs de prendre des décisions d’investissement en connaissance de cause.

La recommandation de la Commission vise à fournir des orientations aux sociétés cotées, aux investisseurs et aux autres parties intéressées afin d’améliorer la qualité globale des déclarations de gouvernance d’entreprise publiées par les entreprises.

Directive sur les sociétés unipersonnelles

À l’heure actuelle, les obstacles à l'activité économique transfrontière des PME au sein du marché unique sont trop nombreux, en particulier du point de vue du droit des sociétés. Seul un petit nombre de PME (2 %) investit et crée des filiales à l’étranger.

La proposition de directive relative aux sociétés unipersonnelles à responsabilité limitée vise à lever ces obstacles en harmonisant les exigences pour la création d’entreprises à un seul associé. Elle supprimerait les lourdes procédures qu’implique l’immatriculation de filiales et permettrait aux PME d'exercer plus facilement leur activité dans les autres pays de l’Union.

Éléments clés de la proposition:

  • Les États membres seraient tenus de prévoir, dans leur droit des sociétés national, une forme juridique pour les sociétés unipersonnelles à responsabilité limitée, dont les exigences seraient harmonisées dans l’UE. Cette forme juridique aurait une dénomination commune, la Societas unius personae ou SUP.
  • Les États membres seraient tenus d’autoriser l’immatriculation directe en ligne des SUP, sans que le fondateur ne soit obligé de se rendre dans le pays concerné.
  • La proposition prévoit l’élaboration d'un modèle de statuts, identique dans toute l’Union et disponible dans toutes les langues de l’Union, qui contiendrait les éléments nécessaires à l’exploitation d’une société unipersonnelle à responsabilité limitée. Le capital minimal des SUP serait de 1 euro.
  • La protection des créanciers serait assurée par un test de bilan et un certificat de solvabilité.

Contexte

La gouvernance d’entreprise et le droit des sociétés sont essentiels pour garantir la bonne administration et la viabilité à long terme des entreprises. Ils jouent donc un rôle essentiel dans le financement à long terme de l’économie européenne.

Ces propositions font suite au plan d’action de 2012 sur le droit européen des sociétés et la gouvernance d’entreprise et à la communication de la Commission sur le financement à long terme de l’économie européenne, publiée le 27 mars 2014.