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Élargissement
Rapport annuel sur l’élargissement - La Commission européenne a recommandé d’avancer dans les négociations d’adhésion avec la Turquie par l’ouverture de deux chapitres supplémentaires
08-10-2014


Le commissaire sortant en charge de l'Elargissement présente le rapport sur l'élargissement (Source : Commission)Dans une série de rapports annuelsadoptés le 8 octobre 2014, la Commission européenne a recommandé d'avancer dans les négociations d'adhésion avec la Turquie avec l'ouverture de deux chapitres supplémentaires. La Commission évalue en outre les avancées sur la voie de l'adhésion à l'UE réalisées dans les Balkans occidentaux.

Les critères d'adhésion

La stratégie d'élargissement adoptée le 8 octobre 2014, la Commission définit les critères d'adhésion :

  • l'état de droit  ce qui inclut une réforme de l'appareil judiciaire et la lutte contre la criminalité organisée et la corruption ;

  • la gouvernance économique, qui doit être renforcée notamment grâce aux programmes nationaux de réforme économique, en mettant l'accent sur la stabilité budgétaire et les réformes structurelles pour améliorer la compétitivité et la croissance ;

  • la réforme de l'administration publique et du renforcement des institutions démocratiques, qui restent faibles dans la plupart des pays visés par l'élargissement, où les capacités administratives sont limitées, et où l'administration est fortement politisée et souffre d'un manque de transparence, selon la Commission.

"Nous avons mis un accent tout particulier sur trois piliers: l'état de droit en 2012, la gouvernance économique en 2013 et cette année, nous avons exposé de nouvelles idées pour soutenir la réforme des administrations publiques et le renforcement des institutions démocratiques. Aujourd'hui, cette approche porte ses fruits", a déclaré le commissaire sortant en charge de l'Elargissement, Štefan Füle. Il ajoute l'importance des droits de l'homme, notamment de la liberté d'expression, dans le processus de réforme.

La Commission veut ouvrir deux chapitres de négociations supplémentaires avec la Turquie

La Commission salue "certains engagements de réforme", tels que celui concernant le train de mesures de démocratisation de 2013 ou le processus de paix engagé avec les kurdes. Toutefois, le commissaire Štefan Füle évoque des "préoccupations" concernant la séparation des pouvoirs, l'indépendance du pouvoir judiciaire et la protection des libertés fondamentales, en citant les tentatives du gouvernement de renforcer le contrôle sur internet et les médias sociaux. Il appelle à soutenir des négociations d'adhésion "actives et crédibles" afin d'exploiter pleinement le potentiel offert par les relations UE-Turquie. La Commission recommande l'ouverture de négociations sur les chapitres concernés consacrés à l'état de droit (chapitre 23) et aux droits fondamentaux (chapitre 24). Štefan Füle note que la Turquie est un "partenaire stratégique", notamment en matière économique, mais également en matière de politique de migration et de sécurité énergétique où la  coopération doit être renforcée

Le Parlement européen est favorable à l'ouverture des chapitres 23 et 24 qui sont "les plus adaptés" pour garantir l'alignement de la législation turque avec l'acquis européen dans ces domaines. Le rapporteur pour la Turquie, Kati Piri (S&D), a déclaré que de nombreux progrès devaient encore être accomplis en ce qui concerne "l'état de droit, les droits fondamentaux, la séparation des pouvoirs et l'indépendance du système judicaire".

Selon le rapport, 14 chapitres ont été ouverts (sur 33), dont neuf sont bloqués au Conseil. En novembre 2013, le chapitre 22 sur la politique régionale a pu être ouvert. Le rapport ajoute que la Turquie a fait un "progrès significatif" en ce qui concerne la lutte contre le financement du terrorisme, mais dénonce l'adoption de lois "limitant la liberté d'expression, incluant internet" et une "restriction en pratique de la liberté de presse". Des déclarations intimidantes de politiciens ainsi que des enquêtes contre des journalistes auraient renforcé l'"auto-censure" chez les médias ainsi que le licenciement de journalistes. "L'interdiction générale de YouTube et Twitter a soulevé de sérieuses préoccupations, même si elle a finalement été annulée par la Cour constitutionnelle", note le texte.  

La Bosnie-Herzégovine a fait "peu de progrès"

Le pays est encore candidat potentiel. Comme le reste des Balkans occidentaux, la Bosnie-Herzégovine a une perspective européenne, souligne la Commission, déplorant que l'accord de stabilisation et d'association ne soit toujours pas en vigueur et que le pays ait fait "peu de progrès" concernant les critères politiques et la réalisation d'une économie de marché fonctionnelle. Elle dénonce un "manque de volonté politique commune" chez les dirigeants  qu'elle appelle à s'engager résolument dans un programme global de réforme après les élections générales d'octobre 2014 et à améliorer l'efficience et le fonctionnement des institutions. Elle critique également un manque de "soutien politique" pour l'agenda européen ainsi qu'un "manque de coordination" quant aux dossiers européens. Faute d'alignement sur les exigences de l'UE, le pays n'est pas en mesure d'exporter des produits alimentaires, ajoute-t-elle.  

L'UE devrait "'aider le pays à sortir de l'impasse", estime pour sa part le rapporteur pour la Bosnie-Herzégovine au Parlement européen, Cristian Preda (PPE). "Nous devons surmonter les clivages politiques et ethniques afin de répondre aux aspirations des citoyens du pays", a-t-il expliqué. Selon lui, il faut également faire preuve de solidarité envers la classe politique à l'approche des élections.

Le futur gouvernement du Kosovo doit entamer une série de réformes

Le pays est candidat potentiel et partage une perspective européenne avec le reste des Balkans occidentaux, estime la Commission. Les négociations relatives à un accord de stabilisation et d'association avec le Kosovo ont été conclues et l'accord paraphé en juillet 2014. Elle critique pourtant le "progrès limité" concernant la réalisation d'une économie de marché fonctionnelle. Après les élections législatives anticipées de juin 2014, le Kosovo n'a toujours pas de gouvernement. La Commission souligne que le prochain gouvernement devrait entamer une série de réformes, notamment une réforme électorale et une réforme de l'administration publique. Le futur gouvernement devrait également promouvoir le dialogue avec la Serbie qui a été lancé en mars 2011 grâce à la médiation de l'UE et qui a mené à un accord de principe régissant la normalisation des relations conclu entre Pristina et Belgrade en avril 2013.

Tamás Meszerics (Verts/ALE), représentant le rapporteur permanent pour le Kosovo Ulrike Lunacek (Verts/ALE) au Parlement européen, a salué les progrès réalisés pour améliorer l'état de droit, et a interrogé le commissaire sur la manière dont "l'UE pourrait aider la cour constitutionnelle à renforcer sa présence".

Le Monténégro "continue à répondre suffisamment aux critères politiques pour une adhésion"

Les négociations d'adhésion ont débuté en juin 2012. Douze chapitres ont été ouverts à ce stade, dont deux ont été provisoirement clôturés, selon la Commission. La mise en œuvre des réformes en matière d'état de droit a commencé. La Commission estime que des résultats tangibles sur le terrain sont à présent nécessaires et seront essentiels pour déterminer le rythme global des négociations d'adhésion, tout en notant que le pays "continue à répondre suffisamment aux critères politiques pour une adhésion". Elle critique le manque d'indépendance du système judiciaire qui "entrave la lutte contre la corruption". Elle salue l'ouverture d'enquêtes dans des affaires de violence contre des journalistes, tout en appelant à s'attaquer "urgemment" à des cas plus anciens pour éviter la prescription. La Commission salue la progression du Monténégro en matière des droits fondamentaux des personnes LGBTI (lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexués), notant le soutien des autorités à la première "gay pride" dans la capitale en octobre 2013. Tout de même, des attaques contre ces personnes sont fréquentes et peu poursuivies, déplore-t-elle.  

"Le Monténégro est un petit pays qui progresse énormément", a affirmé Charles Tannock (ECR), rapporteur au Parlement européen, espérant que "de nombreux progrès seront encore réalisés".

La Serbie doit faire des efforts pour lutter contre le déficit public

La Serbie s'est vu octroyer le statut de pays candidat en mars 2012. Après un accord de principe régissant la normalisation des relations avec le Kosovo conclu en avril 2013, le Conseil européen a décidé en juin 2013 d'ouvrir les négociations d'adhésion et la première conférence intergouvernementale sur les négociations d'adhésion de la Serbie s'est tenue en janvier 2014. La Commission note que le processus d'examen analytique de l'acquis ("screening") est en cours et devrait s'achever en mars – 24 chapitres sur 35 ont pu être fermés. L'accord de stabilisation et d'association (ASA) est entré en vigueur en septembre 2013.

La Commission estime que la Serbie "répond suffisamment aux critères politiques" et se félicite de la tenue d'élections législatives "inclusives et transparentes" en mars 2014. Elle souligne que la "gay pride", qui a eu lieu le 28 septembre 2014, s'est déroulée "sans incidents" et qu'elle constitue une "étape importante" pour les droits de l'homme. Elle demande néanmoins des "efforts considérables" concernant la lutte contre le déficit public et appelle à continuer la privatisation et la restructuration d'entreprises publiques. Elle estime d'ailleurs qu'il faut rendre le système éducatif "plus efficace".

Le rapporteur pour la Serbie au Parlement, David McAllister (PPE), a souligné l'importance "d'un système judiciaire indépendant pour lutter contre la corruption et la criminalité organisée". Selon lui, les réformes de la gouvernance économique et la privatisation des entreprises publiques sont des éléments clés. Il a appelé à poursuivre le soutien financier à la Serbie, en particulier suite aux inondations du mois de mai.

L'Albanie doit consolider et intensifier les réformes dans des domaines prioritaires clés

L'Albanie s'est vue accorder le statut de pays candidat en juin 2014, la Commission ayant jugé que l'Albanie avait continué à mettre en œuvre et à consolider ses réformes, notamment en ce qui concerne le système judiciaire et la lutte contre la criminalité organisée et la corruption. Elle note que les efforts se sont poursuivis dans ce domaine, d'importantes opérations ayant été menées contre la criminalité liée à la drogue. Elle estime que l'Albanie devra consolider et intensifier les réformes dans des domaines prioritaires clés, notamment en ce qui concerne l'état de droit.

Elle critique le fait que le principal parti d'opposition boycotte le travail parlementaire depuis juillet et appelle à rétablir le dialogue.

Knut Fleckenstein (S&D), rapporteur pour l'Albanie au Parlement européen, a salué "les progrès tangibles dans la lutte contre la criminalité organisée" dans le pays. Il a affirmé que le statut de pays candidat entraînait de nouvelles tâches. "Nous continuerons d'insister sur la réforme de l'administration publique et du système judicaire ainsi que sur la lutte contre la corruption", a-t-il commenté.

L'Ancienne République yougoslave de Macédoine (ARYM) enregistre des reculs

Candidat depuis 2005, le pays continue de remplir les critères politiques de manière satisfaisante et a atteint un niveau élevé d'alignement sur l'acquis de l'UE, note la Commission. Elle maintient sa recommandation d'ouvrir les négociations d'adhésion, mais regrette les reculs enregistrés ces dernières années. C'est la sixième année consécutive que la Commission recommande l'ouverture des négociations d'adhésion, mais le Conseil n'a pas encore statué sur ce point. Elle critique une politisation des institutions étatiques et un contrôle accru du gouvernement sur les médias, mettant en garde contre une "justice sélective".

Une action décisive est nécessaire pour répondre à ses préoccupations concernant la politisation accrue et les lacunes croissantes en matière d'indépendance du pouvoir judiciaire et de liberté d'expression, juge la Commission, notant que le pays était le premier des Balkans occidentaux à avoir signé l'accord de stabilisation et d'association en 2004.

"Le principal problème de l'ancienne République yougoslave de Macédoine reste la question liée à son nom", a affirmé le rapporteur Ivo Vajgl (ALDE) au Parlement européen. Il regrette que les négociations avec le pays ne soient pas encore ouvertes. Selon lui, "cela explique également pourquoi le pays ne prend pas la direction politique que nous aurions souhaité". La réforme du système judiciaire, la liberté des médias et la culture politique au parlement font partie des autres défis que le pays doit relever, a-t-il ajouté.