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Fiscalité - Traités et Affaires institutionnelles
Suites de Luxleaks - Xavier Bettel s’oppose dans une interview pour L’Echo à une harmonisation des fiscalités dans l’UE et veut placer la transparence fiscale au centre des débats dans l’OCDE, la question "dépassant largement le cadre européen"
19-11-2014


www.lecho.beDans une interview donnée au journaliste Martin Buxant du quotidien économique belge L’Echo et parue le 19 novembre 2014, le Premier ministre luxembourgeois Xavier Bettel s’explique sur les rulings luxembourgeois et précise ses vues en matière de politique de la fiscalité dans l’UE.  "Il y a aujourd'hui 22 pays (de l’UE, ndlr) où on fait des rulings", dit-il d’emblée, "est-ce que je vais maintenant condamner 22 chefs d'Etat?"

Xavier Bettel pense que le mécontentement que suscitent les rulings luxembourgeois peut tout à fait être traité dans l'Union européenne, mais ce "serait un premier pas", et d’ajouter : "Mais selon moi l'OCDE est le cadre le plus adéquat. Car quand on parle de ces matières, on parle de boîtes américaines, de boîtes asiatiques, européennes, tout cela dépasse largement le cadre européen. Le cadre de l'OCDE convient mieux car il est beaucoup plus général. Car même en Europe, on a certains pays qui ne sont pas membres de l'Union européenne et qui sont dans l'OCDE."

Mais l’enjeu du débat au sein de l’OCDE ne serait pas de mener une réflexion sur la meilleure manière de réglementer et d’accorder "les mêmes conditions fiscales à tous, via l'OCDE", comme le suggère le journaliste. "Non!", répond le Premier ministre, "ce n'est pas le débat et un Etat cherchera toujours à être fiscalement le plus attractif. Le débat actuel, c'est la transparence. Le débat, ce n'est pas d'accorder les mêmes conditions fiscales à chacun, mais de savoir qui fait quoi."

En attendant, pour "coopérer avec les autorités belges pour faire la lumière sur les rulings luxembourgeois controversés", comme le formule le journaliste, Xavier Bettel renvoie "au niveau de la transparence", aux outils pour l'échange des données dont on dispose déjà.  Et d’ajouter : "Maintenant, si on veut davantage de transparence au niveau de la fiscalité des entreprises, je l'ai dit, cela doit se faire à un échelon supérieur comme l'OCDE."

Il livre aussi dans l’interview sa définition du dumping fiscal : "Le dumping fiscal, c'est d'accepter qu'on peut être concurrent l'un avec l'autre, que certains peuvent choisir d'être plus attractifs au niveau fiscal que d'autres pays."

"Je vous le dis, je ne vais certainement pas hausser le niveau des impôts au Luxembourg juste pour faire plaisir à quelques autres pays», est-il cité. Et encore : "Je suis contre cela. La fiscalité est du ressort des Etats membres. C'est comme cela que ça fonctionne dans l'Union européenne."

Et il précise : "On a toujours dit que dans l'Union européenne, on a des fiscalités directes ou indirectes qui sont différentes. Je pense que la fiscalité fait partie des compétences nationales. Maintenant, si on veut aller vers davantage d'harmonie, on peut parler de fourchettes fiscales, il y aura certains Etats qui vont dire qu'ils travaillent dans une fourchette fiscale basse et d'autres dans une fourchette fiscale haute. Mais je vous le dis: je ne vais certainement pas avancer avec le Luxembourg vers une fiscalité qui est plus haute qu'aujourd'hui." 

Le Premier ministre réitère avec force le primat des Etats membres sur les questions de fiscalité : "Dire que tout le monde à l'intérieur de l'Union européenne doit avancer vers une fiscalité unique et les mêmes taux d'imposition, ça, je suis contre. C'est une compétence qui est du ressort des Etats membres."

Interrogé sur sa position dans "un des débats actuels" qui serait "de voir justement si la Commission européenne doit avoir plus de pouvoir en matière fiscale", Xavier Bettel réplique : "On peut tout examiner mais je ne suis pas en faveur d'une harmonisation de la fiscalité."

L’interview se termine par une question sur le fait de savoir si le Luxembourg est un paradis fiscal "Non", répond le Premier ministre, "dans un paradis fiscal, on ne paye pas d'impôt et on ne veut pas de transparence. Ici on paye des impôts et il y a de la transparence. Comparer le Luxembourg à un paradis fiscal, c'est propager une image fausse de la réalité."

Au cours de la séance publique à la Chambre des députés du 19 novembre 2014, Xavier Bettel a par ailleurs répondu par l'affirmative à une question du député de Déi Lénk, Justin Turpel, qui lui demandait si le Luxembourg allait continuer la pratique du tax-ruling.