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Marché intérieur - Traités et Affaires institutionnelles
Une étude publiée par la Fondation Bertelsmann, clairement engagée en faveur d’un maintien du Royaume-Uni dans l’UE, tente d’évaluer le coût qu’aurait un éventuel Brexit pour le Royaume-Uni, mais aussi pour le reste de l’UE
27-04-2015


La Fondation Bertelsmann a publié le 27 avril 2015 les résultats d’une étude conduite en Le logo de la Fondation Bertelsmanncollaboration avec le Centre d’études économiques munichois de l’Institut IFO sur les conséquences économiques que pourrait avoir une éventuelle sortie du Royaume-Uni de l’UE, le fameux "Brexit". Pour la première fois, les économistes qui ont travaillé sur différents scénarios se sont interrogés non seulement sur les conséquences qu’un Brexit pourrait avoir sur le Royaume-Uni, mais aussi sur les autres Etats membres de l’UE. Conclusion de l’étude, un Brexit coûterait particulièrement cher au Royaume-Uni, mais aurait aussi un coût important pour ses actuels partenaires européens. Et, selon les auteurs de cette étude, le Luxembourg compte parmi les pays qui seraient les plus impactés économiquement par une éventuelle sortie britannique de l’UE.

Aart De Geus, président de la Fondation Bertelsmann, retient de cette étude que, ne serait-ce que d’un point de vue économique, un Brexit serait "une opération à perte pour tout le monde en Europe, et en particulier pour le Royaume-Uni". Sans compter que cela constituerait à ses yeux "un revers particulièrement amer pour l’intégration européenne, ainsi que pour le rôle de l’UE dans le monde". Autrement dit, tout le monde y perdrait aussi sur le plan politique. Autant de raisons pour l’influente fondation allemande de plaider en faveur d’un maintien du Royaume-Uni dans l’UE à moins de deux semaines à peine d’élections législatives dont l’actuel Premier ministre britannique, David Cameron, a fait un enjeu pour le maintien de son pays de l’UE en promettant, s’il est réélu, un référendum sur la sortie du Royaume-Uni de l’UE.

Les pertes en termes de PIB pourraient atteindre plus de 300 milliards d’euros pour l’économie britannique

Les auteurs de cette étude, qui ne perdent pas de vue les grandes incertitudes qui sont liées à leurs travaux, ont tenté d’estimer quelles seraient les pertes en PIB qui résulteraient d’une sortie du Royaume-Uni de l’UE. Pour ce faire, ils ont développé trois scénarios, et tenu compte des périodes de transition qu’impliquerait une telle sortie. Ils sont partis du principe que les effets négatifs d’un Brexit se seraient pleinement fait sentir d’ici 2030, soit douze ans après cette éventuelle sortie. Dans le cas le plus favorable, le Royaume-Uni pourrait obtenir un statut similaire à celui de la Suisse et aurait donc un accord de libre-échange avec l’UE. Dans le cas le plus défavorable envisagé, le pays perdrait tous les avantages commerciaux découlant de son appartenance à l’UE et de ses accords de libre-échange.

Selon le degré d’isolement du Royaume-Uni en matière de politique commerciale, le PIB réel par habitant pourrait être en 2030 entre 0,6 % et 3 % en-dessous de ce qu’il serait si le pays restait dans l’UE, estiment les économistes de l’IFO et de la Fondation Bertelsmann. Par rapport à 2014, cela signifierait une perte de PIB réel de 220 euros par habitant dans le scénario le plus favorable, et, calculent les auteurs de cette étude, en cas d’isolement plus fort, cela pourrait atteindre 1025 euros par habitant. En prenant en compte non seulement les conséquences commerciales, mais aussi les conséquences économiques dynamiques qu’aurait une telle sortie, comme une capacité d’innovation réduite ou encore un affaiblissement du centre financier londonien, les pertes de PIB pourraient atteindre 14 %, estiment encore les auteurs de cette étude. En se basant sur les chiffres de 2014, cela correspondrait à une perte de PIB de l’ordre de 313 milliards d’euros pour l’économie britannique, ou d’environ 4850 euros par habitant. Les économies que le Royaume-Uni ferait en n’ayant plus à verser de contribution au budget de l’UE, ce qui équivaut actuellement à environ 0,5 % du PIB, ne pourraient pas compenser les pertes économiques engendrées par une sortie de l’UE, et ce même dans le scénario le plus favorable, soulignent les auteurs de l’étude.

Les auteurs de l’étude estiment qu’une sortie de l’UE aurait surtout pour impact d’augmenter le coût du commerce entre le Royaume-Uni et l’UE, et donc de réduire les activités commerciales. La gravité des conséquences différerait selon les secteurs. Les auteurs de l’étude pointent le secteur financier, pour lequel les pertes en valeur ajoutée pourraient atteindre 5 % dans le scénario le plus défavorable. De même, les secteurs de la chimie, de l’ingénierie mécanique et de l’industrie automobile seraient aussi particulièrement exposés dans la mesure où leurs chaînes de valeurs sont largement intégrées au niveau européen. Ainsi, l’industrie chimique pourrait-elle subir des pertes de l’ordre de 11 %, calculent les économistes.

Le Luxembourg compterait parmi les pays qui seraient le plus affectés par une sortie du Royaume-Uni de l’UE

La Fondation Bertelsmann relève dans son communiqué de presse présentant les résultats de l’étude que, par comparaison, les pertes économiques seraient nettement moins élevées pour les autres Etats membres de l’UE.  Selon les scénarios, l’Allemagne pourrait connaître en 2030 une perte de PIB de 0,1 % à 0,3 % par rapport à celui qu’elle aurait en l’absence de Brexit, ce qui correspondrait, par rapport au PIB de 2014, à une perte de PIB allant de 30 à 115 euros par habitant. Le secteur de l’industrie automobile serait le plus touché, selon les analystes de l’IFO et de la Fondation Bertelsmann. En prenant en compte les conséquences dynamiques d’un Brexit, la perte de PIB pourrait atteindre entre 0,3 % et 2 % du PIB, à savoir entre 8,7 milliards d’euros en cas d’isolement faible du Royaume-Uni, et 58 milliards d’euros dans le scénario le plus défavorable.

Selon les calculs réalisés par les chercheurs, l’Irlande aurait le plus à souffrir d’un Brexit, puisque la perte de PIB par habitant pourrait atteindre entre 0,82 % et 2,66 % du PIB en fonction des scénarios. Le Luxembourg arrive juste derrière, avec une perte de PIB par habitant qui pourrait être de 0,48 % dans le cas du scénario le plus favorable, ou même de 0,80 % dans le cas du scénario le plus défavorable. Suivent la Belgique, la Suède, Malte et Chypre. Quant à l’UE sans Royaume-Uni, elle connaîtrait selon les calculs des chercheurs de l’IFO une perte de PIB par habitant de 0,10 % à 0,36 % selon le scénario. Ce qui aurait aussi un impact au niveau mondial, les pertes en termes de PIB par habitant s’élevant, selon le scénario, à 0,06 %, voire 0,25 %.

Les chercheurs de l’IFO ont aussi calculé les conséquences qu’une sortie du Royaume Uni aurait sur les contributions des autres Etats membres au budget de l’UE, évaluant  à 2,5 milliards d’euros le coût que cela aurait à l’Allemagne pour compenser la sortie britannique. Pour la France, la facture s’élèverait à 1,9 milliard d’euros par an supplémentaires, tandis qu’elle serait de 1,4 milliards pour l’Italie. Pour le Luxembourg, il faudrait ajouter 28 millions d’euros par an à la contribution au budget de l’UE, estiment les analystes.