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Le Fonds européen d’investissements stratégiques vise à soutenir des projets à risque élevé et stimuler l’investissement privé, ont déclaré Jyrki Katainen et Werner Hoyer lors d’une table ronde à Luxembourg sur le plan Juncker
27-04-2015


Jyrki Katainen, le vice-président de la Commission européenne, avec Werner Hoyer, président de la Banque européenne d’investissement (BEI) et l’eurodéputé luxembourgeois Claude Turmes (Source : Commission)Le 27 avril 2015, Jyrki Katainen, le vice-président de la Commission européenne en charge de l’emploi, de la croissance, de l’investissement et de la compétitivité, a participé à une table ronde sur le plan Juncker à la Chambre de commerce du Luxembourg, qui réunissait Werner Hoyer, le président de la Banque européenne d’investissement (BEI), l’eurodéputé luxembourgeois Claude Turmes (Verts) ainsi que le président de la Chambre de commerce, Michel Wurth. Présenté en novembre 2014, le plan Juncker est censé libérer au moins 315 milliards d’investissements publics et privés en trois ans, notamment via un Fonds Européen d’investissements stratégiques (FEIS ou EFSI). L’EFSI est doté de 21 milliards d’euros, dont 16 proviennent de l’UE et 5 de la BEI.

Jyrki Katainen et Werner Hoyer étaient unanimes à constater que le déficit d’investissement dans l’UE, qui a baissé d’au moins 15 % depuis la crise financière, n’est pas dû à un manque de liquidités, mais à un manque de capacité de prendre des risques en Europe ("risk bearing capacity").  "L’Europe ne manque pas de liquidités. C’est pourquoi on n’a pas besoin d’augmenter le montant des prêts publics pour des projets normaux. L’EFSI se focalisera sur des projets à risque élevé, en ce qui concerne les financements des PME, mais aussi le financement de projets d’infrastructure à risque élevé", a déclaré Jyrki Katainen. Il a insisté sur le fait que l’EFSI est dirigé vers le secteur privé et qu’il faut s’attaquer au manque de capitaux propres ("equity"), notamment des PME.

Werner Hoyer s’est félicité du fait que la BEI a réalisé en mars 2015 son objectif de prêt visant à mobiliser 180 milliards d’euros dans l’Europe, soit six mois plutôt que prévu, tout en soulignant que "seulement répéter cela n’est pas la bonne mesure". Il a précisé que "le but du jeu avec le plan Juncker est d’avancer dans des domaines de risque plus élevé, c’est pourquoi on a inventé cet instrument". Il a évoqué un "changement de paradigme dans l’usage des ressources budgétaires qui est en train de se faire" en Europe, un passage de "subventions vers des prêts" qui sont "beaucoup mieux investies dans l’économie réelle".

L’idée du plan Juncker est de "stimuler la compétitivité, les investissements et l’innovation", a-t-il dit, en regrettant le fait que l’UE souffre d’un déficit en matière d’innovation, ayant investi moins dans le secteur de la recherche, l’innovation et l’éducation que l’Amérique du Nord ou l’Asie depuis les années 90. Il a encore insisté sur la nécessité d’accélérer et de préparer des projets, en notant que la BEI a déjà présenté quatre projets le 22 avril 2015 dont elle assumera le financement si jamais ils ne remplissaient pas les conditions du plan Juncker. Il a précisé que la BEI assure environ 30 à 35 % du financement d’un projet et souligné que l’expertise de la BEI est "unique au monde".

Jyrki Katainen a encore ajouté que le plan d’investissement vise à aider les Etats membres de créer un environnement plus propice aux investissements et qu’il s’agit aussi d’une "réforme structurelle" de l’Europe. Il a appelé à renforcer le marché unique et l’harmonisation des différentes législations dans l’UE, notamment en ce qui concerne le marché numérique, le marché de l’énergie et l’Union des marchés de capitaux. Werner Hoyer a ajouté que "la plan Juncker ne fonctionnera pas sans réformes structurelles" et sans la réduction de la bureaucratie et de la réglementation. "Notre but n’est pas d’augmenter les charges fiscales ou les dettes publiques", a encore insisté Jyrki Katainen.

L’énergie nucléaire et les coupes dans Horizon 2020 pointées du doigt

L’eurodéputé vert Claude Turmes s’est dit "choqué" par le fait que l’énergie nucléaire a une place plus importante dans les projets proposés par les gouvernements nationaux que l’efficacité énergétique qui concernerait seulement 1,7 % des projets, une critique qu’il avait déjà formulée en mars 2015. "C’est fou puisqu’on vit sur une planète à ressources limitées et qu’on doit agir d’une manière plus intelligente en matière de ressources", a-t-il critiqué. Pour rappel, la commission de l’industrie, de la recherche et l’énergie (ITRE) du Parlement européen avait demandé de réserver cinq milliards du plan Juncker à des projets promouvant l’efficacité énergétique, mais cet amendement n’a pas été retenu par les commissions "au fond" (commissions des budgets et des affaires économiques), au grand dam de Claude Turmes.

Interrogé sur le fait que 2,7 milliards d’euros du budget de l’EFSI seront prélevés de Horizon 2020, le programme-cadre de recherche et d’innovation, Jyrki Katainen a rappelé qu’il s’agit du "plus grand programme de recherche au monde". Utiliser ce montant comme un instrument financier lui donnerait une capacité "d’effet de levier", a-t-il insisté. Pour rappel, Horizon 2020 est doté de 80 milliards d’euros pour la période 2014-2020 et les coupes prévues pour l’EFSI avaient suscité l’indignation du monde de la recherche. Quant aux critiques de Claude Turmes, le vice-président de la Commission a insisté sur l’importance des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique, en précisant que c’est justement des projets innovateurs dans ce secteur qui auraient besoin de plus de ressources, dont celles provenant d’Horizon 2020. "C’est pourquoi je pense qu’on ne vole pas les ressources à la recherche", a-t-il dit.  

Claude Turmes a encore rappelé que le plan Juncker, qu’il préfère appeler "plan Juncker-Schulz", en référence à l’ancien président du groupe S&D Martin Schulz, a seulement vu le jour grâce à la pression du groupe S&D. "La famille politique de Jean-Claude Juncker n’était pas prêt d’accepter un plan d’investissement car il ne parlait que d’austérité", a-t-il insisté. Claude Turmes a dit appuyer le plan Juncker parce qu’il est "important que les Européens croient de nouveau" à l’Europe.