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Semestre européen 2015 – La Commission propose pour le Luxembourg des recommandations l’invitant à élargir sa base fiscale, à réduire l’âge de départ à la retraite et à réformer le système d’indexation des salaires
13-05-2015


Le 13 mai 2015, la Commission européenne a présenté les recommandations par pays qui seront soumises au Conseil avant d’être adressées à chacun des Etats membres de l’UE dans le cadre du semestre européen 2015.Commission européenne

Dans le cas du Luxembourg, la Commission base son analyse sur le rapport consacré au Luxembourg qu’elle a publié le 26 février dernier, dans le cadre du "paquet d’hiver", nouvelle étape du semestre européen introduite cette année. Mais elle dit aussi avoir tenu compte du Programme national de réforme (PNR) et du Programme de stabilité et de croissance (PSC) transmis par le gouvernement luxembourgeois le 30 avril dernier.

La première recommandation adressée au Luxembourg consiste à "élargir la base fiscale, notamment sur la consommation, sur la taxation récurrente de la propriété et sur la fiscalité environnementale"

En matière de finances publiques, le Luxembourg ne fait pas l’objet d’une procédure de déficit excessif et est donc uniquement soumis à la surveillance prévue dans le cadre du volet préventif du Pacte de stabilité et de croissance.

La Commission, qui rappelle les chiffres avancés par le gouvernement luxembourgeois dans son PSC, à savoir un excédent budgétaire (du solde des administrations publiques) de 0,6 % en 2014, 0,1 % en 2015, puis 0,9 % en 2018 et une dette publique de l’ordre de 24 % sur la période, relève que le scénario macroéconomique qui est à la base des projections du gouvernement est "favorable en 2015 et plausible ensuite". Toutefois, la Commission note qu’à compter de 2016, il y a "des risques dans la mise en œuvre des mesures budgétaires".

Les prévisions économiques de printemps de la Commission misent cependant sur le fait que le solde structurel du Luxembourg devrait correspondre en 2015 et 2016 à son objectif  à moyen terme. Par conséquent, le Luxembourg devrait respecter les règles du Pacte de stabilité et de croissance, estime la Commission qui relève que "le cadre budgétaire du Luxembourg a été considérablement renforcé avec l’adoption du cadre budgétaire à moyen terme et la mise en place d’un conseil national des finances publiques".

La Commission pointe toutefois des "faiblesses importantes" en termes de "publication régulière des statistiques budgétaires intra-annuelles", un élément qui est à ses yeux essentiel "pour le suivi en temps réel de l’évolution budgétaire".

La Commission, qui a bien noté que le gouvernement s’apprêtait à lancer une vaste réforme fiscale pour 2017, souligne que la baisse des recettes fiscales liée aux changements opérés au 1er janvier 2015 au sujet de la réglementation sur la TVA provenant du commerce électronique montre "la fragilité d’au moins une partie des recettes fiscales". Elle propose par conséquent, afin de mieux assurer leur prévisibilité, d’élargir la base fiscale et d’harmoniser la fiscalité, notamment en revoyant "la fiscalité actuellement basse sur la propriété immobilière". Une idée qu’elle avait déjà émise dans son rapport publié en février dernier, et qui avait rencontré le soutien des syndicats, à condition toutefois que cela ne pèse pas sur les ménages à faibles et moyens revenus, ainsi que cela avait été formulé lors d’un échange de vues organisé par le CES. La Commission suggère aussi de faire un plus grand usage de sources alternatives, comme la fiscalité environnementale.

La première recommandation adressée au Luxembourg consiste donc à "élargir la base fiscale, notamment sur la consommation, sur la taxation récurrente de la propriété et sur la fiscalité environnementale". Une recommandation qui s’inscrit dans la droite ligne de celles formulées en 2014, où le Luxembourg était invité, entre autres, à "élargir l’assiette fiscale, en particulier sur la consommation", mais qui est aussi plus ciblée, puisqu’il s’agit de l’unique recommandation faite en matière budgétaire. L’idée de taxation environnementale se retrouvait en 2014 dans une recommandation invitant à imposer les produits énergétiques utilisés dans les transports dans le contexte plus global de la réduction des émissions de gaz à effet de serre, un sujet qui n’est pas thématisé dans les recommandations adressées au Luxembourg dans le cadre du semestre européen 2015.

La deuxième recommandation adressée au Luxembourg consiste à "réduire l’écart entre l’âge légal et l’âge effectif de départ à la retraite en limitant les retraites anticipées et en établissant un lien entre l’âge légal de départ à la retraite et l’espérance de vie"

"La viabilité à long terme des finances publiques est menacée par la croissance des dépenses de pension malgré une réforme récente du système, et par la hausse continue des dépenses en matière de soins de longue durée", indique la Commission. Un sujet qui vient d’être abordé en Conseil ECOFIN à l’occasion de la publication du Rapport sur le vieillissement 2015.

En se basant sur les chiffres de la CNS, la Commission relève que l’assurance dépendance risque d’être en déficit en 2015 et que ses réserves vont réduire progressivement au point de tomber en dessous du minimum légal de 10 % en 2017. Si la Commission note que certaines mesures adoptées dans le budget 2015 vont permettre de faire des économies, elle relève aussi que la réforme de l’assurance dépendance prévue n’a toujours pas été incorporée dans la législation.

La réforme du système de pension de 2012 est, une fois de plus, jugée "pas assez ambitieuse dans la mesure où elle n’a que partiellement traité de l’écart important entre l’âge légal et l’âge effectif de départ à la retraite". "Plusieurs boulevards pour la retraite anticipée persistent", critique la Commission qui note aussi que la participation des travailleurs âgés dans le marché du travail reste très faible en comparaison avec les autres pays de l’UE. La Commission prend toutefois note du projet de loi visant à introduire un paquet de mesures en matière de politique des âges, ainsi que des mesures annoncées par le gouvernement dans son PNR en ce qui ce qui concerne le maintien dans l’emploi des travailleurs âgés.

La deuxième recommandation adressée au Luxembourg consiste donc à  "réduire l’écart entre l’âge légal et l’âge effectif de départ à la retraite en limitant les retraites anticipées et en établissant un lien entre l’âge légal de départ à la retraite et l’espérance de vie". Une recommandation qui apparaît par ailleurs dans la continuité de celles formulées les années précédentes, mais aussi un peu plus ciblée.

La troisième recommandation adressée au Luxembourg consiste à "réformer le système de formation des salaires avec pour objectif d’assurer que les salaires évoluent en fonction de la productivité, notamment au niveau sectoriel"

La Commission observe ensuite  que l’économie luxembourgeoise est caractérisée par des divergences de taille en termes de productivité selon les secteurs économiques, avec une productivité dans le secteur financier deux fois plus élevée que celle des secteurs non financiers. "Cela implique qu’une plus grande variation entre les salaires réels par secteur, en fonction de la productivité du secteur, pourrait soutenir la redistribution du travail" notamment vers "les secteurs souffrant de pertes en termes de coût-compétitivité", note la Commission. "Il reste des barrières à un ajustement sectoriel des salaires à long terme", déplore la Commission, qui revient ici avec une critique récurrente à l’égard du système d’indexation des salaires luxembourgeois.

Dans une fiche thématique consacrée à la formation des salaires, la Commission affiche clairement son point de vue quant au principe de l’indexation automatique des salaires : "L’application automatique de l’indexation des salaires risque de rendre les ajustements plus difficiles", explique-t-elle. "Premièrement, l’indexation peut facilement créer une spirale inflationniste et est susceptible de rendre durable le moindre choc nominal (par exemple une dégradation en matière de commerce) et ce notamment dans le cas d’un pays de l’Union monétaire ayant des taux d’échange nominaux irréversible", note la Commission qui rappelle précédemment que les pays ayant un système d’indexation automatique des salaires sont, outre le Luxembourg, la Belgique, Chypre et Malte, à savoir quatre pays membres de la zone euro. "Deuxièmement", poursuit la Commission, "l’indexation rend les salaires réelles plus rigides et influe par conséquent contre un ajustement du marché du travail".

La troisième recommandation adressée au Luxembourg consiste par conséquent à "réformer le système de formation des salaires en consultation avec les partenaires sociaux et conformément aux pratiques nationales avec pour objectif d’assurer que les salaires évoluent en fonction de la productivité, notamment au niveau sectoriel".

Le Luxembourg ne se voit pas adresser de recommandation en ce qui concerne l'éducation, tandis que la question des émissions de gaz à effet de serre n'est pas thématisée

Si la Commission juge que le marché du travail fonctionne bien dans l’ensemble et si elle salue le taux élevé de diplômé de l’enseignement supérieur affiché par le Luxembourg, elle relève toutefois que le taux d’emploi reste comparativement bas pour les travailleurs âgés, les femmes et les jeunes peu qualifiés. "Il y a des obstacles institutionnels à des politiques d’activation efficaces", souligne-t-elle en pointant notamment une "importante réforme" de l’ADEM en vue d’un accompagnement personnalisé des demandeurs d’emploi qui n’est pas achevée. Elle prend note en revanche des mesures annoncées en matière de réforme du congé parental et d’allocations de maternité et d’éducation, qui devraient contribuer à augmenter la participation des femmes au marché du travail.

La Commission pointe aussi l’imposition commune des couples qui n’encourage pas selon elle celui du couple qui gagne le moins à travailler, de même que le régime de prestations sociales peut aussi dissuader de travailler selon elle.

Les projets de réforme du système de formation professionnelle et de l’école secondaire restent encore en suspens, relève aussi la Commission qui met l’accent sur la nécessité d’améliorer la des enfants issus de l’immigration et des jeunes peu qualifiés.

Autant de commentaires qui découlent du rapport sur le Luxembourg publié fin février, sans pour autant que le Luxembourg ne soit visé par une recommandation en la matière.