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Justice, liberté, sécurité et immigration
Réunis à Amsterdam pour une informelle JAI, les ministres en charge de la sécurité intérieure et de l’immigration se sont penchés sur la manière de renforcer l’espace Schengen
25-01-2016 / 26-01-2016


Le 25 janvier 2016, le Vice-Premier ministre, ministre de la Sécurité intérieure, Étienne Schneider, et le ministre des Affaires étrangères et européennes, ministre de l’Immigration et de l’Asile, Jean Asselborn, ont participé aux volets Sécurité intérieure et Migration de la réunion informelle des ministres de la Justice et des Affaires intérieures (JAI) à Amsterdam.

"Les discussions ont été concrètes et constructives, aussi bien en ce qui concerne la migration que la sécurité intérieure", s’est félicité le commissaire en charge de la Migration, des Affaires intérieures et de la Citoyenneté, Dimitris Avramopoulos, lors de la conférence de presse qui a suivi la réunion informelle organisée par la Présidence néerlandaise du Conseil de l’UE. "Un effort concerté est nécessaire pour aider les gens dans le besoin, pour protéger nos frontières extérieures, pour éliminer la menace terroriste et pour garantir la sécurité des citoyens de l'UE", a-t-il encore dit.

Les questions de sécurité intérieure

Jean Asselborn, lors de la réunion informelle JAI du 25 janvier 2016Les ministres ont débattu de l’échange d’informations et de renseignements entre les États membres et Europol ainsi qu’avec Interpol dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. L’objectif de la présidence néerlandaise consiste à dégager des voies afin d’optimiser le partage d’informations en identifiant les facteurs légaux et opérationnels qui constituent une entrave à ces échanges.

Etienne Schneider s’est félicité que la Présidence néerlandaise assure le suivi de ce dossier qui a été initié sous Présidence luxembourgeoise. "Les services doivent travailler main dans la main pour protéger nos citoyens de la menace terroriste", a-t-il déclaré, selon ses propos repris dans un communiqué de presse du gouvernement. "Afin d’optimiser les instruments disponibles, le développement d’une approche standardisée pour l’utilisation des différentes bases de données existantes est primordiale", a-t-il encore dit.

La lutte contre la cybercriminalité, deuxième priorité de la présidence néerlandaise, a également fait l’objet des discussions entre les ministres.

En marge du Conseil, Étienne Schneider a participé à un débat portant sur les combattants terroristes étrangers.

"Afin de garantir la sécurité de nos citoyens et de réduire la menace terroriste, il est essentiel que les États membres utilisent les systèmes qui sont en place", a déclaré Dimitris Avramopoulos lors de la conférence de presse. Il a notamment évoqué la nécessité d’alimenter et d’utiliser pleinement les bases de données telles que le système d’information Schengen et les systèmes Europol.

Il s’est ensuite félicité de l’entrée en action du Centre européen de contre-terrorisme, intégré à la structure actuelle de l’agence Europol qui siège à La Haye (Pays-Bas), devant permettre de renforcer de manière significative le partage d'informations et la coordination opérationnelle entre les États membres, en se concentrant en particulier sur les combattants terroristes étrangers, le trafic d'armes à feu illégales et le financement du terrorisme. La Commission a également proposé de nouvelles règles pour les armes à feu, et une directive visant à criminaliser les déplacements, la formation et le financement de terroristes à travers l'Union, a-t-il encore dit, évoquant "des mesures concrètes qui peuvent faire une différence".

Migration

Renforcer l’espace Schengen

Dans la partie de la réunion informelle consacrée aux questions de migration, les ministres se sont penchés sur les moyens dont dispose l’UE pour renforcer l’espace Schengen, qui est, selon un communiqué du gouvernement luxembourgeois, "le fondement de la libre circulation des personnes et donc du modèle économique de l’Union européenne".

Les ministres ont abordé cette question dans le contexte de la gestion de la crise migratoire, l’objectif étant d’améliorer la protection et la gestion commune des frontières extérieures.

A cette fin, un grand nombre d’Etats membres, dont le Luxembourg, se sont exprimé en faveur de l’activation de l’article 26 du Code Frontières Schengen sur la procédure de prolongation du contrôle aux frontières intérieures, afin de remédier aux déficiences actuelles du contrôle des frontières extérieures.

Pour rappel, ce contrôle est limité à une durée de six mois, échéance qui, pour les premiers Etats membres ayant introduit un contrôle aux frontières dans le contexte de la crise migratoire (Allemagne et Autriche), devrait arriver à terme en mai 2016, ce qui ne va pas sans préoccuper certains Etats si la situation migratoire ne devait pas être maîtrisée. La possibilité de prolonger le contrôle aux frontières intérieures avait déjà été évoquée par les ministres lors du Conseil JAI du 4 décembre 2015. "Les ministres sont d’accord sur le fait que si des déficiences sérieuses, qui mettent en péril le fonctionnement de l’espace Schengen, sont constatées sur base de faits objectifs dans le cadre d’évaluations, alors il faudrait un cadre européen commun pour pouvoir continuer des contrôles à certains tronçons au-delà des 6 mois", avait alors déclaré Jean Asselborn, notant que cela nécessiterait une recommandation de la Commission.

"Nous avons donc invité la Commission à préparer une analyse légale pour continuer d’utiliser l'article 26", a annoncé le secrétaire d'État à la Justice néerlandais, Klaas Dijkhoff, indiquant que d'ici là, les États membres concernés devraient "coordonner les mesures" déjà en place.

Jean Asselborn a pour sa part souligné le 26 janvier 2015, sur les ondes de RTL, l’importance que dans ce contexte, la logique demeure celle de "solutions européennes".

 "Alors que des décisions importantes ont été prises en septembre de l'année dernière, et des promesses de mise en œuvre ont été faites, conformément aux valeurs européennes de solidarité et de responsabilité, nous nous retrouvons, plusieurs mois plus tard, avec plus de contrôles aux frontières intérieures, des décisions législatives douteuses à l’égard des demandeurs d’asile ou des réfugiés, moins de solidarité, moins de responsabilité et plus de décisions individuelles et non coordonnées", a pour sa part regretté Dimitris Avramopoulos.

Rappelant l’engagement de la Commission européenne pour soutenir les pays en difficulté,  pour coordonner les actions et pour offrir le savoir-faire nécessaire, le commissaire a signalé que la situation n’allait pas se résoudre d’elle-même via les documents et textes qui ont été adoptés sans que "TOUS les Etats membres tiennent TOUS les engagements pris". Il a notamment fait référence à la nécessité de mettre en œuvre "des hotspots entièrement opérationnels",  d’enregistrer correctement toutes les personnes, de produire des avancées rapides en ce qui concerne la réinstallation, de renforcer les capacités d’accueil en Grèce et le long de la route des Balkans occidentaux, d’assurer le retour des migrants qui n’ont pas le droit de rester, et de renforcer le contrôle et la gestion des frontières extérieures.

"La coopération au sein de l’UE est plus importante que jamais", a déclaré Klaas Dijkhoff, soulignant que la Présidence néerlandaise allait tout faire pour que les engagements qui ont été pris soient tenus.

Mieux protéger les frontières extérieures de l’UE

S’agissant du renforcement du contrôle et de la gestion des frontières extérieures, les ministres se sont penchés sur l’établissement et le rôle de la future Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes, dont la mise en place a été proposée par la Commission européenne le 15 décembre 2015 dans son paquet "Frontières" pour mieux protéger les frontières extérieures de l'UE. Celle agence consistera en un dispositif unique regroupant les autorités nationales et les agences européennes visant à soutenir les Etats membres dans leurs efforts de contrôler les frontières terrestres et maritimes.

"Pour maintenir la libre circulation au sein de nos frontières intérieures, nous devons mieux gérer nos frontières extérieures", a déclaré Dimitris Avramopoulos.

"Il y a un soutien clair pour le paquet Frontières de la part des Etats membres", a pour sa part indiqué  Klaas Dijkhoff. "Le Conseil estime que nous avons une responsabilité européenne commune pour protéger nos frontières, mais il est également clair que les Etats membres sont principalement responsables de la garde de leurs propres frontières externes", a-t-il précisé. Dans ce contexte, il a souligné la nécessité de "trouver le juste équilibre" entre gestion partagée des frontières extérieures et respect de la compétence primaire des Etats membres pour gérer leur partie de frontières communes. "Lorsque la pression extérieure devient trop élevée pour être gérée, les Conseils devraient avoir un rôle décisif et un mot à dire dans la procédure", a-t-il souligné. "Cette procédure devrait également être alignée avec le système d'évaluation Schengen existant", a encore dit le secrétaire d’Etat.

"Nous avons proposé, avec plusieurs Etats, que l’activation d’un tel corps de garde-frontières […] ne soit pas initiée par la Commission, mais par le Conseil, sur base d’un vote à majorité qualifiée", a précisé Jean Asselborn sur les ondes de RTL.

"L’exclusion d’un Etat de l’Espace Schengen constituerait le début de la fin", estime Etienne Schneider en prenant la défense de la Grèce qui est sous pression pour mieux contrôler la frontière extérieure de l'UE

"Le prolongement des contrôles aux frontières peut être défendu, mais l’exclusion d’un Etat de l’Espace Schengen constituerait le début de la fin", a déclaré Etienne Schneider le 26 janvier sur les ondes de Radio 100,7, en prenant la défense de la Grèce qui est sous pression pour mieux contrôler sa frontière avec la Turquie.

Parmi les voix les plus critiques envers la Grèce, figure celle de l'Autriche. La ministre autrichienne de l'Intérieur, Johanna Mikl-Leitner avait déjà évoqué "l’exclusion provisoire" de la Grèce de Schengen, l'accusant d'être en partie responsable de la situation, dans ses propos repris par l’hebdomadaire "Welt am Sonntag" le 23 janvier 2016. "C'est un mythe que la frontière gréco-turque ne peut pas être protégée, la marine grecque a suffisamment de capacités pour sécuriser cette frontière", a-t-elle déclaré le 25 janvier en amont de la réunion informelle. Si la Grèce n'agit pas, "la frontière extérieure de l'Europe va se déplacer vers l'Europe centrale", a-t-elle dit.

"Nous devons arrêter de pointer du doigt un pays et nous montrer plus disponibles en ce qui concerne la relocalisation des réfugiés", a souligné Etienne Schneider. "Nous savons tous que la Grèce est complètement débordée face à la situation actuelle. Au lieu de pointer Athènes du doigt, il faut plutôt contribuer à donner les moyens nécessaires à la Grèce pour qu’elle parvienne à gérer la situation", a déclaré le ministre luxembourgeois, regrettant que "comme souvent récemment" la solidarité dans l’UE fasse défaut.

"Il est impossible d’exclure un pays de l’Etat Schengen", a pour sa part déclaré Jean Asselborn, en qualifiant le débat sur l’exclusion de la Grèce de Schengen comme "illusoire". Il a souligné l’importance d’aider les pays qui ont des problèmes de mise en œuvre.

 De son côté, Athènes a souligné que le pays faisait tout ce qu'il pouvait pour répondre aux attentes. "Ce n'est pas vrai que l'identification des migrants ne marche pas", a assuré Ioannis Mouzalas, évoquant des "mensonges" répandus dans les médias, selon ses propos repris par l’Agence Europe dans son édition du 26 janvier. Le ministre a toutefois admis "que nous sommes en retard sur les hotspots". Ceux-ci seront toutefois opérationnels, "dans le pire des scénarios", à "la fin du mois de février", a-t-il garanti.

Le ministre adjoint grec des Affaires étrangères et européennes, Nikos Xydakis, a pour sa part signalé, dans ses propos repris dans un communiqué diffusé sur le site du gouvernement grec, que le renforcement du contrôle de la frontière extérieure ne devrait pas se faire au risque d’augmenter le nombre déjà grand de victimes sur cette route migratoire.