Principaux portails publics  |     | 

Parlement européen - Fiscalité
Le groupe GUE/NGL introduit une plainte contre la Commission européenne auprès de la CJUE au sujet des restrictions imposées aux eurodéputés de la commission TAXE dans l’accès aux documents sur les rescrits fiscaux
13-01-2016


Fabio De Masi, coordinateur du groupe de la Gauche unitaire européenne (GUE/NGL) au sein de la commission spéciale TAXE du Parlement européen, créée dans la foulée de l’affaire Luxleaks, a introduit le 13 janvier 2016 une plainte contre la Commission européenne auprès de la Cour de Justice de l’Union européenne. Selon un avis juridique commandité par le groupe politique, la Commission n’aurait pas suffisamment justifié les limitations et restrictions qu’elle a fixées aux eurodéputés de la commission TAXE dans l’accès aux documents du Conseil concernant les rescrits fiscaux et autres mesures similaires qui auraient aidé des entreprises multinationales à éviter de payer des milliards d’impôts.

Pour rappel, les révélations dites "Luxleaks", début novembre 2014, ont mis le Luxembourg en cause comme un moteur d’évasion fiscale pour de grandes multinationales (en raison des "tax rulings" ou "rescrits fiscaux" accordés par son administration), mettant en lumière la manière dont certaines entreprises exploitaient la concurrence fiscale entre les Etats membres de l'UE afin de réduire drastiquement leur contribution à l’impôt, parfois sous la barre de 1 % de leurs bénéfices. Elles ont provoqué un grand nombre de réactions, notamment au Parlement européen où une commission spéciale intitulée TAXE a été mise en place, sans être toutefois dotée des pouvoirs d’enquête que souhaitaient lui voir confier les groupes Verts/ALE et GUE/NGL.

Le mandat de cette commission spéciale est arrivé à terme le 30 novembre 2015. Une nouvelle commission spéciale, intitulée TAXE 2, a pris le relai le 2 décembre 2015 pour une durée de six mois. Parmi les raisons qui expliquent que le mandat de la commission a dû être prolongé, on trouve, dans le rapport adopté le 25 novembre 2015 le fait que "la Commission n'a pas non plus pleinement coopéré en n'envoyant pas tous les documents de séance et comptes rendus des réunions informelles sur le code de conduite, et en ne prévoyant qu'une procédure de consultation limitée en raison de l'intransigeance de certains États membres".

Le groupe GUE/NGL a introduit une plainte contre la Commission européenne auprès de la CJUE au sujet des restrictions imposées aux eurodéputés de la commission TAXE dans l’accès aux documents sur les rescrits fiscauxOr, d’après les auteurs de l’avis juridique, Andreas Fischer-Lescano et Nele Austermann, du Centre d’études juridiques et politiques de l’Université de Brême (ZERP), la Commission violerait le droit de l’UE en ne permettant l’accès à des documents comme les procès-verbaux du Groupe "Code de conduite (fiscalité des entreprises)" et en imposant aux parlementaires des restrictions dans l’accès aux documents.

"La Commission ne peut plus se cacher derrière des excuses comme le secret bancaire dans les Etats membres quand elle dissimule de grandes quantités d’informations politiques aux membres élus du Parlement européen", car les Etats membres n’ont "pas le droit de dire à la Commission quels procès-verbaux du groupe de travail du Conseil sur la fiscalité des entreprises elle peut rendre public ou non", explique Fabio De Masi dans un communiqué de presse diffusé à l’occasion du dépôt de la plainte. L’eurodéputé allemand dénonce le fait que les parlementaires n’ont eu accès à de nombreux documents qu’en salle de lecture, sans compter que les informations concernant presque la moitié des 28 Etats membres avaient été noircies par la Commission. Fabio De Masi déplore là encore plus de "cachotteries" qu’au sujet du projet d’accord de libre-échange entre UE et USA (TTIP).

"Il n’est pas question de confidentialité ou de contribuables individuels, mais d’un soutien politique systématique à un cartel de l’évasion fiscale qui coûte chaque année des centaines de milliards d’euros aux contribuables de l’UE", dénonce l’eurodéputé.

Miguel Viegas, rapporteur fictif du groupe GUE/NGL au sein de la commission spéciale a pour sa part souligné que cet avis juridique vient conforter les demandes répétées du groupe quant à l’accès à tous ces documents. De son point de vue, les rescrits fiscaux et les rapports pays-par-pays ainsi que les registres des propriétaires des entreprises écrans et de certaines  compagnies fiduciaires devraient être publics et leur accès ne saurait être conditionné au soi-disant "intérêt légitime".