En effet, ce sont deux traités qui devraient former après leur ratification le nouveau cadre légal de l’Union européenne : le traité UE, qui conservera son titre actuel, et le traité CE qui sera intitulé traité sur le fonctionnement de l'Union, l'Union étant dotée d'une personnalité juridique unique. (cf. page 15 des Conclusions de la présidence allemande)
Le Luxembourg voulait que la Charte des droits fondamentaux devienne juridiquement contraignante dès l’entrée en vigueur du nouveau traité. Les Britanniques émettaient à ce sujet des réserves formelles. Leur argument était qu’elle ne devait pas faire partie du droit britannique contraignant et ils ne voulaient donc pas la voir figurer dans les traités réformés. La solution adoptée est que la Charte des droits fondamentaux ne fait plus partie des traités. Elle y figure cependant sous forme de mention et sa valeur contraignante est reconnue, sauf pour la Grande-Bretagne, ce que le Luxembourg regrette.
Le Luxembourg voulait que l’Union européenne soit dotée d’une personnalité juridique. La solution trouvée à Bruxelles s’insère dans le contexte des deux nouveaux traités. La CIG adoptera la déclaration suivante: "La Conférence confirme que le fait que l'Union européenne a une personnalité juridique n'autorisera en aucun cas l'Union à légiférer ou à agir au-delà des compétences que les États membres lui ont attribuées dans les traités." (cf. page 19 des Conclusions)
Le Luxembourg voulait également que la dimension sociale soit vérifiée pour chaque initiative européenne. La clause sociale horizontale qui constituait une des innovations du traité constitutionnel sera insérée dans le traité. La même chose vaut pour la clause horizontale concernant les services d’intérêt général et les services publics.
Le poste d’un président permanent du Conseil européen est acquis. Le président européen dirigera le Conseil européen pendant deux ans et demi. La présidence tournante disparaît donc, ce qui assurera une plus grande continuité.
La nomination d’un ministre des Affaires étrangères de l’Union européenne en tant que chef de la diplomatie de l’Union européenne suscitait des réserves de la part des Britanniques. Le compromis qui a été trouvé crée le poste d’un "haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité". Il regroupe les fonctions du haut représentant pour la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) et du commissaire européen aux relations extérieures de l’Union européenne. Grâce à ce nouveau mandat, la politique extérieure européenne a pour la première fois un visage unique, même s’il ne porte pas le titre de "ministre des Affaires étrangères".
L’euro reste enraciné dans le traité, comme le souhaitait le Luxembourg. Il y aura un article 3bis qui dira : "L'Union établit une union économique et monétaire dont la monnaie est l'euro."
Le principe de la concurrence est maintenu dans le traité comme moyen pour permettre à l’Union européenne d’atteindre ses objectifs. Le marché intérieur comprendra "un système garantissant que la concurrence n'est pas faussée."
Une pierre de voûte de la construction européenne est pour le Luxembourg la primauté du droit européen. En ce qui concerne la primauté du droit de l'UE, la Conférence intergouvernementale (CIG) adoptera une déclaration rappelant la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne. L'article sur la primauté du droit de l'Union ne sera pas repris dans le Traité sur l’Union européenne, mais la CIG adoptera la déclaration suivante: "La Conférence rappelle que, selon une jurisprudence constante de la Cour de justice de l'UE, les traités et le droit adopté par l'Union sur la base des traités priment le droit des États membres, dans les conditions définies par ladite jurisprudence." En outre, l'avis du service juridique du Conseil (doc. 580/07) sera annexé à l'acte final de la conférence.
L’un des aspects les plus problématiques du Conseil européen était le futur système de vote pour les décisions à la majorité qualifiée au Conseil des ministres de l’Union européenne. Le projet de Constitution fixait à ce sujet le principe de double majorité, selon lequel les décisions requéraient une majorité de 55 pour cent des États membres représentant 65 pour cent de toute la population de l’Union européenne. Cette question a failli faire échouer le sommet. La Pologne émettait des objections et voulait même user de son veto. Selon les termes du Traité de Nice en vigueur, la Pologne et ses quelque 40 millions d’habitants disposent de 27 voix au Conseil. L’Allemagne qui compte près du double d’habitants dispose, elle, de 29 voix au Conseil. Le système de la double majorité entraîne une perte de voix au Conseil pour la Pologne et donne plus de poids à l’Allemagne.
Une solution a été trouvée qui prévoit que la double majorité n’entrera en vigueur qu’en 2014. En cas de litige, les pays pourront en outre se référer jusqu’en 2017 au Traité de Nice et exiger le report d’une décision qui leur déplaît.
En matière de subsidiarité, il a été décidé de renforcer les compétences nationales: s’ils jugent que des projets d’actes européens affectent leur compétence, les parlements nationaux disposeront désormais de huit semaines pour s’y opposer.
Le Parlement européen prendra à l’avenir les décisions concernant le budget de l’Union européenne à égalité de droits avec le Conseil des ministres.
Des pays comme la Grande-Bretagne peuvent se tenir à l’écart des décisions de l’Union européenne portant sur un renforcement de la coopération judiciaire et policière. (cf. page 25 des Conclusions) Ils peuvent aussi se tenir à l’écart de la politique commune dans le domaine de la politique sociale.
Si aucun accord n’est convenu en l’espace de quatre mois, les pays qui le souhaitent peuvent aller de l’avant.
Suites
Un nouveau traité doit être ratifié par tous les États membres d’ici les élections au Parlement européen de 2009, afin de permettre à l’Union européenne élargie de conserver sa capacité d’action. La future Présidence portugaise a déjà déclaré qu’elle voulait terminer la CIG chargée de produire le texte du nouveau traité en octobre 2007, afin que le processus de ratification puisse commencer dans les meilleurs délais.