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Traités et Affaires institutionnelles
Le DP s’exprime sur le traité modifié : "meilleur que le traité de Nice, mais pas un traité simplifié"
26-06-2007


Lors d’une conférence de presse qui s’est tenue le 26 juin 2007 à Luxembourg, le DP a pris, par les voix de Lydie Polfer, députée européenne, et de Charles Goerens, chef de sa fraction parlementaire, position sur les résultats du Conseil européen de Bruxelles.

Pour Lydie Polfer, l’espoir exprimé par le DP au cours de sa conférence de presse du 11 juin dernier qu’il n’y ait pas d’échec à Bruxelles s’est réalisé. "Il y a pourtant eu à Bruxelles une atmosphère particulière," a déclaré la députée européenne. "Beaucoup de méfiance l’un vis-à-vis de l’autre, et parfois beaucoup de méfiance à l’égard du projet européen. D’où aussi beaucoup de pas en arrière." Mais le DP se réclame d’une "approche équilibrée" à l’égard du "traité modifié".

Satisfaction mitigée sur le paquet institutionnel

L’ancienne ministre des Affaires étrangères qui sait comme son collègue Goerens qu’un accord à 27 est déjà une "performance" a exprimé sa satisfaction que le paquet institutionnel – nombre réduit des commissaires, président permanent du Conseil européen, un haut représentant pour les Affaires étrangères qui conserve les mêmes compétences que le ministre des Affaires étrangères européen du traité constitutionnel, la double majorité qui sera progressivement introduite entre 2014 et 2017, etc. - ait été repris dans ses grands traits. Elle regrette par contre que sur la forme, beaucoup de concessions aient dues être faites aux eurosceptiques dans l’Union – drapeau, hymne, titre de ministre des Affaires étrangères qui ont été laissé tomber – ce qui traduit pour elle une "certaine hypocrisie" à l’égard du projet européen.

Lydie Polfer a notamment évoqué l’attitude du gouvernement néerlandais qui a présenté le traité modifié à son opinion publique comme un tout autre traité pour avoir obtenu des compétences accrues pour les parlements nationaux qui s’opposeraient à des actes européens. Elle a aussi critiqué l’exemption du Royaume Uni pour lequel la Charte des droits fondamentaux n’aura pas de valeur contraignante et les possibilités d’opt-out du même Etat membre en matière de Justice et d’affaires intérieures, "ce qui a une signification négative pour le Luxembourg". Elle a finalement regretté que les plus grandes concessions aient été faites aux pays qui n’ont pas respecté leur signature sous le traité constitutionnel à Rome en octobre 2004.

Ecueils d’un processus de ratification

Lydie Polfer a ensuite dressé l’inventaire des écueils qui guettent le nouveau traité jusqu’à son entrée en vigueur prévue en 2009 avant les élections européennes.

Le premier problème est que si le mandat donné à la Conférence intergouvernementale (CIG) est bien précis, il reste néanmoins quelques points à discuter et à codifier de manière très précise aussi, alors que l’on veut aller très vite, puisqu’un Conseil européen extraordinaire est prévu à Lisbonne les 18 et 19 octobre 2009.

Le deuxième problème est que tous les Etats membres doivent avoir ratifié le traité modifié d’ici la fin de 2008. Certains pays, comme l’Irlande, la République tchèque ou la Pologne, ne savent pas encore s’ils vont procéder par référendum ou par ratification parlementaire. "Le chemin est encore long" pour un traité que Lydie Polfer estime être "meilleur que le traité de Nice", mais dont elle ne pense pas qu’il sera un traité simplifié, en attendant de découvrir le texte définitif en octobre prochain.

Problèmes d’image

Charles Goerens a de son côté estimé que les politiques réunis à Bruxelles n’ont pas tous utilisé "la fenêtre d'opportunité du Conseil européen pour se montrer du meilleur côté, de sorte qu’il faut redouter l’impact durable de leur comportement sur l’opinion publique." L’avenir montrera si le résultat de Bruxelles sera "efficace, durable et pertinent."

Le député libéral a estimé que la "dégradation de l’image de l’Union européenne dans le monde ne favorise pas sa position dans des négociations comme celles à l’OMC". Or, c’est sur les questions environnementales, sociales et de régulation des marchés internationaux que l’Union européenne est attendue dans le monde entier. L’Union européenne est un exemple que nombre de régions veulent imiter et on ne comprend pas qu’elle puisse "trébucher sur un problème de racine carrée". Goerens a lancé un appel à plus de cohérence politique en Europe : "Ce que les uns construisent ne doit pas être déconstruit par les autres."

Charles Goerens a ensuite jugé qu’il avait été "inapproprié de faire à l’Allemagne des reproches sur son passé", comme cela, s’est passé à Bruxelles. Beaucoup de pays ont fait selon lui moins que ce pays en matière de "Vergangenheitsbewältigung", notamment en ce qui concerne l’antisémitisme d’antan et d’aujourd’hui.

L’opinion publique et le débat sur le traité modifié

Un des enjeux essentiels est actuellement pour Charles Goerens l’opinion publique à laquelle l’importance de l’Europe et les bénéfices qui en découlent doivent être expliqués de manière cohérente. Dans le cadre de la discussion sur le traité modifié - qui "doit encore prouver s’il peut fonctionner" - "il faut réconcilier avec l’Europe les 44 % de citoyens luxembourgeois qui ont voté contre le traité constitutionnel le 10 juillet 2005, et ne pas décevoir les 56 % qui ont voté pour."

Charles Goerens : Un plaidoyer pour l’élargissement

Finalement, Charles Goerens a salué le fait que le traité modifié ouvrait la porte à de nouveaux élargissements, notamment dans les Balkans occidentaux, dont les perspectives avaient été bloquées durant deux ans.

Interrogé sur le fossé entre la volonté des politiques de faire avancer l’élargissement et l’opinion publique luxembourgeoise qui rejette selon le dernier eurobaromètre avec 68 % tout nouvel élargissement, Charles Goerens a répondu : "Si l’on avait demandé en 1957 aux Luxembourgeois de se prononcer par référendum sur l’adhésion de l’Allemagne au marché commun, l’issue de ce vote aurait été négative. Le vote aurait été en phase avec l’opinion publique, mais pas en phase avec l’histoire du continent. Si nous nous laissions gouverner par les sondages, ILRes pourrait prendre les décisions à notre place."

Il faut agir en matière d’élargissement selon l’intérêt général, a estimé le député libéral. Il est dans l’intérêt des Européens que l’on donne aux Balkans occidentaux une véritable perspective économique et sécuritaire, comme ce fut le cas avant pour la Hongrie, la Roumanie, la Bulgarie qui ont accepté par exemple lors du conflit dans les Balkans de faire des sacrifices – comme lors de l’embargo sur la Serbie - et de se réorienter complètement. "Il faut élargir et approfondir l’Europe. Depuis 1989, il n’y pas d’alternative à cette politique qui a en vue l’intérêt général, le long terme, le règne de l’Etat de droit et la création d’une communauté de destin dans un monde multipolaire."

Lydie Polfer : deux vues de l’élargissement, mais un traité avec des nouveautés

Selon Lydie Polfer, il y a toujours deux tendances parmi les Etats membres qui veulent l’élargissement. Les uns, sous le leadership du Royaume Uni, veulent l’élargissement d’une l’Union européenne qui devrait surtout devenir une immense zone de libre-échange. Les autres veulent élargir et approfondir l’Union européenne et créer une communauté de valeurs et de destin. Dans ce contexte, le Royaume uni avait tout intérêt à ce qu’une solution soit trouvée à Bruxelles, et elle a fini par peser elle aussi sur la Pologne. Mais de l’autre côté, le traité modifié stipulera qu’au-delà des critères de Copenhague, les nouveaux pays adhérents devront assumer non seulement l’acquis communautaire, mais aussi certaines valeurs fondamentales et sociales. Dans ce sens il y a ouverture, mais aussi fermeture à l’égard de certains pays qui pourraient prendre ce dernier aspect à la légère. C’était selon Lydie Polfer, tout le sens de l’intervention du président français Nicolas Sarkozy qui a rendu ainsi plus difficile l’adhésion d’un pays comme la Turquie tout en posant les jalons d’un approfondissement de l’Union européenne élargie.

Somme toute, l’issue du Conseil européen de Bruxelles est pour le DP, selon la formule de Charles Goerens, "une sortie de crise, mais qui est loin d’être euphorique."