Dans son discours consacré au processus de réforme du traité constitutionnel, le chef du gouvernement luxembourgeois s’est dit opposé à toute tentative de vider le futur traité des progrès substantiels inclus dans le traité constitutionnel.
"Ma disposition d’esprit est celle d’un homme qui n’acceptera pas que lors de cette nécessaire renégociation, tous les éléments de substance sur lesquels nous nous étions mis d’accord – qui furent des éléments de progrès en termes d’intégration – ne figureraient pas dans ce nouveau traité."
Pour Jean-Claude Juncker, le fait de ne plus mentionner dans le nouveau traité quels sont les symboles de l’Union européenne (drapeau, hymne) ne pose pas problème.
Par contre, le Premier ministre luxembourgeois ne voit pas pourquoi les États européens devraient renoncer à faire de la charte des droits fondamentaux une partie contraignante du nouveau traité.
"On ne peut pas expliquer à la planète entière les règles de bonne gouvernance et lorsqu’il s’agit de mettre sur papier – ce que nous avons fait – les règles qui conditionnent la vie entre les hommes et surtout la vie entre les nations et donc les peuples d’Europe, retirer cette avancée sur laquelle nous nous étions mis d’accord. Que les citoyens d’Europe, puisque l’Union européenne est aussi une communauté de droit, puissent invoquer le catalogue et le canon de droit à l’encontre et à l’égard de l’Union européenne lorsqu’ils ont l’impression que ces droits sont insuffisamment respectés, voilà tout de même une avancée en termes de maturité démocratique dont je ne voudrais pas que nous y renoncions."
S’il s’avérait impossible de garder la charte en l’état, le Premier ministre se prononce en faveur d’une référence à cette charte à inclure dans la première partie du traité qui obligerait les États membres de la publier dans tous les journaux officiels nationaux, garantissant ainsi son caractère légal contraignant.
Pour ce qui est de l’équilibre institutionnel, Jean-Claude Juncker a mis en garde les pays qui voudraient remettre cet équilibre en question: "Si nous revenions au principe de la double majorité, nous ouvririons la boîte de Pandore que nous serions incapables de refermer. Ce principe de la double majorité combine la dignité des États membres et le fait démographique auquel on ne peut pas échapper."
Le Premier ministre a poursuivi: "Retenons tout de même dans cette troisième partie celle qui reflète les politiques qui sont celles de toujours, et ne jetons pas aux oubliettes les éléments de progrès que la négociation a fait naître. On ne peut tout de même pas contester que nous avons besoin d’une autre base légale pour la politique extérieure et de sécurité commune. On ne peut pas contester à l’Europe le droit de se doter d’une base légale suffisamment large en matière de politique énergétique, y compris sa dimension extérieure. Respectons tout de même les quelques progrès que nous avons su réaliser sur les Affaires intérieures et la justice. Acceptons tout de même que l’Europe est là pour lutter contre la criminalité transfrontalière, et n’acceptons plus cette réalité que les gangsters soient les seuls à avoir compris la logique du marché intérieur dans son intégralité. Mais faisons en sorte que les polices et les États, en œuvrant ensemble, puissent résister à un aspect d’insécurité qui, aujourd’hui, est attribué quant à sa responsabilité première à l’Europe, alors que l’Europe ne se dote pas des moyens pour faire en sorte que le premier des droits des citoyens – le droit à la sécurité – soit réalisé par l’Union européenne."
Jean-Claude Juncker a en outre insisté pour que les avancées "minimales" en matière de politique sociale soient préservées dans le nouveau traité, quoique des ambitions plus relevées soient nécessaires.
Le Premier ministre a appelé de ses vœux que les dispositions en matière de subsidiarité soient "intégralement repris dans le nouveau traité".
Jean-Claude Juncker s’est enfin prononcée en faveur d’un mandat clair et limité pour la conférence intergouvernementale sous présidence portugaise qui permette de clore les négociations sur le nouveau traité vers la fin de l’année en cours.