La plate-forme syndicale de la Grande Région est le lieu de rassemblement des organisations membres de la Confédération européennes des syndicats (CFDT/UNSA, CFTC, CGT-L (composé du OGB-L et de la FNCTTFEL), CSC, DGB-Saar, FGTB, FO, LCGB). Il s’agit d’une structure intersyndicale qui œuvre en faveur d’un développement économique et social de la Grande Région, pour le progrès social et dans le respect des droits économiques, sociaux, politiques des travailleurs et des 11 millions d’habitants de la Grande Région.
Paupérisation de tranches de plus en plus larges de la population, délocalisations d’entreprises, dumping social, flambée du prix des loyers. Pour faire face à ces multiples défis et assurer un développement de la Grande Région, les syndicats de la Grande Région réunis le 23 janvier 2008 ont adopté une résolution commune qui sera présentée le 13 février au cours du 10e sommet de la Grande Région, à la présidence belge. Lors de la conférence de presse qui s’est déroulée à Arlon, Jean-Claude Reding, le président de l’OGB-L, a également présenté les priorités qui sont inscrites sur l’agenda de la Présidence luxembourgeoise qui prendra la relève du voisin belge, le 1er février 2008.
Anne-Marie Dory, présidente de la Plate-forme syndicale a brossé un tableau de la situation économique et sociale de la Grande Région. Dans son analyse, elle a relevé des défis majeurs qui figurent au centre de la déclaration : une pauvreté galopante qui touche de plus en plus de gens, le dumping social et l’écart de plus en plus visible entre les salaires.
Le territoire de la Grande Région compte 190.000 travailleurs transfrontaliers. Les citoyens de la Grande Région sont confrontés à des salaires qui stagnent et un pouvoir d’achat qui se réduit. En cause sont essentiellement la hausse des loyers, du prix de l’électricité et des biens de première nécessité. "Le Grand-Duché de Luxembourg, ‘pays de cocagne’, n’échappe pas à ce phénomène", a tenu à préciser Anne-Marie Dory.
En même temps, elle a pointé vers l’écart important qui existe entre les salaires des travailleurs de la Grande Région. "On ne peut pas traiter sur un pied d’égalité un couple belge qui vit et qui travaille en Belgique et un couple qui vit sur le territoire belge et travaille au Luxembourg", a-t-elle estimé. Autre phénomène auquel est confrontée la Grande Région : la flambée des prix dans le secteur de l’immobilier. Dans les conditions actuelles, "acquérir une maison devient quasi impossible pour la plupart des gens", a-t-elle déclaré.
La présidente de la plate-forme syndicale s’est également montrée préoccupée par les disparités qui existent entre les niveaux de sécurité sociale et fiscale. Une pratique de plus en plus courante consiste, selon elle, à contourner la législation du pays d’origine en transférant l’activité sur une région voisine. "Ces contrats ne respectent ni les règles nationales ni européennes, engendrent une concurrence déloyale et conduisent à une précarisation des conditions de travail", a-t-elle expliqué.
Interpellée par ces problématiques, la plate-forme syndicale de la Grande Région (PSGR) préconise dans sa déclaration commune une coopération accrue afin de combattre les cas de dumping social, s’engage en faveur de la revalorisation des services publics et pour obtenir un réseau plus efficace des transports en commun.
Dans le document, les responsables syndicaux revendiquent également des institutions de coopération plus efficaces (renforcement du réseau du médiateur), un soutien financier plus soutenu (développement de la maison de la Grande Région, un financement durable de l’Observatoire interrégional du marché de l’emploi, un budget plus autonome pour la Grande Région), une meilleure définition des interlocuteurs au niveau régional ainsi qu’un engagement ferme des régions en faveur d’une plus forte coopération.
Les syndicats appellent aussi de leurs vœux un échange de vues entre la PSGR et les responsables de la Grande Région sur le "Rapport sur la situation économique et sociale de la Grande Région".
A partir du 1er février 2008, le Luxembourg assurera la présidence de la Grande Région pour 18 mois et prendra la relève de son voisin belge. En vu de cette échéance, Jean-Claude Reding a présenté les priorités qui ont été définies par le Luxembourg. Il a exigé un investissement important de la future présidence "car le gouvernement luxembourgeois a une responsabilité particulière et doit montrer, après 18 mois, que des progrès ont été accomplis en matière sociale".
Pour Jean-Claude Reding, président de l’OGB-L, le tableau qu’Anne-Marie Dory a brossé "est assez éloquent pour la situation sociale de la Grande Région". Face au dumping social et à la dégradation de la situation économique, il préconise un renforcement des droits des travailleurs.
Suppression d’emploi à Gandrange, délocalisation de l’usine Nokia de Bochum avec des répercussions immédiates sur l’imprimerie luxembourgeoise Victor Buck…La Grande Région n’échappe pas au phénomène de la globalisation. L’exemple de Nokia est selon Reding un exemple pertinent qui illustre l’interdépendance qui s’est établie entre les différentes régions.
D’où un besoin de plus en plus important de mettre la coopération dans la Grande Région, "au premier plan", a-t-il précisé "au lieu de se concurrencer". Pour le président de l’OGB-L, la Grande Région, a un énorme potentiel et pourrait être un laboratoire pour développer la dimension sociale".
Dans ce contexte, il a cité le "clustering", qui consiste à favoriser la collaboration entre différents pôles d’excellence économiques ou en matière de recherche et de formation. Jean-Claude Reding a estimé qu’il faut parler d’une seule voix et développer une vision globale pour le déploiement de la Grande Région.
En matière d’emploi, il a plaidé en faveur d’une meilleure reconnaissance des diplômes,"surtout dans l’élaboration des conventions collectives de travail".
L’aménagement du territoire ne doit, selon Reding, pas se limiter sur un territoire national, mais doit, pour être réellement efficace, se réaliser sur un territoire plus large.
Malgré les problèmes qui existent en Grande Région, les intervenants ont estimé qu’elle a "a un potentiel énorme en matière de recherche, d’innovation et d’enseignement supérieur". "Nous voulons une vraie politique de développement qui repose sur des choix établis en fonction des acquis sociaux, économiques et culturels. Et ceci en concertation avec les partenaires sociaux et les citoyens", a insisté Anne-Marie Dory. "Nous n’attendons pas un miracle de cette déclaration commune, mais l’essentiel est qu’on ait été écouté", a dit Anne-Marie Dory.