A la mi-décembre, la Commission a décidé de poursuivre sa réforme de la Politique agricole commune en proposant d’augmenter les quotas laitiers de 2 % à partir de la période 2008/ 2009 et de les supprimer d’ici 2015. Le 6 février 2008, Fernand Boden, ministre de l’Agriculture, de la Viticulture et du Développement explique dans une réponse au député socialiste Roger Negri, la position que le gouvernement luxembourgeois entend défendre au sein du Conseil des ministres, les conséquences de cette proposition pour le secteur laitier du Grand-duché et les mesures qui seront prises au Luxembourg pour préparer le secteur laitier à une surpression du système des quotas laitiers d’ici 2014.
La Commission européenne a décidé de poursuivre sa réforme de la Politique agricole commune, avec pour objectif de faire face à la flambée des cours dans le monde due à une augmentation de la demande mondiale dans ce secteur. Ainsi, revenant sur une politique établie il y a plus de 40 ans, et après une première réforme en 2003, Bruxelles a proposé le 12 décembre 2007, d'augmenter de 2 % les quotas laitiers à partir de la période 2008/2009. Cette augmentation des quotas, qui atteindra 2, 84 millions de tonnes, sera répartie équitablement entre les vingt-sept Etats membres, à compter du 1 avril 2008. La suppression totale du système des quotas laitiers, qui selon Mariann Fischer Boel, a perdu de sa légitimité, est prévue pour 2015.
Dans ce contexte, Roger Negri a posée les questions suivantes au Ministre de l'Agriculture, de la Viticulture et du Développement, Fernand Boden :
Le Gouvernement luxembourgeois entend appuyer la proposition de la Commission même s'il est d'avis que l'instrument d'une augmentation graduelle des quotas laitiers ne doit pas rester le seul instrument à utiliser en vue de préparer les exploitations laitières à la suppression du régime des quotas laitiers en 2015.
Pour le Grand-Duché de Luxembourg, la proposition de la Commission se traduirait par une augmentation de 5.461.680 kg du quota national, augmentation qui serait répartie sur les producteurs individuels suivant des critères restant à définir.
Quant aux autres instruments devant, de l'avis du Gouvernement luxembourgeois, être mis en place au niveau communautaire dans un laps de temps assez bref en vue d'assurer une transition harmonieuse de l'actuel régime des quotas laitiers vers un régime sans quotas, il y a lieu de citer:
Ces instruments obtiennent la très nette préférence par rapport à celui d'une augmentation graduelle des quotas laitiers parce qu'ils permettent aux producteurs de lait de mieux pouvoir répondre aux besoins du marché à court terme, d'une part, et de s'adapter de façon plus circonstanciée à la libéralisation du marché du lait et des produits laitiers en 2015, d'autre part. Une diminution marquée du montant du prélèvement entraînerait, par ailleurs, sur le plan national une baisse substantielle du prix des quotas laitiers payés en cas de transfert et contribuerait ainsi à stimuler le processus de restructuration du secteur laitier toujours indispensable pour préparer les exploitations laitières de manière efficace à la suppression des quotas laitiers.
De l'avis du Gouvernement, les producteurs de lait doivent bien se préparer sur un tel avenir étant donné que la Commission européenne n'a laissé aucun doute qu'elle est fermement décidée à ne plus présenter au Conseil CE de proposition de reconduction du régime des quotas laitiers au-delà du 31 mars 2015. Or, il importe de souligner dans ce contexte, qu'en l'absence d'une telle proposition, le régime des quotas laitiers expirera en 2015. En outre, il faut remarquer qu'une proposition de reconduction du régime des quotas au-delà de son échéance actuelle n'obtiendrait plus le soutien requis au sein du Conseil CE. Il résulte des considérations qui précèdent qu'une stratégie du maintien de l'actuel régime au-delà du 31 mars 2015 mène dans le vide.
Au stade actuel, il est difficile de prédire avec exactitude les conséquences que comporterait la suppression du régime des quotas laitiers pour les producteurs luxembourgeois.
En premier lieu, il importe d'observer que la production laitière détient une place prédominante dans l'agriculture luxembourgeoise compte tenu du manque d'alternatives à cette production, le Luxembourg étant une zone herbagère (« Grünlandstandort ») se prêtant particulièrement pour ce type de production. Cette prédominance ne se trouvera certainement pas mise en cause par l'abolition du régime des quotas laitiers en 2015. L'on ne peut certes pas nier que, pour certains producteurs, cette suppression comporterait vraisemblablement l'abandon de la production laitière du fait qu'ils sont déjà actuellement confrontés à toute une série de limitations au niveau de leurs moyens de production (âge avancé, succession non assurée, étable vétuste, moyens financiers modestes) et qu'il est dès lors fort probable qu'ils seraient obligés d'anticiper l'abandon de la production laitière au cas où le régime des quotas laitiers n'était plus prolongé.
Par contre, pour de nombreux autres producteurs, la suppression du régime des quotas laitiers ouvrirait de nouvelles perspectives de développement du fait qu'ils seraient enfin en mesure, après plus de trente années d'attente, d'utiliser pleinement leur potentiel de production. Il va sans dire que ce groupe de producteurs, fort important au Luxembourg, tirerait nettement profit d'une suppression du régime des quotas laitiers, les avantages que comporterait l'abolition dudit régime l'emportant très nettement sur les inconvénients éventuels. Tout ceci se trouve confirmé par le fait qu'une part de 94% du quota national disponible est détenue par les producteurs âgés de moins de 55 ans. Dans ce même contexte, il convient de ne pas négliger le fait que les prix payés aux producteurs après l'abolition des quotas laitiers vont certainement diminuer par rapport aux prix actuels qui sont de l'ordre de 50 cts/kg.
Quant aux mesures à prévoir sur le plan national d'ici 2015 en vue de préparer les producteurs à un atterrissage en douceur, il importe de signaler, en premier lieu, qu'il est impératif pour les producteurs qu'ils ne procèdent plus à l'achat de quotas supplémentaires à des prix élevés. Grâce à un régime de transfert flexible des quotas entre producteurs, d'une part, et à un mécanisme d'abaissement progressif du montant du prélèvement à payer en cas de dépassement du quota (mécanisme à mettre en place au niveau communautaire), d'autre part, il devrait être possible de parvenir à cette fin. En second lieu, il est indiqué d'encourager les producteurs souhaitant procéder à des investissements dans le secteur laitier, à anticiper lesdits investissements et à ne pas attendre l'issue du régime des quotas laitiers pour ce faire de sorte à ce qu'ils puissent pleinement profiter des nouvelles potentialités et des structures de production améliorées dès le moment où le régime des quotas laitiers aura touché à sa fin. La nouvelle loi agraire devrait contribuer à réaliser cet objectif.
D'une manière générale l'on peut dire que la suppression du régime des quotas laitiers en 2015 ne mettra pas dans l'embarras les producteurs de lait luxembourgeois. En effet, beaucoup d'entre eux ont pu se doter dans le passé d'un outil de production apte à faire face aux défis qui les attendent à l'échéance du régime; d'autres vont pouvoir le faire au fil des sept années qui nous en séparent. En utilisant pleinement toutes les potentialités disponibles les producteurs souhaitant continuer la production laitière au-delà du 31 mars 2008 pourront ainsi entrevoir leur avenir avec confiance.