Quel est l’état d’avancement du secteur des télécoms au cours de l’année 2007 ? Le 13e rapport d’avancement de la Commission, rendu public le 20 mars 2008, dresse un bilan des forces et des faiblesses du cadre réglementaire en vigueur. Il illustre selon Viviane Reding que la libéralisation du secteur des télécommunications dont les jalons ont été posés en 1988, est une véritable" success story".
En témoignent selon Viviane Reding, surtout les performances qui ont été enregistrées dans le domaine des télécommunications électroniques. Le secteur des télécoms, qui est un facteur essentiel de la croissance dans tous les autres secteurs économiques, a généré en 2007 un chiffre d’affaires de 300 milliards d’euros, soit 2 % du PIB européen. Depuis 2002, les investissements dans ce secteur ont augmenté progressivement et représentent aujourd’hui 50 milliards d’euros, un chiffre qui est équivalent à celui des Etats-Unis.
Autre réussite européenne : la forte croissance du haut débit. En juillet 2007, 8 Etats européens (le Danemark, la Finlande, les Pays-Bas, la Suède, le Royaume-Uni, la Belgique, la France et le Luxembourg dépassent les Etats-Unis en matière de pénétration du haut débit. En peloton de tête figurent depuis juillet 2007 le Danemark et les Pays-Bas avec un taux de pénétration supérieur à 30 %. En 2007, 19 millions de nouvelles lignes à haut débit ont été ouvertes en Europe, ce qui correspond à plus de 50 000 ménages par jour.
Dans le secteur des communications mobiles, la concurrence s’est développée et la pénétration a continué à augmenter. Le taux de pénétration est passé de 103, 2 % en 2006 à 111, 8 %, en 2007. Les consommateurs optent de plus en plus pour la téléphonie mobile au détriment de la téléphonie vocale fixe dont les recettes ont baissé de 5 % par rapport à 2006. La troisième génération (G3) de la téléphonie mobile a décollé. Le règlement sur l’itinérance (roaming) qui est entré en vigueur le 30 juin 2007 a entraîné une réduction de prix allant jusqu’à 14 % et a permis à 12 millions de clients de changer plus facilement d’opérateur en 2007.
"La concurrence ne fonctionne pas", tel est le constat que Viviane Reding a porté sur le marché des connexions à haut débit où les opérateurs historiques détiennent toujours plus de 46 % des lignes à haut débit. Le même constat vaut également pour l‘accès au réseau fixe qui est encore fourni par l’infrastructure de l’opérateur historique pour 86,5 % des clients.
Autres critiques formulées par Viviane Reding : les grands opérateurs de l’UE ne réalisent que 30 % de leur chiffre d’affaires hors de leur marché national, alors que les technologies de l’information ignorent par définition les frontières. Les tarifs de terminaisons d’appels varient fortement selon les Etats membres - le tarif le plus élevé est 10 fois plus élevé que le tarif le plus bas. Les délais pour changer d’opérateur varient fortement en fonction des Etats membres. En Irlande et à Malte un jour suffit pour changer d’opérateur mobile, mais il en faut jusqu’à 20 en Italie et en Slovaquie.
Viviane Reding a ensuite évoqué la situation du Luxembourg, d’abord du côté lumière. La 7e position européenne que le pays occupe avec ses 25,9 % de pénétration du haut débit est significative. Avec une pénétration de la téléphonie mobile de 146 %, avec des opérateurs qui ont joué dès juillet 2007 la carte de la baisse des tarifs du roaming, avec les télécoms qui touchent 100 % de la population et le câble qui touche 80 % des gens, avec une portabilité des numéros mobiles qui peut se faire en 4 jours, le Luxembourg se situe nettement au-dessus de la moyenne européenne.
Le chiffre d’affaires des télécoms au Luxembourg est avec 430 millions d’euros sur un chiffre d’affaires européen global de 300 milliards plus qu’honorable selon la commissaire européenne. La même chose vaut pour les investissements, où sur les 50 milliards d’euros d’investissements en Europe, 91,5 millions d’euros ont été investis a Luxembourg, dont 64 millions dans la téléphonie fixe et 27,5 millions dans la téléphonie mobile. Les problèmes avec la réglementation ont été résolus, comme aussi celle de l’absence d’analyses de marché. L’Institut luxembourgeois de régularisation a fait selon Reding "un bon travail" avec ses seulement 45 collaborateurs. Le Conseil de la concurrence par contre est pour Reding trop faiblement étoffé avec 4 personnes qui y travaillent.
Du côté ombre, la commissaire Reding a regretté la quasi-absence de concurrence sur la téléphonie fixe, et donc la dominance de l’opérateur historique P&T : "Rien ne va sans la poste.» Conséquences de cette situation : l’accès d’autres opérateurs aux lignes est difficile ; les loyers pour les lignes fixes sont deux à trois fois plus chers que la moyenne en Union européenne. Les procès intentés par les nouveaux entrants suite à cette situation ont dans un premier temps conduit pour Reding à un environnement marqué par " l’insécurité juridique".
Un regret de la commissaire : même lors de ses rencontres avec les petits opérateurs de la téléphonie mobile, lors du congrès mondial de la téléphonie mobile à Barcelone en février 2008, elle n’a pu rencontrer des représentants des opérateurs luxembourgeois.
Autre souci : la Commission a mis en cause l’indépendance réglementaire quand l’Etat, copropriétaire de l’opérateur historique, a placé des hauts fonctionnaires dans les organismes dirigeants des organes régulateurs. Après une plainte déposée par la Commission auprès de la Cour de Justice des Communautés européennes et une série de réunions de conciliation avec le gouvernement luxembourgeois, la commissaire a estimé qu’elle a été entendue et qu’une solution sera bientôt trouvée qui permettra à la Commission de retirer sa plainte.
Pour 2009, la commissaire s’est fixé de nouveaux objectifs : que la moitié des Etats membres de l’Union européenne soient des champions mondiaux en matière de pénétration du haut débit, que le délai pour la portabilité des numéros de téléphonie mobile soit réduit à un seul jour, que la régulation s’améliore en Union européenne de manière telle que les petits opérateurs "ne soient pas pressés comme un citron par les grands".