Le 2 juillet 2008, la Commission européenne a présenté à Luxembourg en même temps qu'à Bruxelles un ensemble d’initiatives qui sont censées refléter "un nouvel engagement en faveur de l'Europe sociale".
La démarche choisie est intégrée et conjugue diverses politiques dans un contexte politique bien spécifique que Georges Kientzele, chef d’unité à la DG "Emploi, affaires sociales et égalité des chances" a défini de la manière suivante : Il y a un acquis social en Europe dans les domaines de la santé, de l’éducation et de la politique sociale sur lequel "il faut garder le cap". La Commission doit néanmoins réagir à certaines critiques qui viennent aussi du Luxembourg après certains parmi les derniers arrêts de la Cour de Justice. Elle table donc un agenda à un moment précis, c’est-à-dire un an avant les élections européennes, qui seront importantes pour la constitution des majorités politiques qui influeront sur la codécision entre Conseil et Parlement européen. Elle a également en vue de trois présidences de l’Union européenne, dont celles de la France et de la Suède, deux pays à modèle social de très haut niveau, qui veulent parler de l’Europe sociale.
Cet agenda n’implique pas pour la Commission une révision des finalités de l’agenda social européen - à savoir "des sociétés harmonieuses, fondées sur la cohésion et l'inclusion, qui respectent les droits fondamentaux et s'inscrivent dans des économies de marché saines" - mais un réexamen de ses moyens.
Pour ce paquet qui se compose de 19 initiatives dans les domaines de l'emploi et des affaires sociales, de l'éducation et de la jeunesse, de la santé, de la société de l'information et des affaires économiques, Georges Kientzele a identifié 7 actions prioritaires :
A cette fin, la Commission veut soutenir les Etats-Membres pour qu’ils modernisent leurs systèmes d’éducation, pour que des objectifs visant à la réduction de la pauvreté chez les enfants soient fixés, pour que les principaux droits des enfants soient garantis et qu’une action en faveur de la santé des enfants et des jeunes soit entreprise.
La Commission voudrait développer une nouvelle stratégie pour l’emploi et les qualifications qui passerait par une mise en œuvre de la "flexi-curité". Elle veut aussi soutenir les partenaires sociaux dans la gestion du changement. Une directive concernant le comité d’entreprise européen, des Accords transnationaux au niveau des entreprises et un recours au Fonds Social Européen sont prévus. Elle prône le développement et la révision des mécanismes d’aide directe aux salariés mis au chômage en raison de la mondialisation (Fonds européen pour la Mondialisation) et insiste sur l’intégration des immigrés et de leurs enfants, car ne pas les intégrer signifie que la pauvreté les guettera.
Le coup de pouce à la mobilité passerait par une directive concernant les droits des patients aux soins de santé transfrontaliers, l’organisation en octobre 2008, d’un Forum sur les droits sociaux et la mobilité de la main-d'œuvre, la mise en circulation d’une carte de santé électronique, des actions en faveur de la mobilité des chercheurs, des entrepreneurs, des jeunes volontaires et des immigrés, ainsi que la reconnaissance mutuelle des qualifications.
Il s’agira ici de tenir plus compte des besoins de la population vieillissante, mais aussi de veiller à la durabilité des finances publiques. De ce fait, et cela est une urgence à moyen terme, une stratégie pour la modernisation des systèmes de protection sociale devra être développée dans tous les pays de l’Union. Réduire les inégalités dans l’accès aux soins de santé, veiller à plus de sûreté pour le patient et à la qualité des services en soins de santé, investir dans la santé des travailleurs et recourir plus aux technologies de l’information et de la Communication (TIC) pour améliorer la vie des personnes âgées sont d’autres axes d’action.
78 millions d'Européens risquent d’atteindre le seuil de pauvreté. Pour un grand nombre d’entre eux, il reste des barrières pour accéder à un emploi, à une formation, à un logement et aux soins de santé. D’où la nécessité d’une politique d’inclusion active, avec des aides au revenu, éventuellement un programme d’aide alimentaire, avec aussi une stratégie qui visera à en finir avec le "clivage numérique" ("Digital divide"). Il faudra dans ce contexte développer des services sociaux engagés, notamment au niveau des collectivités territoriales et locales
Un autre axe est l’application des législations contre la discrimination basée sur la croyance, le handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle. Autre constat : les Roms, qui sont plus de 10 millions, sont aussi une des plus grandes minorités ethniques de l'UE, pourtant ils font face à une discrimination étendue. La Commission s’est engagée à améliorer leur inclusion. Elle se propose de faire avancer la directive contre la discrimination, d’établir avec les Etats membres une "Feuille de route" sur l’égalité des genres, de favoriser des mesures qui permettent la réconciliation entre vie privée et vie professionnelle, que les femmes s’établissent plus souvent en Union européenne comme indépendants, que des aides aillent aux épouses qui aident les indépendants dans leurs entreprises et qui réduisent la différence de salaires entre les sexes.
L'industrie et le commerce se développent à travers des frontières dans le marché unique. La Commission voudrait que les autorités politiques s’assurent qu’il en soit de même pour les accords sur l’emploi et le travail. Autre dimension : Le transport maritime fonctionne dans le monde entier. La Commission veut s’engager pour des normes minimum globales pour la santé et la sécurité en mer.
Tout ce paquet a été pensé pour que "les Européens puissent faire face à des réalités en mutation rapide – façonnées par la mondialisation, le progrès technologique, le vieillissement des sociétés – et à des évolutions, telles que l'augmentation récente des prix des denrées alimentaires et du pétrole et les remous sur les marchés financiers."
Dans le contexte du différend sur la transposition par le Luxembourg de la directive sur le détachement des travailleurs qui a opposé Commission et gouvernement luxembourgeois qui a été tranché par la CJCE en défaveur du Luxembourg, et du débat sur la directive sur la directive sur le temps de travail, Kientzele a exposé plusieurs points :
Kientzele confirma qu’il y avait "un retour du social dans le politique" en Europe et qu’il y avait "au moins un constat de malaise". En même temps, il déclara qu’on "est actuellement et jusqu’à la fin de la Présidence suédoise qui finira en décembre 2009 dans un contexte politique favorable pour créer des paquets qui feront avancer en de nombreux points l’agenda social."
Kientzele a rappelé que "les actions dans le domaine social incombent essentiellement aux États membres et doivent être mises en place au plus près du citoyen, aux niveaux national, régional et local."
La Commission se propose donc, dans le respect de la subsidiarité, de mobiliser une combinaison d’instruments pour atteindre les objectifs définis dans l’agenda social renouvelé: