Luxembourg-Ville, vers 17h00. Peu à peu, des milliers de personnes commencent à sortir de leurs bureaux et à se ruer vers les bus, les trains ou leurs voitures pour rentrer le plus vite chez eux. A 18h15, les derniers sortants se retrouvent presque seuls dans les rues du centre-ville. C’est le scénario comme il se déroule tous les soirs dans la capitale du Luxembourg.
Les quelques 140 000 frontaliers français, belges et allemands, qui viennent travailler quotidiennement à Luxembourg, ne semblent pas avoir une très grande envie d’explorer la ville pendant leur temps libre. Afin de remédier à ce manque d’intérêt et pour stimuler l’échange entre frontaliers et habitants du Luxembourg, les responsables politiques et culturels ont développé une initiative qui innove : la Fête des frontaliers, qui sera organisée par le Ministère de la Culture, en coopération avec l’Abbaye de Neumünster et en partenariat avec la Ville de Luxembourg. La première édition de cette fête aura lieu à Luxembourg-Ville et à l’Abbaye de Neumünster le 26 septembre 2008 à partir de 17h00. L’initiative a été présentée au cours d’une conférence de presse le 9 juillet 2008.
Selon Octavie Modert, secrétaire d’Etat à la Culture, l’idée d’organiser une fête des frontaliers est née dans le cadre de l’Année européenne du dialogue interculturel 2008, pour laquelle le Luxembourg avait fixé trois priorités, parmi lesquelles l’amélioration de la relation entre les habitants du Luxembourg et les frontaliers.
"L’idée était de faire quelque chose qui soit vraiment adaptée à nos réalités luxembourgeoises. Il est clair que notre situation est bien différente de celle d’autres pays européens", a-t-elle expliqué. Aux yeux d’Octavie Modert, les relations entre les habitants du Luxembourg et les frontaliers laissent beaucoup à désirer. "Nous nous rencontrons, nous nous côtoyons, mais nous ne nous parlons pas", a regretté la secrétaire d’Etat. Pour elle, il est essentiel que ce dialogue entre habitants du Luxembourg et frontaliers doit se faire dans des conditions détendues, et non dans un cadre officiel et tendu.
D’après Octavie Modert, un autre but consiste également à montrer aux frontaliers que la Ville de Luxembourg n’est pas seulement une "métropole régionale d’un point de vue économique", mais qu’elle est également attractive du point de vue de la culture ou des loisirs. Enfin, la secrétaire d’Etat espère que la Fête des frontaliers permettra de renforcer un sentiment d’appartenance régional transfrontalier de la Grande Région.
Même son de cloche de la part de l’échevin de la Ville de Luxembourg, Xavier Bettel. "Le Luxembourg n’est pas qu’un bureau qu’on fuit à six heures du soir, mais c’est aussi un lieu de détente, de plaisir et de la culture", a-t-il insisté. Il a regretté que la grande majorité des frontaliers ne ressentent pas plus d’envie à explorer la vie citadine. Il a rappelé que chaque jour, la population de la Ville de Luxembourg se voit grossie de quelques 140 000 frontaliers, dont 68 000 Français, 36 000 Belges et 33 000 Allemands.
Aux yeux du directeur de l’Abbaye de Neumünster, Claude Frisoni, l’Année européenne du dialogue interculturel est une bonne initiative, car elle "permet de s’attaquer au plus difficile". "C’est avec ses voisins les plus proches qu’il est toujours le plus difficile à vivre en paix", a-t-il avancé, en ajoutant que, dans le cas du Luxembourg, ce sont les frontaliers "qui sont les plus difficiles à saisir". C’est pourquoi il a loué le "courage" du Ministère de la Culture "à s’attaquer à cette tâche difficile qu’est le dialogue avec les frontaliers". Frisoni a déploré que les frontaliers connaissent trop peu l’offre culturelle du Luxembourg, tout en admettant que la faute incombait également au côté luxembourgeois (les magasins qui ferment leur porte à six heures par exemple n’invitent guère à rester plus longtemps flâner au centre-ville).
Une sorte de défilé, accompagné de musique traversera le Kirchberg et le centre-ville jusqu’à l’Abbaye de Neumünster, où aura lieu la principale partie de la Fête des frontaliers. Le défilé partira à la hauteur du supermarché "Auchan", au Kirchberg. Différentes étapes sont prévues tout au long du Kirchberg, au Glacis, à la Places d’Armes, etc. "L’idée, c’est d’aller là où travaille la grande partie des gens, et de les amener progressivement vers l’Abbaye de Neumünster", a expliqué Barbara Zeches, responsable des relations culturelles internationales auprès du Ministère de la Culture. Sur le parvis de l’Abbaye de Neumünster, une scène sera installée, il y aura un programme musical et artistique et un village gastronomique. Dans l’Agora, des associations et institutions intéressées par le dialogue interculturel proposeront des stands d’information. Un programme détaillé de la Fête des frontaliers suivra.
Selon les organisateurs, la Fête des frontaliers ne doit pas rester une occasion unique, mais devrait rentrer dans les rendez-vous habituels d’une année culturelle au Luxembourg.