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Elections européennes - Traités et Affaires institutionnelles
Une loi votée à la Chambre des députés ouvre de nouveau les listes électorales européennes pour les autres ressortissants de l’Union européenne jusqu’au 12 mars inclus
17-12-2008


La Chambre des députés vient de voter ce 17 décembre 2008 avec 53 voix pour et 7 voix contre - celles des Verts - une modification de la loi électorale qui aura des conséquences immédiates sur les listes électorales pour les élections européennes du 7 juin 2009.

En effet, les listes électorales seront dorénavant arrêtées seulement 86 jours avant le jour du scrutin, alors qu’avant, les listes étaient arrêtées au plus tard le 1er avril de l’année précédant le scrutin.

Concrètement, cela veut dire que les citoyens luxembourgeois âgés de 18 ans le jour des élections seront également inscrits sur les listes électorales.

Cela veut dire aussi que les ressortissants des autres Etats membre de l’Union européenne qui seront désireux de participer pour la première fois aux élections européennes pourront encore faire leur demande d’inscription sur la liste électorale afférente à partir de la promulgation de la loi votée le 17 décembre 2008 jusqu’au 12 mars 2009 inclus. S’y ajoute que les ressortissants de l’Union européenne pourront s’inscrire sur les listes électorales pour les élections européennes après seulement deux ans de résidence au Luxembourg, alors qu’avant, ils devaient résider au Luxembourg le temps d’une législature européenne, c’est-à-dire cinq ans. Rien ne change par contre pour le délai de résidence requis pour s’inscrire pour les élections communales.

Pour pouvoir s’inscrire pour voter aux élections européennes, les autres ressortissants de l'Union européenne doivent donc avoir 18 ans le jour des élections, ce qui veut dire que les jeunes qui n’ont pas encore la majorité, mais qui l’auront le 7 juin 2009, pourront également s’inscrire. Ils doivent ensuite résider depuis au moins 2 années au Luxembourg au moment de l’inscription sur la liste électorale. Finalement ils doivent s’'inscrire sur la liste électorale avant le 13 mars 2009. 

Comment les autres ressortissants de l’Union européenne pourront-ils s’inscrire ?

Ils doivent se présenter à l’administration communale de leur lieu de résidence. Il leur faudra un document d’identité en cours de validité, un ou plusieurs certificats de résidence justifiant des 2 années de résidence. On leur demandera de compléter un formulaire pré-imprimé qui est une déclaration formelle par laquelle ils précisent notamment leur nationalité et leur adresse, qu’ils ne sont pas déchus du droit de vote dans leur pays d’origine et qu’ils n’exerceront leur droit de vote pour les élections européennes que dans le Grand-Duché de Luxembourg.

Une fois inscrits, ils seront obligés de voter le jour des élections et ils seront automatiquement convoqués pour chaque élection européenne.

Une campagne d’information et de sensibilisation en janvier

Une campagne d’information et de sensibilisation annoncée par la ministre de l‘Intégration Marie-Josée Jacobs dans une réponse à une question parlementaire du député Felix Braz (Verts) devrait comprendre la production d'un spot vidéo pour les salles de cinéma, des conférences, la diffusion d'un dépliant, d'affiches et de sous-verres diffusés au grand public en langue française, allemande, anglaise, portugaise et italienne, une campagne visant particulièrement les jeunes, avec une diffusion de badges et de stylos à bille. Jacobs évoque également l'organisation d'un festival pour les adultes comme pour les jeunes, avec des stands d'information des associations œuvrant en faveur des étrangers et d'un concert d'un groupe étranger. 

L’ASTI mi-figue mi-raisin

L’association de soutien aux travailleurs immigrés (ASTI) se  réjouit de l’adoption du projet de loi 5859 par la Chambre des Députés. "Il va diminuer les dérogations obtenues par le Luxembourg dans le traité de Maastricht et se rapprochera de l'objectif de ce même traité qui consiste à donner aux citoyens européens vivant dans un autre Etat membre un accès aux urnes communales et européennes aux mêmes conditions qu'aux nationaux"  déclare-t-elle dans un communiqué diffusé le 15 décembre 2008.

L’ASTI est par contre très critique envers la campagne annoncée par la ministre Jacobs. Elle reproche à la ministre de ne pas parler des enjeux des élections européennes, de "rater l'occasion de parler politique", de "laisser passer l'occasion de mettre au centre l'Union européenne et ses compétences". Et d’ajouter dans un langage normalement peu usité dans la communication politique luxembourgeoise : "En rester au niveau des gadgets, c'est prendre les éventuels électeurs pour des c.... , c'est surtout rabaisser le défi européen à un niveau jamais atteint."

Faisant allusion à un budget de 200 000 euros pour la campagne de sensibilisation, l’ASTI, qui se sent tenue à l’écart, aurait préféré "des approches pédagogiques en direction des jeunes, de tous les jeunes sur le suffrage universel, sur les acquis et les défis de l'Union européenne" et que soit surtout saisie "l'occasion  d'un débat sur la vie démocratique à l'intérieur des établissements scolaires" plutôt que l’organisation d’un festival. 

Dans un autre texte diffusé le 5 décembre 2008, l’ASTI avait posé deux autres questions, l’une politique, l’autre symbolique."Y aura-t-il une véritable campagne électorale pour les élections européennes, visible et distincte de celle des élections nationales? Combien de partis politiques "oseront" mettre un ou deux candidats non -luxembourgeois sur leur liste européenne?"

Le débat au Parlement

Après la présentation du projet de loi par le rapporteur, Marco Schank (CSV), le député-maire de Mamer, Gilles Roth (CSV), a apporté le soutien de son groupe politique au projet de loi 5859 et s’est prononcé pour plus de participation des autres ressortissants de l’Union européenne et des résidents étrangers aux processus de décision politique. Mais contrairement à d’autres partis, le CSV n’est pas en faveur d’une réduction du temps de résidence en-dessous de 2 ans pour pouvoir participer aux élections européennes. Même pour ces élections, Roth est d’avis que les autres ressortissants de l’Union européenne doivent s’habituer aux mœurs politiques du Luxembourg, ce qui demande un certain temps. Roth a souligné l’importance que les personnes concernées par la loi soient informées et a donc apporté son soutien à la campagne d’information et de sensibilisation proposée par la ministre Jacobs. Il a également salué le prolongement du délai d’inscription sur les listes, un prolongement qui est plus qu’une question de procédure puisqu’elle facilite l’inscription et favorise la participation.

Fernand Etgen (DP), député-maire de Feulen, a apporté le soutien des libéraux au texte même s’ils ne veulent plus de clause de résidence pour les élections communales et encore moins pour les élections européennes. Il a salué la facilitation de la procédure comme une "démarche proactive", estimant que le ressortissant non-luxembourgeois qui fait la démarche d’aller s’inscrire sur les listes électorales marque par ce geste clairement sa volonté de participer au processus politique. Une meilleure campagne de sensibilisation aurait donc été pour Etgen "une procédure dans conditions".

Le député-maire de Steinsel Jean-Pierre Klein  (LSAP) a également apporté le soutien de son groupe politique au texte. Pour Klein, la question de qui vote est dans tout pays une question à la fois d’identité et d’ouverture. La situation démographique spéciale qui est celle du Luxembourg où les "Luxembourgeois de souche" seront bientôt une minorité et qui de ce fait  préoccupe nombre de Luxembourgeois, a déjà du temps de la ratification du traité de Maastricht en 1992-93 conduit le Luxembourg à demander des dérogations en matière de droit de vote des autres ressortissants de l’Union européenne. L’assimilation – c’est-à-dire devenir luxembourgeois- était avant l’intégration le chemin vers les droits politiques.  Pour Klein, l’intégration d’un étranger est un effort qui est favorisé par le sentiment d’être le bienvenu. C’est là qu’il voit que les Luxembourgeois ont parfois des difficultés. C’est pourquoi le projet de loi 5859 lance un signal positif.

Constatant que la participation des autres ressortissants aux élections n’a pas été aussi importante que l’avaient espéré les uns et craint les autres, Klein est convaincu que le raccourcissement des délais d’inscription facilitera les campagnes d’information et de sensibilisation dans les communes. Il suscitera d’autant moins de frustrations que les communes sauront encourager leurs résidents des autres pays de l’Union européenne à s’inscrire. En conclusion, Klein a déclaré que Luxembourgeois et autres ressortissants de l’Union européenne avaient en commun que le taux de participation aux élections européennes serait aussi bas au Luxembourg qu’à l’étranger si le vote n’était pas obligatoire. Raison de plus pour ne pas rendre plus difficile l’accès aux élections européennes aux résidents des autres Etats membres qui veulent participer.

Camille Gira (Verts), député-maire de Beckerich, a posé la question pourquoi la loi électorale était constamment amendée et a avancé son explication : c’est parc que les trois grands partis ont refusé depuis des années une large discussion sur le fonctionnement de la démocratie dans le Luxembourg du 21e siècle. La conséquence pour lui : bientôt une minorité décidera de la manière dont le pays sera gouverné, comme ce fut le cas jusqu’en 1919. S’attaquant au fait que des dérogations soient encore maintenues par les délais de résidence, il a fustigé le fait que "le Luxembourg est encore le seul pays qui pratique ce type de dérogations". Il a accusé la majorité d’être réticente à ouvrir la démocratie luxembourgeoise à une participation plus large, visant avant tout le CSV, "le parti d’où est parti la campagne pour le drapeau au lion rouge." Critiquant la campagne proposée par la ministre Jacobs, il a déclaré qu’il aurait préféré que le Luxembourg donne "une autre image de la démocratie" et a annoncé que les Verts voteront contre la loi.

Gast Gibéryen (ADR) a reléaté la dégression progressive des dérogations de 7 à 5 et ensuite à 2 ans de temps de résidence des dérogations pour les élections européennes. Ces dérogations avaient leur sens dans les années 90 vu le haut pourcentage d’étrangers dans le pays, ce qui avait fait que des concessions avaient été faites au Luxembourg par les autres Etats membres de l’Union européenne. Avec cette dégression progressive, le Luxembourg s’est montré selon Gibéryen responsable et a entamé une démarche participative qui a le soutien de l’ADR. Le député ADR s’est montré convaincu que l’abolition de la clause de résidence sera la prochaine étape, car l’intégration est en marche. Il a salué la campagne projetée mais demandé qu’une campagne similaire se fasse pour les Luxembourgeois qui sont allés vivre dans les régions frontalières et qui peuvent participer aux élections par le vote par correspondance.

Ben Fayot (LSAP) a pris la parole comme coauteur d’une des propositions de loi intégrées dans la loi. Il a rappelé l’énervement qu’avait provoqué au Luxembourg au début des années 1990 le droit de vote prévu par le traité de Maastricht pour les autres ressortissants de l’Union européenne et qui a conduit le gouvernement de l’époque à demander des dérogations. Aujourd’hui, il ne dépend que des Luxembourgeois d’abandonner ces dérogations, a déclaré l’ancien député européen qui a ajouté que les élections ne sont pas le seul moyen de faire participer les non-Luxembourgeois aux processus politiques du pays. D’où son rappel à la responsabilité des partis politiques d’intégrer les non-Luxembourgeois et de les faire participer réellement à la politique du pays. Ila également marqué sont accord avec Gast Gibéryen qu’il fallait faciliter la participation des nombreux Luxembourgeois vivant à l’étranger aux élections.

A l’issue du débat, le ministre de l’Intérieur, Jean-Marie Halsdorf, déclara que selon lui "l’équilibre étrangers-Luxembourgeois est une chose fragile" et qu’il faut avancer "pas par pas" et "adapter lentement le système aux faits."