Principaux portails publics  |     | 

Elections européennes - Emploi et politique sociale
Le CSV a présenté ses dix thèses relatives à la dimension sociale en Europe
Les démocrates-chrétiens luxembourgeois veulent porter le débat au sein du PPE
05-02-2009


Georges Bach, Frank Engel, Viviane Reding, François Biltgen, Tania Matias, Roger WeberLe 4 février 2009, le Parti chrétien social (CSV) a convié la presse à son secrétariat général pour exposer ses dix thèses relatives à la dimension sociale en Europe. Ce papier fait partie d’une série de sujets que ce parti veut approfondir pendant sa campagne électorale mais aussi bien au-delà.

Le président du CSV et ministre du Travail et de l’Emploi, François Biltgen, a expliqué que "c’est souvent par réflexe défensif et par peur existentielle que les citoyens sont d’avis que l’Europe telle que nous l’avons construite risque à l’avenir de détériorer leur propre situation sociale plutôt que de l’améliorer". Or, avec la présentation de leurs dix thèses, les chrétiens sociaux luxembourgeois veulent contribuer à un dialogue plus cohérent sur la notion de la "dimension sociale en Europe". Ils préfèrent d’ailleurs ce terme à celui d’"Europe sociale", dans la mesure où, comme l’a précisé François Biltgen, il ne s’agit pas de défendre seulement une dimension sociale dans l’Union européenne, mais également dans chacun des Etats membres. Leur manifeste aborde les sujets tels que la subsidiarité, l’équilibre entre libertés économiques et droits sociaux, et les éléments clés du système social européen, à savoir la solidarité, la valeur humaine du travail et le dialogue social.

La subsidiarité

La dimension sociale en Europe telle que le CSV la préconise se constitue de plusieurs éléments. François Biltgen a François Biltgend’abord déclaré que "l’Europe n’aura une dimension sociale cohérente que si l’approche sociale communautaire et les approches sociales nationales se complètent et s’imbriquent."

Le CSV pense également que "selon le principe de la subsidiarité, l’Europe doit établir des normes minimales, et au-delà de ces normes les Etats membres doivent souverainement décider de leurs politiques sociales". Il ne revendique pas une harmonisation des droits sociaux en Europe, mais que "l’Europe fixe un socle de droits sociaux minimaux pour tous les travailleurs où qu’ils travaillent. Les Etats membres doivent dès lors rester compétents pour définir leur politique sociale et leur politique en matière de droit du travail."

François Biltgen a rappelé par ailleurs que "le Traité de Lisbonne, en intégrant la Charte des droits fondamentaux dans les traités, va encore améliorer ce socle minimal de dispositions sociales." Dans cette perspective, le parti veut "œuvrer au sein du PPE pour que le législateur européen soit plus hardi et plus enclin à légiférer sur base de dispositions habilitantes."

Parallèlement, le CSV s’engage pour un élargissement "du socle de droits sociaux minimaux en donnant à l’Union européenne la compétence de légiférer en matière de rémunérations, ceci surtout, voire exclusivement pour pouvoir instaurer au sein de l’UE un droit de tous les travailleurs à un salaire social minimum." Il est d’avis que "tout travail mérite un salaire et que ce salaire doit pouvoir assurer la vie quotidienne du travailleur". Cette affirmation est pour le CSV également "une affirmation de l’éthique chrétienne qui met la valeur du travail devant celle du capital". Selon le parti chrétien social, il est évident qu’"on ne pourra pas décider d’un salaire social minimum unique en Europe quant à son taux. Les taux doivent pouvoir tenir compte, selon les Etats membres, voire pour les grands Etats membres selon les différentes régions, à la fois de la croissance économique et de la productivité, d’une part, et d’un certain seuil de risque de pauvreté d’autre part."

L’équilibre entre libertés économiques et droits sociaux

François Biltgen a expliqué que le CSV ne "partage pas l’avis que la libre concurrence elle-même apportera croissance et emploi et de surcroît prospérité économique et cohésion sociale pour tous" mais qu’il est plutôt d’avis que "le marché intérieur doit être complété également à l’avenir par des politiques sociales actives et ciblées permettant d’inhiber les discriminations existantes et d’en éviter de nouvelles." Dans cet ordre d’idées, il préconise "la politique d’inclusion sociale active sur le marché du travail, mais également dans l’enseignement et en matière d’accès aux services."

C’est également cette conviction qui dicte l’approche du CSV en matière du concept de flexicurité. "Ce concept comprend quatre volets", a expliqué le ministre du Travail et de l’Emploi, "la flexibilité contractuelle, l’adaptation sur le lieu du travail, le lifelong-learning et la protection sociale", en ajoutant qu’"il a heureusement fondamentalement changé depuis qu’il fut discuté dans le cadre du Livre vert sur la modernisation du droit du travail. Cependant", a-t-il ajouté, "au Luxembourg nous constatons que la flexibilité des horaires joue plus souvent en faveur de l’entreprise qu’en faveur du salarié. C’est donc un sujet de discussion que nous voulons entamer. Ceci nous amène à insister sur l’importance de la responsabilité sociale des entreprises."

Le CSV reste par ailleurs "adepte de l’inclusion au futur Traité de Lisbonne d’un protocole social permettant d’affirmer le nécessaire et juste équilibre entre libertés fondamentales et droits fondamentaux." Il est conscient que "les rapports de force politiques en Europe rendent l’adoption de ce texte qui requerra l’unanimité, peu probable." Voilà pourquoi il exhorte les institutions européennes de souscrire à une "déclaration politique officielle affirmant l’équilibre entre les libertés économiques et les droits sociaux, et ceci en temps utile avant les élections européennes du 7 juin 2009."

Les éléments clés du système social en Europe

Selon le CSV, la solidarité est un des éléments qui distingue le modèle européen du modèle américain. Or, il revendique "la réinstauration du principe de la solidarité dans les politiques européennes."

François Biltgen a expliqué qu’"il faut distinguer les notions d’emploi de celle du travail" en ajoutant que "l’emploi est une notion économique mais elle ne peut être séparée de celle de travail, notion fondamentalement humaine et qui doit primer." Il ne suffit en effet pas "d’être occupé, mais encore faut-il que l’emploi qu’on occupe procure au travailleur à la fois un sens de la vie, une rémunération adéquate et bien-être au travail, notamment en matière de sécurité et de santé", a-t-il précisé.

En guise de conclusion, le président du CSV a ajouté que son parti revendique "une véritable flexicurité digne de ce nom qui doit se faire dans le cadre d’un dialogue social effectif."

Viviane Reding : "Il ne suffit pas de créer des emplois pour résoudre les problèmes sociaux"

Viviane RedingViviane Reding, tête de liste du CSV désignée pour les élections européennes, a enchaîné en ajoutant que la Commission européenne a adopté en juillet 2008 un agenda social renouvelé pour assurer l’équilibre entre l’aspect économique et le volet social, "parce qu’il ne suffit pas de créer des emplois pour résoudre les problèmes sociaux". Elle a précisé que "la clause sociale prévue dans le Traité de Lisbonne permettra de juger dorénavant toutes les politiques européennes sur leur impact social et que ce sera un bon moyen pour assurer en pratique un meilleur équilibre entre libertés économiques et les droits sociaux." Selon la commissaire européenne responsable de la société de l’information et des médias, le travail de conviction constitue une des forces du CSV, parce qu’"on peut seulement s’imposer si on a des alliés en Europe."

 Le CSV veut aller défendre ses dix thèses au PPE et en Europe

"Ces dix thèses sur la dimension sociale de l’Europe, nous irons les défendre au sein du PPE, où tout le monde ne penche pas dans notre sens", a déclaré François Biltgen en abordant les conséquences politiques de ses déclarations. "Et qu’en sera-t-il si le CSV n’arrive pas à percer avec ses idées", a demandé un journaliste. "Le CSV va-t-il alors sortir du PPE ?" La réponse de François Biltgen a été d’abord historique : "Un seul parti est sorti du PPE suite à ce genre de constat, le Français François Bayrou et ce qui est maintenant son parti, le MODEM, pour rejoindre les libéraux. Je ne suis pas sûr si c’était la bonne option." Et de continuer : "Dans l’UE à 6, la composante chrétienne-démocrate avec ses idées sociales était forte. Avec l’UE à 27, cela est plus difficile. Le PPE a grandi très vite. Avec l’élargissement, des partis l’ont rejoint qui sont à la fois loin des idées chrétiennes-démocrates et loin de l’idée européenne. Mais il nous faudra lutter pour des alliés. Dans les nouveaux Etats membres, pensée sociale et partenariat social n’ont pas la cote. Les partis du PPE de ces pays ne sont pas fondés sur les mêmes bases que les partis démocrates-chrétiens des anciens Etats membres. Dès que certains entendent le mot ‘social’, ils l’associent avec ‘socialiste’ et ‘soviétique’. Il y a là tout un travail à faire."

Et qu’en est-il de la proximité de ses thèses avec celles du LSAP, a voulu savoir un autre journaliste. "Cela se peut", a répondu François Biltgen. "Mais cela n’est peut-être pas entièrement vrai pour la flexicurité et la différence que nous faisons entre l’emploi, notion économique, et travail, notion humaine. Mais il est vrai que du point de vue social, CSV et LSAP ont beaucoup de choses en commun. Ce serait bien si le type de constellation et les intersections entre CSV et LSAP sur les questions sociales valaient pour toute l’Union."