Le 16 février 2009, l’eurodéputé luxembourgeois Robert Goebbels (LSAP) interrogeait, dans une question écrite, le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, au sujet de la conduite des commissaires européens participant à une campagne électorale.
L’eurodéputé, qui visait de toute évidence la commissaire luxembourgeoise Viviane Reding, laquelle est tête de liste du CSV pour les européennes, faisait référence, dans sa question écrite, au Code de conduite des Commissaires européens. Ce texte stipule que les membres de la Commission désirant participer à une campagne électorale doivent en informer le Président. Selon le Code de conduite, "le Président [...] décide si la participation envisagée à la campagne électorale est compatible avec l'exercice des fonctions de membre de la Commission". Robert Goebbels souhaitait donc savoir quels étaient les critères retenus par le président de la Commission pour en décider.
Comme le rappelait Robert Goebbels dans sa question écrite adressée à José Manuel Barroso, le Code de conduite précise également qu'en cas d'intention de participation active dans une campagne électorale, le Commissaire doit, pendant la durée de la campagne, cesser ses activités au sein de la Commission.
L’eurodéputé socialiste a donc invité le président de la Commission à préciser comment il définissait "l'intention de jouer un rôle actif dans la campagne électorale" et ce qu’il fallait entendre par "un rôle actif dans la campagne électorale". Il se demandait enfin si "le fait qu'un Commissaire, officiellement investi par son parti pour conduire une liste pour les élections européennes, fasse des conférences de presse où sont présentés des éléments du programme de ce parti, constituait `un rôle actif´".
Dans sa réponse, datée du 30 mars 2009, José Manuel Barroso insiste sur le fait que "les membres de la Commission sont des personnalités politiques qui ont souvent exercé des responsabilités ministérielles ou parlementaires avant d'être nommés Commissaires". Et, pourvu "que leur activité ne mette pas en cause leur disponibilité au service de la Commission" et qu’ils respectent pleinement leurs obligations de collégialité et confidentialité, les commissaires, qui sont des "personnalités publiques", "peuvent être membres actifs de partis politiques ou de syndicats".
Aussi, le président de la Commission précise-t-il que "la participation à une réunion d'un parti politique ou une conférence de presse n'est nullement interdite par le Code de conduite".
Revenant sur les règles définies par le Code de conduite, José Manuel Barroso rappelle qu’une fois informé par les membres de la Commission "de leur intention de participer à une campagne électorale et du rôle qu’ils comptent y jouer", c’est au président de décider "si la participation envisagée est compatible avec l’exercice des fonctions de membre de la Commission". Il s’agit donc pour lui d'apprécier cette compatibilité "en fonction notamment du niveau de la participation envisagée et de la nécessité d'éviter toute situation pouvant influencer négativement sur les obligations d’indépendance et d’impartialité auxquelles sont tenus les commissaires". A la date de cette réponse écrite, ainsi que l’annonce José Manuel Barroso, "les membres de la Commission qui ont déjà pris leur décision ont informé le Président, conformément au Code de conduite des Commissaires".
Par ailleurs, le président de la Commission explique que "si les commissaires concernés comptent jouer un rôle actif dans la campagne en question, ils devront s’abstenir de participer aux travaux de la Commission pendant la durée de cette campagne".
José Manuel Barroso a tenu enfin à faire, au nom du collège qu’il préside, "la distinction entre la participation à une campagne électorale d'un parti politique et des activités visant à encourager la participation des citoyens aux élections européennes". En effet, "vu l'importance que la Commission attache aux prochaines élections européennes, la Commission encourage les activités d'information et de promotion des valeurs communes européennes et soutient la campagne d'information du Parlement européen visant à encourager la participation des citoyens aux élections".
Au mois de février, Viviane Reding avait déclaré au journaliste Joseph Lorent qu’elle avait informé le président de la Commission de son intention de participer aux élections européennes dès avant l’euromeeting du CSV du 25 janvier 2009. Comme le relatait ce même journaliste dans un article publié dans le Luxemburger Wort du 23 février 2009, quelques jours donc après le dépôt de la question écrite de Robert Goebbels, Viviane Reding aurait même, à la suite de sa nomination comme tête de liste, proposé à José Manuel Barroso de prendre un congé politique sans solde à partir de la mi-mai, c’est-à-dire au plus fort de campagne électorale. La commissaire luxembourgeoise avait par ailleurs aussi précisé qu’elle n’aurait ni l’intention ni le temps, du fait de ses fonctions, de mener une campagne électorale active avant cette date.
Robert Goebbels n’a pas manqué de réagir, par voie de communiqué, dès le 31 mars 2009, en fin d’après-midi, tant à la réponse de José Manuel Barroso, qu’à l’article de Joseph Lorent publié dans le Luxemburger Wort du 30 mars.
Pour l’eurodéputé socialiste, le président de la Commission, dans son argumentation, ne répond pas vraiment aux "questions précises" qu’il lui a adressées. A ses yeux, il est en effet évident "que les commissaires ne sont pas des eunuques politiques" et le fait "qu’ils aient le droit de se présenter à des élections nationales et européennes est un lieu commun". En bref, rien ne s’oppose à ce que Viviane Reding soit candidate, certes, mais ce n’était pas la question.
Le problème que tenait à soulever Robert Goebbels est plutôt celui de la "séparation [que la commissaire européenne doit faire], selon le Code de conduite, entre ses fonctions et ses ambitions politiques".
Robert Goebbels s’appuie ensuite sur les informations communiquées par le Luxemburger Wort selon lesquelles Viviane Reding entendrait "assumer ses fonctions de négociatrice en chef de la Commission européenne en matière de télécommunications et de médias jusqu’à la mi-mai et tout de suite après le 7 juin". Il voit là un aveu de Viviane Reding, qui, selon lui, "n’a pas l’intention d’accepter son mandat de députée au Parlement européen".