Principaux portails publics  |     | 

Economie, finances et monnaie - Emploi et politique sociale - Traités et Affaires institutionnelles
Le Premier ministre Juncker fait le point sur la crise, l’Europe et les frictions autour du secret bancaire
19-03-2009


Jean-Claude Juncker à Prague le 12 mars 2009La valeur ajoutée du Conseil européen qui commence ce jeudi 19 mars 2009 sera, selon ce que le Premier ministre luxembourgeois, Jean-Claude Juncker, a déclaré dans une interview au Wort du 19 mars 2009, "de définir la position de l’Union européenne pour le G20 qui se tiendra le 2 avril à Londres". Car il trouve que c’est juste que l’on introduise une "régulation plus dense des marchés financiers", notamment concernant les hedge funds et les agences de notation. Au centre des préoccupations des dirigeants européens et du G20 figure l’accord selon lequel aucun produit financier ne pourra plus être négocié par quelque acteur financier que ce soit et où que ce soit en dehors de la présence d’une instance de surveillance, principe qui devrait, selon cet accord, être mondialement appliqué.

Les difficultés entre le monde européen et le monde anglo-saxon

Juncker met en exergue dans l’interview les difficultés qui marquent le dialogue "entre le monde européen et le monde anglo-saxon". Les USA et le Royaume-Uni ont selon lui longtemps résisté aux appels européens à une régulation du marché financier. "Nous avons maintenant besoin d’une régulation, mais pas d’une strangulation", insiste-t-il. Il n’est par contre pas d’accord pour que l’Union européenne cède aux pressions des USA pour élargir les paquets conjoncturels. La contribution des Etats membres de l’Union européenne qui équivaut à 3,4, voire 4 % du PIB européen, est selon lui suffisante, et il faut maintenant attendre l’effet de ces investissements au cours du deuxième semestre de 2009 et au cours de l’année 2010. Rappelant les responsabilités du marché hypothécaire états-unien dans le déclenchement de la crise actuelle, Juncker est d’avis qu’il appartient aux USA d’assumer leur part, essentielle, des charges nécessaire pour pallier la crise.

Pas de danger d’éclatement de la zone euro ni de faillites d’Etats

Par ailleurs Juncker ne voit pas de danger pour que la zone euro éclate sous la pression de la disparité des taux d’intérêts des obligations des Etats membres. Il ne voit pas non plus de danger immédiat de faillites d’Etat en Union européenne. Dans le cas contraire, il la juge préparée. Et finalement, nul besoin non plus de réformer le Pacte de croissance et de stabilité, puisque celui-ci ne prescrit plus, depuis la réforme de 2005, une stricte limitation du déficit budgétaire à 3 %.        

Un double souci : la crise de l’emploi et la crise du système politique

Dans la même interview, le Premier ministre exprime, quand il s’agit de nommer les problèmes les plus urgents en ce temps de crise qui n’en finit pas, "un double souci" : une crise de l’emploi massive en Europe dont il craint l’effet destructeur sur la confiance et, d’autre part, une crise du système politique. Dans le cadre de cette dernière on risque de voir la colère des citoyens se diriger contre la classe politique parce qu’on leur "a fait miroiter que les règles de l’économie sociale de marché n’avaient plus cours et qu’ils n’auraient plus besoin de fournir des efforts propres, mais qu’ils pourraient, d’un jour à l’autre, laisser travailler leur argent".

Prolifération des sommets, secret bancaire : des critiques à l’égard du fonctionnement actuel de l’Union européenne

Juncker a eu des mots très critiques à l’encontre de la série de sommets de crise des derniers mois, qui "ont donné l’impression que l’on répétait les mêmes conclusions" et après lesquels "aucun progrès ne pouvait être constaté sur la substance". "Ce n’est pas une bonne méthode de travail européenne", a-t-il conclu.

Juncker n’a pas non plus apprécié la manière dont le G20 a été utilisé par certains Etats européens pour exercer une pression sur le Luxembourg pour qu’il abandonne son secret bancaire, alors que le pays ne fait qu’appliquer une norme de droit européenne qui lui permet, en matière de fiscalité de l’épargne, de préférer l’impôt à la source à l’échange automatique d’informations. "Si le Luxembourg devait figurer, avec l’aide de l’Europe, sur une ‘liste noire’ du G20 – ce que je me refuse à imaginer – je mettrais en question le mode de fonctionnement de l’Union européenne", a déclaré le Premier ministre, en ajoutant : "Je tablerai ce sujet au Conseil européen et j’exigerai de nos partenaires qu’ils empêchent que le Luxembourg vienne figurer sur une ‘liste noire’ du G20. Le G20 n’est pas un produit de substitution à l’Union européenne".

Déclarations inacceptables et immixtions

Les mots du Premier ministre ont été durs à l’égard des déclarations du président du SPD, Franz Müntefering, lequel avait taxé le Luxembourg de paradis fiscal et avait déclaré que, "dans le temps, on aurait envoyé des soldats pour mettre fin à de tels agissements". "Surtout sortant d’une bouche allemande, ces déclarations sont pour les Luxembourgeois inacceptables", a jugé le Premier ministre. Il a également qualifié l’exigence du ministre allemand des Finances, Peer Steinbrück, que l’Autriche et le Luxembourg fassent encore un pas supplémentaire en direction de l’échange d’informations, "d’immixtion inacceptable dans les affaires luxembourgeoises". Et il a conclu : "Nous ne sommes placés ni sous commandement français, ni allemand, mais nous faisons ce que nous pensons être juste pour contribuer à une meilleure densité de la réglementation internationale".