Le think-tank berlinois Berlinpolis vient de publier, le 25 mai 2009, une étude intitulée "Wie sozial ist Europa ?" Pour cette étude comparative qui offre une vision de la situation sociale des différents pays membres de l’Union européenne, les auteurs, Daniel Dettling et Markus Becker, se sont basés sur une étude du même nom qui avait été publiée en 2006 par la Hans-Böckler-Stiftung.
L’étude s’appuie sur 35 indicateurs afin d’analyser cinq aspects de la situation sociale, à savoir la répartition des revenus et la couverture sociale, l’inclusion sur le marché du travail, les opportunités d’éducation et de formation, l’égalité des genres et les relations entre les générations. L’ambition des auteurs : contribuer à l’analyse comparative de la situation sociale dans les Etats membres de l’Union européenne.
En faisant la moyenne de tous les indicateurs, les chercheurs sont donc arrivés à un classement général qui recoupe par conséquent les cinq dimensions choisies. Le Luxembourg arrive dans ce classement en 9e position, alors qu’il était en 2006 encore en 7e position. Le Grand-Duché arrive cependant largement devant ses voisins, classés, respectivement, aux 11e, 17e et 19e rangs pour la France, la Belgique et l’Allemagne.
En tête, avec une belle constance par rapport à 2006, arrivent la Suède, le Danemark et les Pays-Bas. A noter, la Slovénie, classée en 5e position, est le premier des nouveaux Etats membres. En queue de peloton, on trouve la Grèce, la Roumanie et le Portugal. Les variations ont été les plus fortes en Lettonie et en Hongrie, pays qui ont tout deux connu un net recul en matière sociale si l’on en croit ces indicateurs, tandis que le classement révèle, par rapport à 2006, des avancées importantes au Royaume-Uni, à Chypre, en Estonie, en Bulgarie et en Allemagne.
En termes d’inégalité dans la répartition des revenus, le Luxembourg est classé au 13e rang, comptant plutôt parmi les bons élèves de l’UE par rapport à la moyenne européenne. C’est la Slovénie qui arrive en tête pour cet indicateur, tandis que le Portugal est la lanterne rouge de l’Union en la matière, avec une disparité de ressources qui atteint le double de celle de la Slovénie.
En ce qui concerne la pauvreté, le Luxembourg est juste au dessus de la moyenne européenne, classé en 11e position. La tendance est cependant nettement à la baisse puisqu’en 2003, le Grand-Duché était au 3e rang des pays de l’UE !
Pour ce qui est de l’assurance chômage, la tendance est à une certaine constance dans l’ensemble de l’UE où le Luxembourg, avec des allocations qui couvrent, sur une période de chômage de 60 mois, en moyenne 65 % du dernier salaire, est à la 8e place. L’Irlande est en tête, suivie par les pays scandinaves, tandis que les pays méditerranéens sont le plus à la traîne.
Le risque de pauvreté infantile est particulièrement réduit au Luxembourg, qui est à la 2e place, juste derrière la Slovénie. C’est au Royaume-Uni que le bât blesse le plus et malheureusement, c’est une constante.
Quant au risque de pauvreté encouru par les personnes âgées, il est lui aussi très bas au Luxembourg, qui est en 3e place du classement, derrière la République Tchèque et la Hongrie. C’est Chypre qui souffre le plus de ce problème, tandis que la situation s’est sensiblement dégradée dans les pays baltes.
La part du PIB investie dans les prestations sociales est assez stable elle aussi dans l’ensemble de l’Union. Le Luxembourg arrive, pour cet indicateur, en dessous de la moyenne européenne et se trouve de ce fait en 16e position seulement. Loin derrière ses voisins, France, Belgique et Allemagne, qui arrivent respectivement en 1ère, 3e et 6e places. Mais il convient là de préciser qu’en matière de dépenses sociales par habitant, le Luxembourg est loin devant d’après les chiffres de l’OCDE.
De façon générale, la situation du Luxembourg s’est donc dégradée en termes de répartition des revenus et de couverture sociale puisque, du 4e rang en 2006, il se retrouve au 8e pour 2008.
Si le taux de chômage du Grand-Duché compte toujours parmi les plus bas de l’UE, - il obtient le 5e rang dans ce classement - , il est en revanche nettement moins bien classé pour ce qui est du taux d’emploi, pour lequel il n’obtient que la 18e place et se trouve en-dessous de la moyenne européenne.
Quant au taux de chômage des personnes les moins bien formées, là encore le Luxembourg est très bien placé, en 2e place, juste derrière les Pays-Bas. Pour ce qui est du chômage longue durée, le Luxembourg se maintient en tête du classement, en 4e place. Le Royaume-Uni, la France, la Hongrie et le Portugal ont connu eux en revanche une forte progression du chômage longue durée entre 2005 et 2007 tandis que les trois pays baltes ont eux bénéficié d’un recul de ce problème.
Le risque de chômage des étrangers est au Luxembourg légèrement supérieur à celui des nationaux et la situation en la matière s’est nettement améliorée depuis 2004, conduisant le Luxembourg au 4e rang d’un classement qui ne compte cependant que 17 des 27 Etats membres en raison de données manquant dans certains pays. Ce n’est qu’en Grèce que le risque de chômage des étrangers est plus bas que celui des nationaux.
Au Luxembourg, les jeunes de moins de 24 ans souffrent cependant plus du chômage qu’en 2005, et cette tendance fait nettement reculer le Luxembourg dans le classement, où il arrive en 16e place. L’Irlande, le Royaume-Uni, la Roumanie, la Hongrie et l’Espagne ont aussi connu une forte progression du chômage des jeunes tandis que la République Tchèque, la Slovénie, Malte, la Bulgarie, la Pologne et la Slovaquie semblent avoir vu la situation s’améliorer entre 2005 et 2008.
En matière d’inclusion sur le marché de l’emploi, la situation est donc plutôt stable au Luxembourg qui obtient en tout le 6e rang. La situation est nettement moins bonne pour les voisins du Grand-Duché qui sont classés entre le 17e et le 24e rang.
En matière d’éducation, c’est chez les nouveaux Etats membres que l’on trouve le moins de jeunes ayant une faible éducation, le Luxembourg arrivant pour sa part, en 2007, au 19e rang, juste en dessous de la moyenne de l’UE alors qu’il était encore en 2005 au 15e rang. C’est du côté de la Méditerranée que les chiffres sont les plus mauvais. De façon logique, la proportion de jeunes ayant une formation de niveau baccalauréat ou supérieure est aussi particulièrement basse au Luxembourg qui se retrouve, bien en dessous de la moyenne européenne, en 23e place.
Pour ce qui est des compétences des élèves selon les études PISA de 2003 et 2006, le Luxembourg se positionne en 14e place sur 1es 19 Etats membres de l’UE pris en compte dans le classement. Loin donc derrière la Finlande, les Pays-Bas et la Belgique qui arrivent en tête d’un classement qui n’a pas connu de très grandes variations depuis 2003, à part pour la France qui recule de la 7e à la 12e place. En queue de classement, on trouve la Grèce, l’Italie et le Portugal.
Les compétences en lecture selon les études PISA ont aussi été spécifiquement prises en compte pour cette étude, et le Luxembourg, constant sur ce point, est en 16e place et obtient des résultats conformes à la moyenne européenne. Sur l’ensemble des 25 pays pris en compte dans ce classement, seule l’Allemagne fait montre d’un progrès notable puisqu’elle est remontée entre 2003 et 2006 du 18e rang au 13e. La tendance générale est plutôt à la baisse dans l’ensemble de l’UE, à l’exemple de la France qui recule de la 9e à la 15e place ou des Pays-Bas qui perdent 7 places dans le classement.
C’est au Luxembourg que la réussite des élèves en mathématiques est la plus fortement liée à la profession des parents, une influence qui en 2006 est nettement plus forte qu’en 2003. Juste avant, la France, où cette corrélation s’est accentuée de façon à peu près équivalente. C’est en revanche en Finlande, en Italie et en Lettonie que l’influence du statut des parents sur les résultats scolaires des enfants est la moins forte. Le milieu socio-économique a gagné aussi en influence au Luxembourg, passé en 3 ans du 10e rang au 19e, ainsi qu’en Belgique, en Allemagne et en France, tous étant classés dans les derniers rangs.
La participation des adultes à la formation continue est plutôt stable dans l’UE entre 2005 et 2007, à l’exception du Luxembourg, qui a connu le plus important recul de la zone. Le Grand-Duché, qui se situe en dessous de la moyenne européenne, est passé en effet du 9e rang au 15e en l’espace de deux ans. Et il est à 25 points de la Suède où le taux de participation des adultes à la formation continue atteint 32 %. Les deux derniers entrés dans l’UE, Bulgarie et Roumanie, atteignent pour leur part à peine plus de 1 %.
De façon générale, le Luxembourg semble avoir connu un recul en matière d’éducation et de formation par rapport aux autres pays de l’Union européenne et il se situe donc au 21e rang, juste avant le Portugal et la Roumanie. En 2006, il était au 15e rang selon la même étude.
Le taux d’activité des femmes n’est dans aucun pays de l’UE égal à celui des hommes, mais les différences sont cependant grandes – quasiment du simple au double - entre la Finlande, classée en tête du classement, et Malte, lanterne rouge en la matière. Pour ce qui est du Luxembourg, il semble qu’il y ait eu un progrès entre 2005 et 2007 et il arrive dans ce classement en 19e position, tout en étant légèrement en dessous-de la moyenne européenne.
La corrélation entre genre et chômage est par ailleurs très forte au Luxembourg qui se place en 2008 au 25e rang en la matière. C’est en Allemagne que le risque de se retrouver au chômage est presque équivalent pour les hommes et pour les femmes. La Bulgarie et la Hongrie suivent de près tandis qu’en Grèce et en Irlande les femmes ont un risque de se retrouver au chômage qui est plus de 50 % supérieur à celui des hommes.
En termes d’égalité des salaires, le Luxembourg fait cependant bonne figure, puisqu’il atteint le 7e rang, se plaçant largement au-dessus de la moyenne européenne. C’est en Italie et à Malte que la différence entre les salaires des hommes et des femmes est la moins grande, tandis que l’Autriche et l’Estonie sont à la traîne.
De même le risque de pauvreté est-il au Luxembourg quasiment le même pour les hommes et pour les femmes et le Grand-Duché se retrouve ainsi au 6e rang d’un classement où la Suède, la Hongrie et la Grèce sont en tête. Les risques de pauvreté sont en revanche plus élevés de 20 % pour les femmes en Estonie, Slovénie et Bulgarie.
En termes d’éducation, l’égalité des genres semble presque acquise dans l’ensemble de l’Union européenne, et les femmes ont même légèrement le dessus dans certains pays. Ce n’est cependant pas le cas du Luxembourg qui arrive en 22e position dans un classement qui prend en compte les chiffres des jeunes gens ayant terminé avec succès le secondaire.
La proportion de femmes dans les fonctions dirigeantes a baissé entre 2001 et 2007 au Luxembourg qui recule ainsi au 23e rang, alors qu’il est à 10 points de la moyenne européenne. C’est en France et en Pologne où la proportion de femmes qui tiennent les rênes est la plus forte, et Malte et Chypre sont au contraire bien loin de ces chiffres, puisque leur taux de femmes ayant des fonctions managériales est à peine le tiers de la moyenne européenne.
L’idée selon laquelle la femme devrait idéalement rester à la maison pour s’occuper des enfants pendant que l’homme travaille reste, selon des données datant de 2006, partagée par 54 % des Européens et 46 % des Luxembourgeois. C’est en Hongrie qu’ils sont le plus nombreux à partager cette vision des choses, avec 81 %.
La proportion de femmes actives travaillant dans le domaine des sciences et de la technique est la plus forte en Estonie et en Finlande tandis que c’est au Portugal et en Roumanie qu’elle est la plus faible. Le Luxembourg qui se situe au-dessus de la moyenne européenne en 2007 est au 10e rang en la matière.
De façon générale, le Luxembourg est un des très rares pays à être resté constant dans le domaine de l’égalité des genres et il se retrouve au 18e rang du classement dans lequel culminent la Suède et la France tandis que la République Tchèque et l’Autriche sont au plus bas.
Le taux de fécondité n’atteint nulle part dans l’UE le taux de renouvellement des générations et si la France, l’Irlande et Chypre restent en tête du classement, le Luxembourg se rapproche des sommets puisqu’il est remonté du 8e rang en 2004 au 4e pour 2008. Parmi les taux de fécondité les plus bas, on trouve surtout des nouveaux Etats membres et des pays méditerranéens.
La proportion des moins de 24 ans dans la population est en moyenne de 28,4 % dans l’UE en 2008. Ce sont l’Irlande et Chypre qui sont les sociétés européennes les plus jeunes et le Luxembourg est passé du 13e au 10e rang entre 2004 et 2008, avec 30 % de jeunes. L’Italie et l’Allemagne se retrouvent en queue du classement.
Si les sociétés européennes vieillissent, le rapport entre population active et retraités qui en dépendent a tendance lui aussi à peser de plus en plus. Le Luxembourg, qui arrive au 7e rang compte parmi les pays qui s’en tirent le mieux et où sont en tête l’Irlande et la Slovaquie, avec 1 personne âgée pour 6 personnes en âge de travailler. Le rapport est en Allemagne et en Italie de 1 sénior pour 3 personnes en âge de travailler.
Les projections de ces chiffres pour 2050 annoncent qu’il y aura en moyenne 1 sénior pour deux personnes en âge de travailler dans l’UE, le Luxembourg comptant cependant selon ces pronostics parmi les mieux lotis, avec Chypre et le Royaume Uni, des Etats membres de l’UE.
Le taux d’emploi des personnes âgées de 55 à 64 ans connaît de grandes disparités au sein de l’UE puisqu’il atteint 70 % en Suède contre 28,5 % à Malte, la moyenne dans l’UE étant de 44,7 %. Au Luxembourg, il compte parmi les plus faibles, avec 32 %, et le Grand-Duché se situe ainsi au 25e rang.
Pour ce qui est de l’âge moyen de départ en retraite, il est de 61,2 ans dans l’UE et le Luxembourg compte parmi les pays où ce départ se fait le plus tôt, et place ainsi le Grand-Duché au 23e rang. En Roumanie et en Bulgarie, l’âge moyen de départ en retrait a nettement augmenté entre 2004 et 2007 et il atteint plus de 64 ans, plaçant ainsi ces deux pays en tête du classement.
Le taux d’endettement des Etats membres est enfin pris en considération, le Luxembourg faisant là très bonne figure, juste derrière l’Estonie, tandis que la Grèce et l’Italie ont des taux d’endettement atteignant près du double de la moyenne européenne.
La moyenne de ces indicateurs placent aux premiers rangs "les Etats faisant preuve de la plus grande vitalité démographique et des marchés du travail fonctionnant le mieux sur le plan technique" selon les auteurs. C’est ainsi que l’Irlande, Chypre et le Royaume-Uni se retrouvent en tête du classement, tandis que la Slovénie, la Grèce et l’Italie ferment la marche. Le Luxembourg est quant à lui au 8e rang, loin devant ses voisins qui sont au 13e rang pour la France, au 19e pour la Belgique et au 24e pour l’Allemagne.