Le 2 mars 2010, le Tribunal de l’UE a rejeté le recours en annulation introduit par Arcelor Mittal contestant la validité de la directive établissant un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre. Le recours en annulation a été jugé "irrecevable" et la demande en réparation "non fondée".
La directive 2003/87/CE établissant un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans la Communauté a été adoptée afin de favoriser la réduction des émissions de gaz à effet de serre, en particulier de CO2. Elle repose sur les obligations incombant à la Communauté au titre de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques et du protocole de Kyoto.
La directive dispose que, dans le cadre du système d’échange des quotas, les exploitants des installations visées en son annexe doivent couvrir leurs émissions de gaz à effet de serre par des quotas qui leur sont alloués par les États membres conformément à des plans nationaux d’allocation. Si un exploitant parvient à réduire ses émissions, il peut vendre les quotas excédentaires à d’autres exploitants. Inversement, l’exploitant d’une installation dont les émissions sont excessives peut acheter les quotas nécessaires auprès d’un exploitant qui dispose d’excédents. L’annexe de la directive énumère les types d’installations concernées par la directive, notamment certaines installations de combustion destinées à la production d’énergie ainsi qu’à la production et à la transformation des métaux ferreux, telles que les installations pour la production de fonte ou d’acier.
Arcelor − qui depuis sa fusion avec Mittal en 2006 est devenue le premier producteur d’acier au monde − a introduit un recours devant le Tribunal demandant, d’une part, l’annulation de certains articles de la directive et, d’autre part, une réparation des dommages subis du fait de l’adoption de la directive.
Arcelor fait valoir que l’application de ces dispositions à des installations de production de fonte brute ou d’acier viole plusieurs principes de droit communautaire, notamment le droit de propriété, la liberté d’exercer une activité économique, le principe de proportionnalité, le principe d’égalité de traitement, la liberté d’établissement et le principe de sécurité juridique.
À cet égard, le Tribunal rappelle qu’une personne morale, telle une société, peut former un recours contre les actes communautaires qui la concernent directement et individuellement. Toutefois, il constate qu' Arcelor n’est ni individuellement ni directement concernée par la directive. En effet, la directive s’applique de manière générale et abstraite à tous les opérateurs visés à l’annexe, y compris ceux du secteur de production de fonte ou d’acier, et n’est pas susceptible de caractériser la situation factuelle et juridique d’Arcelor par rapport aux autres opérateurs.
À cet égard, le Tribunal considère qu’Arcelor n’a pas démontré que, en adoptant la directive, le législateur communautaire a violé le droit de propriété, la liberté d’exercer une activité économique, le principe de proportionnalité, le principe d’égalité du traitement, la liberté d’établissement ou le principe de sécurité juridique d’une manière suffisamment caractérisée pour engager la responsabilité non contractuelle de la Communauté.
En particulier, le Tribunal rappelle que la Cour de justice a déjà constaté, dans un arrêt datant du 16 décembre 2008, que la directive n’enfreint pas le principe d’égalité de traitement, la différence de traitement causée par l'exclusion du champ d'application de la directive, des secteurs de la chimie et des métaux non ferreux, étant justifiée par des critères objectifs.
En outre, le Tribunal considère que le fait que la directive ne garantit pas aux opérateurs la possibilité de transférer les quotas alloués vers une autre installation plus rentable dans un autre État membre ne viole pas le principe de la liberté d’établissement. La directive laisse aux États membres une marge d’appréciation suffisamment large pour leur permettre de l’appliquer d’une manière conforme à la liberté d’établissement. Dans ces conditions, même si les législations nationales − en ne prévoyant pas la possibilité de transférer librement des quotas entre des installations dans différents États membres − ne sont pas en conformité avec la liberté d’établissement, une telle restriction ne peut être imputée à la directive au seul motif que celle-ci n’interdit pas explicitement une telle pratique des États membres.