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Marché intérieur - Transports
La Commission européenne présente des mesures en vue d'améliorer les services ferroviaires
Ces mesures constituent une refonte du premier paquet ferroviaire après des déficits constatés dans les domaines de la concurrence, de la surveillance réglementaire et du cadre applicable aux investissements publics et privés.
20-09-2010


La Commission européenne a adopté le vendredi 17 septembre 2010 une proposition visant à améliorer les services de transport de voyageurs et de marchandises par rail: en intensifiant la concurrence sur le marché du transportVue sur les rails en Gare de Luxembourg. Source : Ministère des Transports ferroviaire; en donnant plus de pouvoir aux organismes nationaux de contrôle; en améliorant le cadre pour les investissements dans le secteur du rail.

La proposition de directive établissant un espace ferroviaire unique relève du processus de simplification et de consolidation de la législation et consiste à fusionner trois directives en vigueur et leurs versions modifiées successives en un texte cohérent. Elle a également pour objet de prendre des mesures dans des domaines clés où se posent des problèmes qui nuisent au bon fonctionnement du marché du transport ferroviaire.

La concurrence

La Commission a ainsi constaté un faible niveau de concurrence, qu’elle impute au manque de précision des conditions d'accès au marché, qui continuent ainsi de favoriser les opérateurs historiques. C’est pourquoi la directive exigera que l'accès aux services ferroviaires connexes, comme l'entretien, les terminaux, l'information des voyageurs et la billetterie, soit facilité, voire garanti, pour le transport de marchandises comme pour le transport de voyageurs. Une telle mesure devrait contribuer à intensifier la concurrence sur le marché du rail en rendant les conditions d'accès au marché plus transparentes et plus simples.

Un autre problème est la persistance de conflits d'intérêts qui opposent différents acteurs du marché dans l'accès aux services ferroviaires connexes (accès aux terminaux, maintenance et entretien des trains, etc.); les pratiques discriminatoires telles que la tarification de l'infrastructure au kilomètre ou celle de l'électricité au kilowatt, qui permettent à l'opérateur principal de bénéficier de remises disproportionnées; l'insuffisance des informations relatives aux conditions d'accès des nouveaux opérateurs, fournies dans les documents de référence du réseau qui exposent les caractéristiques de l'infrastructure et ses conditions d'utilisation; l'interdiction d'accès aux gares centrales pour les trains internationaux de passagers qui concurrencent les opérateurs historiques; l'absence de guichet d'information ou de vente dans les gares pour ces mêmes trains; l'interdiction ou la restriction de l'accès aux terminaux de fret alors qu'aucune alternative n'est prévue.

Dans ce cadre, la directive définira des règles claires en matière de conflit d'intérêt et de pratiques discriminatoires dans le secteur ferroviaire. Elle exigera aussi des «documents de référence du réseau» plus détaillés – il s'agit de documents publiés chaque année en vue d'informer clairement d'éventuels nouveaux entrants des caractéristiques des infrastructures disponibles et des conditions de leur utilisation.

La surveillance réglementaire

Un autre constat de la Commission est l’insuffisance de la surveillance réglementaire exercée par les autorités nationales qui, trop souvent, n'ont pas l'indépendance, les compétences ni les pouvoirs adéquats. À quelques rares exceptions près, celles-ci manquent en effet de personnel, ont des capacités d'investigation limitées et ne sont pas en mesure de faire appliquer leurs décisions au moyen de sanctions pécuniaires. Quand les recours contre les décisions de l'autorité de réglementation ont un effet suspensif, ces décisions peuvent se voir remises en question dans l'ensemble du système judiciaire et il peut s'écouler des années avant que soit appliquée une décision mettant fin à des pratiques anticoncurrentielles. En vertu de la législation en vigueur, les litiges concernant l'accès aux services (les plus délicats et les plus fréquents dans le domaine de la concurrence sur le marché ferroviaire) ne peuvent être référés à l'autorité de réglementation. Enfin, dans plusieurs États membres, l'autorité de réglementation ferroviaire dépend du ministère des transports, qui détient ou contrôle aussi l'entreprise ferroviaire historique, ce qui engendre un conflit d'intérêts manifeste.

La proposition de directive veut donc élargir les compétences des organismes nationaux de contrôle des activités ferroviaires.

Ainsi, elle prévoit d'étendre les prérogatives de ces organismes nationaux aux services ferroviaires connexes qui devront être indépendants de toute autre autorité publique. Les pouvoirs de ces organismes nationaux de contrôle des activités ferroviaires devraient surtout être renforcés en ce qui concerne les sanctions, audits, procédures de recours et enquêtes de leur propre initiative. Et chose très important, l'obligation de coopérer avec leurs homologues sur des problèmes transfrontaliers leur sera imposée.

Le cadre applicable aux investissements publics et privés

Un dernier constat de la Commission est la faiblesse de l'investissement public et privé dans le secteur ferroviaire. Les infrastructures de plusieurs États membres se détériorent faute de financements suffisants et l'investissement dans les services ferroviaires attire de moins en moins d'opérateurs, historiques ou nouveaux.

Au niveau national, le sous-investissement tient en partie à l'absence d'"architecture financière" bien articulée : plans d'investissement, stratégies à long terme, transparence des relations et absence de collusion entre l'État d'une part – qui est presque toujours propriétaire des infrastructures, voire de l'opérateur historique – et les gestionnaires d'infrastructure et les entreprises ferroviaires d'autre part.

Les nouvelles règles en matière de financement et de tarification des infrastructures ont pour objet de développer une "architecture financière" harmonisée en vue de faciliter les investissements. Les mesures proposées prévoient:

Elle exigera que les gestionnaires d'infrastructures et l'État définissent des stratégies nationales à long terme et concluent des accords contractuels pluriannuels (lien entre financement et résultats, plans d'entreprise). L'objectif est d'offrir aux intervenants sur le marché une plus grande prévisibilité concernant le développement des infrastructures afin de les inciter davantage à améliorer leurs performances;

Le projet de directive veut aussi introduire des règles de tarification des infrastructures plus précises et plus judicieuses. Une mise en œuvre plus efficace des principes de tarification énoncés dans la législation actuelle pourrait aboutir à un abaissement des redevances d'accès aux voies pour les opérateurs de transport ferroviaire dans de nombreux États membres. Les nouvelles règles en matière de tarification (qui introduisent une modulation des redevances en fonction du niveau de bruit sur le modèle de la tarification des coûts externes dans le domaine du transport routier, et des baisses de charges visant à promouvoir l'interopérabilité) devraient également stimuler les investissements privés dans des techniques plus écologiques et interopérables.

Et ensuite?

Parallèlement à cette proposition, la Commission a adopté une communication qui présente sa stratégie en vue de compléter le développement de l'espace ferroviaire européen unique et qui décrit des initiatives supplémentaires qu'elle pourrait lancer dans les cinq années qui viennent. Elle organisera une consultation sur la base de ce document, ainsi que la publication d'une étude détaillée sur l'ouverture du marché au trafic voyageur intérieur.

Contexte : Le premier paquet ferroviaire

Le premier paquet ferroviaire comprend trois directives (2001/12/CE, 2001/13/CE et 2001/14/CE) qui ont fait l'objet de modifications significatives en 2004 (deuxième paquet) et en 2007 (troisième paquet). Il avait pour objectif de redynamiser le transport ferroviaire (encore détenu en grande partie par des monopoles d'État restreints à leurs marchés nationaux respectifs) en l'ouvrant progressivement à la concurrence au niveau européen. Le marché ferroviaire du transport de marchandises est entièrement ouvert depuis 2007; celui du transport international de passagers l'est depuis janvier 2010.

Après une longue période de déclin, la stabilisation de la part modale du rail au cours des dix dernières années atteste du succès de cette politique (depuis 2002, face aux autres modes de transport terrestre, le rail a maintenu sa part de marché aux alentours de 17,1 % en tonnes-kilomètres de marchandises, et entre 8,6 et 8,4 % en passagers-kilomètres). Mais, en dépit de ces résultats, qui n'ont pas été obtenus sans efforts, la mise en place d'un marché ferroviaire unique reste une entreprise incertaine et semée d'embûches.