Principaux portails publics  |     | 

Emploi et politique sociale
EURES est au service des travailleurs transfrontaliers, mais les crédits accordés diminuent tandis que la clientèle potentielle augmente
27-09-2010


EURES est un réseau européen de coopération entre la Commission européenne et les services publics de l’emploi des États membres de l’EEE (les pays de l’Union européenne plus la Norvège, l’Islande et le Liechtenstein, ainsi que la Suisse à travers les accords bilatéraux) et d’autres organisations partenaires. Il a pour vocation d’offrir desEURES informations, des conseils et des services de recrutement / placement aux travailleurs et aux employeurs, ainsi qu’à tout citoyen désireux de tirer profit du principe de la libre circulation des personnes. Mais des nuages planent au-dessus des projets de ce réseau.

Qu’est-ce donc qu’EURES ?

Pour fonctionner, EURES s’appuie sur un réseau humain de plus de 700 conseillers EURES répartis dans l’Europe toute entière et quotidiennement en contact avec des demandeurs d’emploi et des employeurs.

Dans les régions européennes transfrontalières comme celle autour du Luxembourg, EURES a un rôle important à jouer. Les plus de 600 000 personnes qui vivent dans un pays de l’Union européenne et travaillent dans un autre  – ils sont déjà 200 000 dans la Grande Région -  sont confrontées à des pratiques nationales et à des systèmes juridiques différents. Elles sont susceptibles de rencontrer quotidiennement des obstacles administratifs, légaux ou fiscaux à la mobilité. Les conseillers EURES dans ces régions fournissent des conseils et un service d’orientation concernant les droits et les obligations des personnes qui vivent dans un pays mais travaillent dans un autre.

Il existe actuellement plus de 20 partenariats transfrontaliers EURES, répartis géographiquement dans toute l’Europe et associant plus de 13 pays. Ces partenariats visent à répondre aux besoins d’information et de coordination en matière de mobilité à caractère professionnel dans les régions frontalières, ils rassemblent des services publics pour l’emploi et la formation professionnelle, des organisations patronales et syndicales, des autorités locales et d’autres institutions déployant leurs activités dans les domaines de l’emploi et de la formation professionnelle.

Les partenariats transfrontaliers EURES constituent de précieux points de contact entre les administrations de l’emploi, tant régionales que nationales, et les partenaires sociaux. Ils forment également un instrument important pour le contrôle de ces gisements d’emplois transfrontaliers qui constitue un élément crucial dans le développement d’un véritable marché du travail européen.

Le Luxembourg au sein du réseau EURES

Le Luxembourg est impliqué dans deux de ces réseaux transfrontaliers, alors qu’il se trouve au centre d’une région qui compte un tiers et la plus haute concentration de travailleurs transfrontaliers dans l’UE, l’EEE et la Suisse.

Le premier réseau EURES Transfrontalier est le PED (Pôle européen de développement), un partenariat qui s’étend sur trois régions : la Lorraine, le Grand-Duché de Luxembourg et la province du Luxembourg Belge.

Le second, EURES Transfrontalier SLLR, est un partenariat qui s’étend sur quatre régions : la Sarre, la Lorraine, le Grand-Duché de Luxembourg et la Rhénanie-Palatinat.

Les deux réseaux s’engagent en matière d’emploi, par la collaboration entre services publics de l’emploi des régions et l’échange d’offres et de demandes d’emploi entre ces services. En matière sociale, ils diffusent des informations sur les conditions de vie et de travail de part et d’autre des frontières et par la détection et la résolution des obstacles à la mobilité transfrontalière.

Leur "clientèle" est constituée par les travailleurs frontaliers confrontés à des législations sociales et fiscales différentes d’un pays à l’autre, à des pratiques administratives souvent complexes, par les demandeurs d’emploi dans un marché du travail régional, par les employeurs à la recherche de personnel et désireux d’élargir le champ de recrutement au-delà de leur territoire national, par les créateurs d’entreprises qui souhaitent connaître les conditions d’installation de leur entreprise de l’autre côté de la frontière, par les étudiants, jeunes diplômés et jeunes en formation qui souhaitent s’informer sur les possibilités de stages ou d’emploi à l’étranger.

Pour répondre à leurs demandes, les EURES PED et SLLR mettent à leur disposition un réseau humain de conseillers EURES, des agences nationales pour l’emploi, des syndicats et du patronat. A Luxembourg, Diekirch et Esch-sur-Alzette, il y a des conseillers EURES auprès de l’ADEM, à Luxembourg, Differdange, Dudelange et Rodange pour les syndicats. Et la FEDIL peut également être un interlocuteur.

Ces spécialistes du marché du travail transfrontalier répondent aux nombreuses questions que se posent les citoyens européens et disposent de deux centres de ressources et de documentation à Luxembourg – ce dernier soutenu par le CEPS/INSTEAD - et à Metz, qui diffusent régulièrement et gratuitement des informations pratiques sur les thèmes liés à la mobilité transfrontalière (guides fiscaux, fiches pratiques sociales, paramètres sociaux…).

Nuages au-dessus des EURES transfrontaliers

Mais depuis un certain temps, les choses changent.

Comme Nico Clement, membre du Bureau exécutif de l’OGBL et responsable pour la politique syndicale dans la Grande Région et pour les travailleurs frontaliers de l’OGBL, l’a expliqué à Europaforum.lu, dans un premier temps, le budget du réseau pour toute l’UE – d’un montant tournant autour de 14 millions d’euros - n’a pas été augmenté malgré l’élargissement de l’UE vers 12 nouveaux Etats membres. Ensuite, on a essayé de mettre dans EURES l’accent sur les activités de placement et de réduire les activités de consultation et d’information. Au niveau de la gestion, c’était au début l’un des partenaires qui gérait le budget transféré par Bruxelles. Ensuite, on a demandé que ce soit l’agence pour l’emploi, et les autres partenaires devaient financer à hauteur de 50 % les frais des consultants ainsi que l’infrastructure et la communication, une charge financière qui a conduit l’un ou l’autre partenaire syndical à jeter l’éponge. Des projets tout à fait en ligne avec les objectifs de la Commission en matière d’emploi et de mobilité, mais mettant aussi l’accent sur l’information et la consultation, ont été refusés. Une première réaction vis-à-vis de la Commission est alors restée sans réponse. Puis, au printemps 2009, a eu lieu une première rencontre avec les eurodéputés de la Grande Région, la première de ce genre sur une base régionale, donc ni sur une base de partis ni de pays d’origine.

Dans un deuxième temps, le réseau EURES SLLR a vu diminuer les crédits qui lui ont été accordés de 40 % depuis 2004, passant de 530 000 à 300 000 euros. La première réaction politique a eu lieu dans la Sarre, qui préside actuellement la Grande Région, où la situation de l’emploi est tendue et où l’intérêt pour la mobilité transfrontalière des travailleurs est grand, tous partis confondus. Fin août 2010, le ministre-président de la Sarre, Peter Müller, s’est adressé au commissaire en charge de l’emploi, des affaires sociales et de l’intégration, Laszlo Andor. Peter Müller considère que cette mesure empêchera la réalisation de nombreux projets, qu’elle constitue une perte pour la région, et il a par conséquent prié le commissaire européen de revenir sur sa décision. Il a par ailleurs critiqué l’accent mis sur le placement dans une Grande Région qui a besoin aussi d’une information et d’une consultation de ses 200 000 travailleurs frontaliers. Il a enfin invité le Commissaire à venir sur le terrain pour se rendre compte par lui-même des particularités du marché du travail de la Grande Région et de la qualité du travail des conseillers EURES. Le ministre de l’Intérieur et des Affaires européennes de la Sarre, Stephan Toscani, a lancé un communiqué avec un contenu similaire.

Au Luxembourg, ce sont les syndicats qui songent à entreprendre des démarches, notamment vis-à-vis du ministre en charge de la Grande Région, Jean-Marie Halsdorf, et du ministre du Travail, Nicolas Schmit. "C’est la seule structure de ce genre dans l’UE et qui va aussi loin dans l’échange d’informations au-delà des frontières et dans la qualité de la consultance pour les travailleurs", explique Nico Clement. "Mine de rien, elle est importante. Car le placement de personnes à la recherche d’un emploi dans un marché du travail transfrontalier comme le nôtre se fait après information et consultation. C’est fatal de démanteler un tel réseau quand on affiche l’intégration et la mobilité comme objectifs."