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Concurrence - Transports
Transport aérien : La Commission européenne ouvre des procédures d'infraction contre sept États membres, dont le Luxembourg, concernant des accords avec la Russie pour le survol de la Sibérie
27-01-2011


La Commission européenne a engagé le 27 janvier 2011 des procédures d'infraction contre la Belgique, le Danemark, l'Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Suède et le Royaume-Uni concernant des accords bilatéraux sur les services aériens conclus avec la Russie.

Elle a envoyé à chacun de ces États membres une demande officielle d'informations sous la forme d'une lettre de mise en demeure.

Pour la Commission, ces accords pourraient nuire à la concurrence entre les compagnies aériennes européennes et servir de base à des redevances pour le survol de la Sibérie – 420 millions d’euros en 2008 - en violation éventuelle des règles de l'UE en matière d'entente.

Des lettres de mise en demeure analogues ont déjà été envoyées en octobre 2010 à l'Autriche, à la Finlande, à la France et à l'Allemagne, et la Commission s'emploie à vérifier si les accords aériens bilatéraux que les autres États membres ont conclus avec la Russie sont conformes au droit de l'UE.

Le fait que les compagnies aériennes de l'Union européenne desservant de nombreuses destinations en Asie soient contraintes de s'acquitter d'une redevance à la compagnie aérienne Aeroflot pour pouvoir survoler la Sibérie à destination des pays asiatiques risque non seulement de rendre les vols plus coûteux  mais également de créer une distorsion de concurrence entre les compagnies aériennes selon qu'elles appartiennent ou non à l'UE.

La Commission estime que les accords de transport aérien doivent garantir que toutes les compagnies aériennes de l'UE sont traitées de la même façon et respecter les règles en matière d'entente. Sinon, certaines compagnies risquent d'être désavantagées ou de payer des redevances supplémentaires déraisonnables qui sont susceptibles d'augmenter les coûts des vols pour les passagers.

Liberté d'établissement

Les accords bilatéraux sur les services aériens conclus entre un pays de l'UE particulier et un pays hors UE doivent comprendre une "clause de désignation de l'Union" stipulant que les termes de l'accord s'appliquent à toutes les compagnies aériennes de l'UE, et pas seulement à celles de ce pays. Il s'agit d'un élément essentiel du marché unique européen des transports aériens, créé au début des années 1990, qui garantit que les compagnies aériennes font l'objet de conditions identiques, quel que soit le pays de l'UE où elles sont établies. Le caractère obligatoire de la clause de désignation a été confirmé en 2002 par l'arrêt "ciel ouvert" de la Cour de justice. La Cour a jugé que des clauses qui donnent des avantages exclusifs à des ressortissants d'un État membre constituent une infraction au principe de la liberté d'établissement (consacré par l'article 49 du traité sur le fonctionnement de l'UE).

La plupart des accords avec des pays hors UE ont été adaptés en conséquence depuis. La Russie est l'un des seuls pays restants qui n'accepte pas que tous les transporteurs de l'UE doivent bénéficier du même traitement et que tout accord bilatéral doit contenir une clause de désignation de l'UE. Il en résulte des problèmes pratiques sérieux, qui sont par exemple susceptibles de compromettre l'exercice de droits de trafic en cas de rachat d'une compagnie aérienne par une compagnie d'un autre pays de l'UE.

Redevances pour le survol de la Sibérie

Les compagnies aériennes européennes concernées sont contraintes de payer des redevances pour le survol de la Sibérie pour de nombreuses liaisons à destination de l'Asie. Pour la seule année 2008, les transporteurs de l'UE auraient ainsi déboursé environ 420 millions de dollars US, la plus grande partie de cette somme étant directement versée à la compagnie aérienne russe Aeroflot. La Commission estime qu'il pourrait s'agir d'une infraction au droit européen sur les ententes, selon lequel les compagnies aériennes ne peuvent être contraintes à la conclusion d'accords commerciaux avec des concurrents directs. Il pourrait en outre y avoir infraction au droit international, plus précisément à la Convention de Chicago. De plus, ces accords bilatéraux imposent des conditions différentes aux compagnies aériennes de l'UE en fonction du pays où elles sont basées, ce qui renforce la distorsion de la concurrence. Et en définitive, ce sont les passagers qui risquent de devoir payer trop cher pour leurs vols.

Prochaines étapes

Les États membres disposent de deux mois pour répondre aux lettres de mise en demeure. À défaut de réaction satisfaisante, l'étape suivante de la procédure d'infraction serait un avis motivé de la Commission enjoignant aux États membres en question de modifier leurs accords bilatéraux en matière de services aériens avec la Russie. La Commission analyse par ailleurs les autres accords bilatéraux avec la Russie sur les services aériens pour établir s'ils sont conformes au droit de l'UE.