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Environnement - Santé
Jean Huss fait part de ses inquiétudes quant au projet de règlement européen sur les produits biocides dans une question parlementaire adressée à Mars Di Bartolomeo et Marco Schank
14-01-2011


Le député Jean Huss (déi gréng) adressait le 1er décembre au ministre délégué au Développement durable et aux Infrastructures et au ministre de la Santé une question parlementaire concernant un projet de règlement qui modifiera la directive 98/8/EC sur les produits biocides.

Cette proposition de règlement communautaire relatif à la mise sur le marché et l’usage de produits biocides a été adoptée par la Commission européenne le 12 juin 2009. Le Parlement européen a adopté en première lecture le 22 septembre 2010 ce projet de règlement.

"Selon les organisations non gouvernementales travaillant sur la problématique des biocides, certains points-clés font défaut dans le texte actuel, notamment la notion de groupes vulnérables (enfants, femmes enceintes...)", s’inquiète le député qui demandaient donc aux deux ministres s’ils étaient d’accord pour introduire dans le texte une définition des groupes vulnérables, l'indication que les biocides ne doivent pas avoir des effets néfastes sur les groupes vulnérables, le fait d’exiger clairement des dispositions d'étiquetage pour les groupes vulnérables pour les articles et les produits traités aux biocides, de donner aux États membres de l'UE le droit de refuser l'autorisation des biocides pour des raisons de protection des groupes vulnérables et enfin de surveiller et d’enregistrer les cas d'empoisonnements par les biocides, en particulier des groupes vulnérables.

Dans leur réponse conjointe, Mars Di Bartolomeo et Marco Schank soulignent que la proposition de règlement attache une grande importance à la protection des personnes dites vulnérables. Et ils rappellent aussi qu’en vertu de la directive 98/8/CE, transposée dans le droit national par la loi du 24 décembre 2002 relative aux produits biocides, l'évaluation d'une substance active prend déjà en compte les risques pour les enfants lorsque l'usage à évaluer peut résulter dans une exposition de ce groupe à risque.

Comme le précisent les deux ministres, les besoins particuliers de protection accrue de ce groupe de personnes sont pris en compte en ce qui concerne notamment :

  • la détermination des substances préoccupantes,
  • lors de la première autorisation des produits biocides,
  • lors du renouvellement et de l'annulation d'autorisations existantes,
  • le cas échéant l'étiquetage du produit doit avertir contre les risques particuliers pour les personnes vulnérables.

Mars Di Bartolemeo et Marco Schank signalent par ailleurs que la proposition de règlement permet aux Etats membres de faire usage d'une clause de sauvegarde à l'encontre de produits biocides autorisés conformément aux dispositions contenues dans la proposition. Cette clause peut être invoquée lorsque de nouvelles données font apparaître un risque pour la santé humaine ou plus particulièrement pour celle des personnes vulnérables.

En ce qui concerne la surveillance et le recensement des cas d'empoisonnement, le texte prévoit, comme l’indiquent les deux ministres, l'obligation pour chaque Etat membre de se doter d'un centre antipoison.

"En vue de protéger les groupes vulnérables, les biocides à effets neurotoxiques et immunotoxiques sont particulièrement préoccupants", selon le député qui explique que ces substances peuvent gravement endommager le système nerveux et le développement du cerveau des enfants. Il rappelle donc que la Commission européenne a suggéré dans sa proposition de remplacer les produits biocides par des alternatives plus sûres si celles-ci existent, un principe cependant rayé dans la dernière version du texte. Jean Huss aurait donc souhaité savoir si les ministres étaient prêts à intervenir pour le rétablissement dans le projet de règlement du principe de substitution des substances neurotoxiques et immunotoxiques.

"Il existe un consensus scientifique et politique de plus en plus fort sur le fait que certaines substances causent des impacts négatifs en raison de leurs propriétés intrinsèques et que l'application de seuils limites n'apporte aucune protection au consommateur", poursuivait le député qui appelait donc, en vue de protéger la santé des groupes particulièrement vulnérables, à ce qu’il y ait des critères d'exclusion stricts et rigoureux de ces substances dangereuses. "Cependant les dérogations aux critères d'exclusion qui sont prévues laissent la porte ouverte pour les substances dangereuses sur le marché de l'UE", regrette Jean Huss qui demandaient aux ministres s’ils étaient prêts à exiger la suppression des dérogations aux critères d'exclusion. Il souhaitait aussi savoir s’ils étaient pour proposer une définition plus claire pour les perturbateurs endocriniens en conformité avec la réglementation des pesticides dans la mesure où le texte actuel fait selon lui uniquement une référence vague à REACH.

Concernant l'exclusion des substances actives, la proposition de règlement fixe une liste de critères d'exclusion, lui ont répondu les deux ministres, expliquant qu’une substance ne peut en principe pas être inscrite comme substance active biocide lorsqu'elle est classée comme étant carcinogène, mutagène, toxique pour le système reproductif, ou comme ayant des effets perturbateurs endocriniens.

Pour ce qui est des dérogations aux critères d'exclusion, elles sont selon Mars Di Bartolomeo et Marco Schank  "limitées à des cas de figure précis, énumérés par ladite proposition". Par ailleurs, ajoutent-ils, même dans l'hypothèse de l'inscription d'une substance active sur base d'une de ces dérogations, celle-ci sera qualifiée d'office de substance candidate à substitution, et la disponibilité d'une substance ou technique alternative sera prise en compte.

Les ministres citent alors certains des autres critères entraînant la qualification d'une substance de candidate à substitution, à savoir :

  • l'apport journalier maximal tolérable de la substance est de manière significative moins élevé que pour une substance similaire,
  • la substance répond à deux des critères d'identification des substances persistantes, bio-accumulables et toxiques,
  • la substance contient une grande proportion d'isomères non-actifs ou des impuretés.

Enfin, les deux ministres précisent que la proposition de règlement prévoit que lors de la procédure d'inclusion d'une substance active, des tiers intéressés pourront soumettre des informations relatives à d'éventuelles substances de substitution à l'Agence Européenne des Produits Chimiques.

"Contrairement aux directives sur l'utilisation des pesticides, il n'y a actuellement pas de règles pour la durée d'utilisation des biocides", remarquait encore le député qui estime, au vu du danger croissant de la résistance aux antibiotiques due à l'utilisation abusive des biocides, qu’une directive européenne sur l'utilisation durable des produits biocides devrait être envisagée. Jean Huss s’inquiétait aussi du fait que de plus en plus de produits contiennent de l'argent nano à des fins biocides. Or, ces produits sont sur le marché malgré les incertitudes scientifiques sur la sécurité des nanomatériaux pour la santé humaine et l'environnement. Selon Jean Huss, la nouvelle loi devrait garantir une protection de la santé et l'environnement contre les risques des nanomatériaux biocides et le député s’enquéraient donc auprès des ministres de leur avis sur l'instauration d'exigences claires pour l'autorisation des biocides aux nanomatériaux.

Du point de vue de Marco Schank et Mars Di Bartolomeo, la stratégie d'évaluation à employer pour l'évaluation des risques émanant de ces nanomatériaux est en train de se développer. Ils notent qu’un problème majeur lié à l'évaluation scientifique de tels nano-materiaux est l'incertitude quant à la pertinence des méthodes d'évaluation employées jusqu'à présent, respectivement la compatibilité des données classiques.

Dans cette optique, précisent les ministres, la proposition de règlement précise que toute inclusion d'une substance active ne peut couvrir la forme nano d'une substance donnée qu'à la condition qu'une évaluation des risques liés à la forme nano ait bien été réalisée au préalable selon des critères scientifiques.