Au cours des dix dernières années, le phénomène du stress lié au travail a pris de l’ampleur dans neuf États membres et n’a reculé qu’en Suède. Des études indiquent que le stress est à l’origine de 50 à 60 % des jours de travail perdus. En France, par exemple, le stress aurait un coût annuel d’au moins 2 à 3 milliards d’euros. Au Royaume-Uni, l’anxiété, le stress et la dépression liés au travail entraîneraient la perte de 10 millions de jours de travail. Le stress lié au travail aurait aujourd’hui un coût direct estimé à quelque 4 % du PIB de l’Union européenne.
Pour faire face à ce problème, les représentants des travailleurs et des employeurs européens ont conclu, en 2004, un accord visant à assurer une protection minimale contre le stress au travail.
La Commission européenne a publié le 24 février 2011 une évaluation des retombées de cet accord selon laquelle l’accord a eu des effets positifs là où il a été mis en œuvre.
Les efforts accomplis par les employeurs et les travailleurs ont notamment débouché sur l’adoption de mesures dans douze États membres qui s’étaient jusque-là caractérisés par un certain immobilisme.
L’accord n’a certes pas été appliqué de la même manière dans tous les pays, mais dix-neuf États membres disposent aujourd’hui d’une législation ou de conventions collectives contraignantes applicables au stress ou à d’autres risques psychologiques liés au travail.
Au Luxembourg, la mise en oeuvre ne se fait pas de manière contraignante, mais des "efforts substantiels" sont notés.
L’accord conclu en 2004 par les partenaires sociaux européens multisectoriels (Business Europe, UEAPME, CEEP et CES) vise à augmenter la prise de conscience du stress au travail et à définir un cadre d’action. Il revient aux employeurs de déceler les facteurs de stress et d’essayer d’assurer une meilleure adéquation entre la responsabilité et les compétences; il leur appartient aussi de consulter les travailleurs sur les restructurations et les nouvelles technologies et d’apporter leur soutien aux individus et aux équipes.
Il ressort de la conclusion de l’évaluation publiée par la Commission que l’accord de 2004 a ouvert la voie du dialogue social et de l’élaboration de politiques dans le domaine du stress professionnel dans la plupart des États membres. Les règles relatives au stress au travail ont été couchées dans des accords généraux conclus par les partenaires sociaux, des conventions collectives, des lignes directrices ou des dispositions législatives. Dans un grand nombre de pays, les partenaires sociaux ont également mené des campagnes de sensibilisation et mis au point des outils d’évaluation du stress et de formation, ainsi que d’autres instruments pratiques.
Cependant, l’accord n’a pas été mis en œuvre de la même manière dans toute l’Europe. Les partenaires sociaux maltais, chypriotes, polonais et slovènes n’ont pas fait état de la manière dont ils avaient concrétisé les engagements pris et les résultats obtenus en Bulgarie, en République tchèque, en Allemagne et en Estonie n’ont pas répondu aux attentes. Le rapport souligne que des améliorations doivent être réalisées partout.
Pour les partenaires sociaux, si les individus sont parfaitement capables de faire face à des situations stressantes de courte durée, une exposition prolongée à une situation de stress peut causer des dommages considérables. Les principaux facteurs de stress sont les contraintes professionnelles, les marges de manœuvres, les relations sociales, les sollicitations psychologiques, les conflits portant sur les valeurs et l’éthique ainsi que la précarité de l’emploi. L’exposition à ces facteurs de stress a augmenté au fil du temps. C’est ainsi que la proportion de travailleurs précisant qu’ils doivent respecter des délais serrés ou travailler à un rythme élevé pendant au moins un quart de leur temps de travail est passée de 50 % en 1991 à plus de 60 % en 2005 et qu’elle s’est ensuite stabilisée.
En 2002, à l’occasion d’une consultation des partenaires sociaux, la Commission a attiré l’attention sur la nécessité de garantir un niveau minimal de protection des travailleurs contre le stress au travail en se fondant sur les dispositions générales de la directive-cadre concernant la sécurité et la santé des travailleurs dans l’Union (directive 89/391/CEE).
Les partenaires sociaux européens ont décidé d’agir dans ce domaine en concluant un accord-cadre autonome européen, comme le leur permet l’article 155 du traité de Lisbonne. Ce type d’accord peut être mis en œuvre par des dispositions législatives de l’Union européenne ou par des mesures prises par les affiliés nationaux des partenaires sociaux européens conformément aux traditions et pratiques propres aux États membres.
Au niveau de l’Union, quatre accords sont mis en œuvre par les représentants des travailleurs et des employeurs, à savoir les accords sur le télétravail, sur le stress au travail, sur la violence et le harcèlement et sur les marchés du travail inclusifs. L’accord sur le stress au travail est le deuxième dans l’ordre chronologique.
Les partenaires sociaux luxembourgeois et le gouvernement ont adopté des lignes directrices en vue de mettre en œuvre l’accord.
Dans l’avis du 15 juin 2006 du Conseil économique et social, les partenaires sociaux luxembourgeois conviennent que, compte tenu de la nature de l’accord-cadre sur le stress au travail, sa transposition par voie d’accord interprofessionnel contraignant n’est pas opportune au niveau national. Ils se sont donc prononcés pour un ensemble d’orientations de mise en œuvre, à caractère non contraignant, destinées à guider les employeurs, les travailleurs et leurs représentants dans la façon d’aborder et de résoudre les problèmes liés au stress. Gouvernement et partenaires sociaux s’engageaient alors à explorer ensemble des solutions au défi constitué par le stress au travail. Les dispositions générales de la directive-cadre concernant la sécurité et la santé des travailleurs ont été transposées dans le droit national luxembourgeois. Les lignes directrices du Comité économique et social indiquent aussi que les services de santé au travail devraient être associés aux actions de lutte contre le stress.
De nombreuses activités, visant pour la plupart à sensibiliser et à informer sur la question, sont menées par les partenaires sociaux et par les services publics. Les partenaires sociaux et le gouvernement se sont entendus pour mener des études sur le plan national et sectoriel et sur des campagnes ciblant différents publics. Les autorités publiques font état d’une série d’études menées depuis 2006 pour mieux connaître la situation. L’OGBL a annoncé qu’il mènerait une enquête en 2010. Les entreprises sont par ailleurs obligées d’identifier les métiers à risqué sur la base d’un document élaboré par le Ministère de la Santé. Le stress n’est pas compris dans les caractéristiques définissant un poste à risque selon la législation. Cependant, de nombreuses entreprises incluent le stress de leur propre initiative. Séminaires et formations sont organisés régulièrement par la Chambre de Commerce et la Chambre des salariés. Des brochures ont aussi été publiées par les partenaires sociaux.
Le rapport de la Commission relève que le CES décrit de façon détaillée les conséquences négatives, tant sur le plan individuel qu’organisationnel, du stress lié au travail. Il propose une approche progressive qui suit l’accord européen dans les grandes lignes pour ce qui est des procédures, des indicateurs de stress, des stresseurs identifiés, des mesures à prendre, et il définit les droits et les devoirs des acteurs du lieu de travail en relation avec les pratiques nationales. Les facteurs de risque sont groupés différemment, et certains y sont ajoutés, comme la monotonie, le travail d’équipe, la rémunération, la conciliation entre vie privée et vie professionnelle, le manque de reconnaissance. Parmi les mesures potentielles qui sont ajoutées à celles citées dans le raccord, il est question de plus de "gestion participative", de stimulation du travailleur afin qu’il prenne une part active dans le développement de sa carrière. Des mesures complémentaires, pouvant aider par exemple le travailleur à gérer son stress, sont aussi évoquées.
Le rapport de la Commission note enfin que les partenaires sociaux luxembourgeois n’ont pas transmis à leurs fédérations de rapport décrivant plus en détail la mise en œuvre de l’accord.
Dans son tableau récapitulatif, la Commission note cependant les "efforts substantiels" des partenaires sociaux en vue de la mise en œuvre de l’accord.