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Economie, finances et monnaie - Traités et Affaires institutionnelles
Même s’ils sont nommés par le gouvernement, la loi organique de la BCL garantit l'indépendance personnelle des membres de son Conseil, contrairement à ce qui se passe en Hongrie
Dans une réponse à une question parlementaire du député ADR Fernand Kartheiser, Jean-Claude Juncker et Luc Frieden réfutent tout amalgame entre loi et pratiques au Luxembourg et en Hongrie
15-02-2012


www.chd.luLe député ADR Fernand Kartheiser a posé au Premier ministre et au ministre des Finances une question parlementaire relative à l'indépendance de la Banque centrale du Luxembourg (BCL).

Partant des critiques qui ont été formulées à l’encontre du gouvernement hongrois du fait qu'il a fait adopter par voie parlementaire des dispositions "qui limiteraient, selon les critiques, l'indépendance de la Banque centrale hongroise", et du fait que "certains observateurs estiment que le gouvernement hongrois aurait indûment ou exagérément accru son influence dans la nomination des postes de direction de cette institution", Fernand Kartheiser constate qu’au Luxembourg, "l'alinéa 5(2) de la loi organique interdit aux membres des organes de la BCL de solliciter ou d'accepter des instructions des gouvernements des Etats membres."

Mais, écrit-il, "en consultant le site de la BCL, on peut lire que le Conseil de notre Banque centrale comprend les trois membres de la Direction et six membres nommés par le gouvernement », et « parmi les membres de ce Conseil, on trouve entre autres un ancien ministre des Affaires étrangères".

Citant de nouveau la loi organique, le député constate que "le gouvernement peut proposer au Grand-Duc de révoquer un membre de la direction sous certaines conditions ("faute grave", "ne remplit plus les conditions nécessaires à ses fonctions") et que "les mandats sont renouvelables, sans doute aussi sur proposition du gouvernement".

A partir de là, le député ADR veut savoir "quels sont les critères objectifs que le gouvernement retient pour sélectionner et nommer les membres de ce Conseil" ; "quelles sont les 'conditions nécessaires à ses fonctions' qu'un membre de la direction doit remplir sous peine de révocation". Fernand Kartheiser demande aussi si le Gouvernement estime "qu'il peut être soutenu de façon crédible que le Conseil de la Banque centrale est suffisamment indépendant de lui" et s’il envisage "de proposer à la Chambre des Députés des règles de nomination assurant une parfaite transparence dans le choix des membres du Conseil de la BCL tout en garantissant une indépendance réelle et crédible de la BCL par rapport au Gouvernement".

La réponse de Jean-Claude Juncker et Luc Frieden

Dans leur réponse commune publiée le 14 février 2012 , Jean-Claude Juncker et Luc Frieden  confirment que la modification de la Constitution hongroise et l'entrée en vigueur de la nouvelle loi organique de la Banque centrale nationale hongroise ("Magyar Nemzeti Bank") en date du 1er janvier 2012 ont été "revus d'un œil critique par la Banque centrale européenne (BCE) dans ses avis du 14 et du 22 décembre 2011". Cet avis indique en effet que les nouvelles lois hongroises mettent en péril "l'indépendance personnelle et juridique" des organes de décision de la Banque centrale hongroise.

Les deux ministres rappellent ensuite que les principes généraux liés à la gouvernance des organes de décision des banques centrales nationales en ce qui concerne l'accomplissement de leurs missions et devoirs dans le cadre de leurs compétences dans le domaine monétaire sont garantis au niveau européen par l'article 130 du Traité sur le Fonctionnement de l'Union européenne et l'article 7 des statuts du Système Européen de Banques centrales (SEBC) et de la BCE.

En ce qui concerne le statut des organes de la Banque centrale du Luxembourg (BCL), que sont la Direction et le Conseil, ces principes sont repris dans l'article 5 (2) de la loi du 23 décembre 1998 relative au statut monétaire et à la Banque centrale du Luxembourg telle que modifiée.

Et de détailler le problème :

"1. En matière de sélection et de nomination des membres du Conseil, il faudra différencier entre les membres de la Direction, membres d'office de par leur fonction, et les six membres nommés par le gouvernement en conseil. Les deux directeurs et le directeur général qui sont nommés par le Grand-Duc sur proposition du gouvernement en conseil ont la qualité de fonctionnaire en ce qui concerne leur statut, leur traitement et leur régime de pension. De ce fait, ils répondent sans préjudice de leur compétence et expérience professionnelle dans les domaines financiers ou économiques, aux critères généraux d'honorabilité, d'intégrité et d'engagement professionnel énoncés par la loi du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l'Etat. Les autres membres du Conseil sont choisis par le gouvernement en conseil en raison de leurs compétences spécifiques et leurs valeurs intrinsèques parmi les personnalités du pays offrant toutes garanties d'indépendance et d'intégrité et possédant l'engagement personnel et la capacité professionnelle requis pour l'exercice de cette fonction.

2. La loi organique de la BCL garantit l'indépendance personnelle des membres de son Conseil dans son article 12 (3) qui prévoit comme les articles 11.4 et 14.2 des statuts du SEBC la possibilité de révoquer un membre qui ne remplit plus les conditions nécessaires à ses fonctions ou qui a commis une faute grave. L'article 7 (3) qui suit ajoute que nul ne peut rester membre du Conseil s'il exerce des fonctions en dehors de la BCL qui sont en conflit avec les exigences de l'article 5(2) ou avec les dispositions relatives au secret professionnel applicables au SEBC. A part les exceptions légales dont les incapacités légales, pareille procédure de révocation est envisageable en cas de non-respect des critères susmentionnés. La révocation se fait par arrêté grand-ducal pris sur proposition du Gouvernement en Conseil et sur avis du Conseil de la BCL (art. 6 (h) de la loi organique).

3. Par ailleurs, le directeur général de la BCL est membre du Conseil des Gouverneurs de la BCE et jouit en matière de politique monétaire d'une indépendance personnelle spécifique par rapport à toute instruction extérieure. Il bénéficie notamment à ce titre en cas de révocation d'un droit de recours individuel auprès de la Cour de Justice pour violation des traités ou de toute règle de droit relative à leur application (article 14.2. des statuts du SEBC).

4. A l'instar d'autres établissements publics dotés de la personnalité juridique, il est de la compétence et de la responsabilité du gouvernement en conseil de procéder à la nomination des membres des organes de décision de ces établissements. L'indépendance réelle du Conseil, l'indépendance personnelle de ses membres sont garanties de manière à satisfaire pleinement les exigences de la BCE eu égard les textes en vigueur. La volonté du gouvernement d'assurer pleinement la conformité de la législation nationale sur la BCL avec les statuts du SEBC a été reconnue expressément par la BCE dans son avis du 23 septembre 1998 sur le projet de loi No 4468/07 relative au statut monétaire et à la Banque centrale du Luxembourg (CON/1998/93)."