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Environnement - Politique régionale
Déi Gréng se font l’écho, à la Chambre, des inquiétudes des ONG environnementales au sujet de la liaison Micheville
Le tracé retenu pour ce projet routier traverse une zone Natura 2000 sans qu’une alternative n’ait fait l’objet d’une étude détaillée, ce qui est contraire au droit européen, dénoncent-ils
24-04-2012


La Chambre des Députés s’est penchée, le 24 avril 2012, sur la liaison Micheville, projet routier qui devrait permettre de connecter le site d’Esch-Belval à la région limitrophe française. 48 députés ont donné leur accord sur la dépense évaluée à 140 millions d’euros nécessaires pour réaliser les dernières phases de la liaison Micheville.

Les quatre députés du groupe ADR ont voté contre, pour des raisons procédurales, mais aussi en vertu de la violation du principe "pollueur-payeur" du fait que l’Etat luxembourgeois prend en charge la dépollution d’un site industriel. Se sont abstenus les députés du groupe Déi Gréng et Serge Urbany (Déi Lénk).

La députée Josée Lorsché a expliqué la position des écologistes. S’ils reconnaissent que cette liaison contribuera à améliorer la situation de la circulation dans les environs d’Esch et à stimuler le site d’Esch-Belval, les Verts luxembourgeois soulignent toutefois que ce projet traverse une zone Natura 2000 sans que le moindre tracé alternatif n’ait fait l’objet d’une analyse détaillée. Et c’est là une entorse au droit européen, dénoncent les Verts qui soulignent que plusieurs organisations de protection de l’environnement ont déposé plainte auprès de la Commission européenne au sujet de ce projet.

Aussi, Josée Lorsché a-t-elle appelé le gouvernement à faire pression sur les autorités françaises pour qu’une étude d’impact soit menée sur les tracés alternatifs. Sans quoi, il est probable, a mis en garde la députée, que beaucoup de temps soit perdu en procédures juridiques.

Le Méco appelle le Ministère du développement durable et des Infrastructures à intervenir pour que les partenaires français respectent la législation européenne concernant les études d’impact, et ce notamment quand des sites Natura 2000 du côté luxembourgeois sont impliqués

Début avril 2012, le Mouvement écologique (Méco) avait adressé au Ministère du Développement durable un courrier attirant son attention sur le problème. Le Méco, comme les Verts, ne s’est pas opposé à la construction de la liaison Micheville du côté luxembourgeois, en reconnaissant l’opportunité de cette liaison routière. Mais l’ONG ne manquait pas de s’inquiéter des graves problèmes environnementaux posés par le projet de tracé retenu côté français. "Le choix du projet routier au niveau de la France ne peut laisser indifférent le Luxembourg", plaidaient les militants en soulignant notamment que le projet routier est cofinancé par le Luxembourg, ce qui lui confère par conséquent une responsabilité évidente, et ce d’autant plus que le projet bénéficie d’un cofinancement du FEDER à hauteur de  8 millions d’euro. Mais ils insistaient aussi sur les "répercussions évidentes sur les sites Natura 2000 du côté luxembourgeois".

Il n’y a pas eu d’analyse de l’impact du projet routier sur les zones Natura 2000 du côté luxembourgeois, dénonçaient les écologistes luxembourgeois dans leur courrier, une façon de faire qui est "en contradiction flagrante avec la législation européenne, vu que les impacts sur les zones Natura 2000 sur le côté luxembourgeois n’ont pas été analysés". Pourtant, le projet routier serait susceptible d'affecter de façon notable les espèces présentes sur les sites Natura 2000 aussi bien en phase de chantier qu'en phase d'exploitation.

Le projet routier Belval vers A30 se situe à une distance comprise entre 600 mètres et 3 kilomètres des sites Natura 2000 luxembourgeois, à savoir deux ZSC (LU0001028 et LU0001030) et deux ZPS (LU0002008 et LU0002009). "Il est évident que le projet de route aurait des répercussions sur ces zones, vu que les zones Natura 2000 au niveau luxembourgeois et français font un ensemble", explique le Méco.Une carte de la liaison Micheville

Ils poursuivent : "Les zones traversées du côté français présentent à la fois des habitats similaires aux anciennes mines de fer luxembourgeoises limitrophes classées Natura 2000 d’Esch-sur-Alzette et Differdange. Etant donné une quantité d’espèces végétales et animales bien plus importante et plus diversifiée du côté français, ces zones figurent en tant que réservoir pour les zones Natura 2000 luxembourgeoises. L’espace naturel concerné par le projet routier est l'élément principal d'un corridor supranational en liaison avec la zone Natura 2000 du Luxembourg, notamment vers les sites de Differdange-Prenzebierg (et dans une moindre mesure vers ceux d'Esch-sur-Alzette). Dans ce contexte, et de par la proximité et la relation directe entre ces sites, il paraît évident que des échanges d'individus d’une espèce ont lieu, et que ceci permet à l’heure actuelle de maintenir l'état de conservation de ces espèces par colonisation de nouveaux territoires ou échange de matériel génétique. L’espace naturel de Micheville, qui serait traversé de long en large par cette route, présente en fait les mêmes types de milieux et les mêmes cortèges faunistiques et floristiques que ceux rencontrés dans les sites Natura 2000 situés à proximité immédiate. La rupture du corridor fonctionnel existant par la réalisation d'une infrastructure routière constituerait un impact néfaste majeur concernant les opportunités de déplacement et de colonisation des espèces présentes".

Les sites – autant du côté luxembourgeois que du côté français – représentent une grande diversité biologique, arguent encore les écologistes qui s’appuient notamment sur l’exemple de trois espèces soumises à des objectifs stricts dans les sites Natura 2000 luxembourgeois, espèces qui sont également présentes sur les sites français impactés par le projet routier, à savoir le Cuivré des marais (Lycaena dispar), le Damier de la Succise (Euphydryas aurinia) et le Triton crêté (Triturus cristatus). Etant donné que les populations françaises de ces espèces se trouvent être dans un état de conservation bien meilleur que dans les zones Natura 2000 luxembourgeoises, les effets négatifs sur ces dernières sont à craindre en cas de réalisation de la variante de route retenue actuellement .

Le Méco attire aussi l’attention du Ministère sur le cumul des incidences concernant le secteur du fait du programme d’aménagement porté par l’opération d’intérêt national Alzette-Belval décrétée le 19 avril 2011. "Bien que le remarquable corridor écologique transfrontalier n’ait pas encore été étudié, les planificateurs et les maîtres d’ouvrage ont arbitrairement choisi de passer outre et de se servir de cette infrastructure, dans l’intégralité de son tracé, comme axe structurant des futurs aménagements", dénoncent les écologistes, appelant à ce que les zones géographiques soumises au cumul des incidences fassent l'objet d'un examen particulier pour l'analyse de leurs effets cumulatifs puisque le projet routier, conjugué au programme d'aménagement, pourrait avoir des effets directs ou indirects, temporaires ou permanents sur l'état de conservation des habitats et des espèces pour lesquels les sites Natura 2000 à proximité ont été désignés.

Enfin, le Méco met l’accent sur le choix du tracé qui a été fait côté français, et ce alors que d’autres projets auraient pu avoir des effets moins néfastes du point de vue de la protection de l’environnement. Ces alternatives passant à l’est de la zone urbanisée d’Audun-le-Tiche, Villerupt, auraient permis de la relier au réseau autoroutier français sans en ajouter aux effets de coupure du corridor. Aux yeux du Mouvement Ecologique ce serait le rôle du Ministère Luxembourgeois de s’engager à ce qu’un de ces tracés alternatifs soient pris en compte, vu l’impact de la construction routière sur les sites Natura 2000 sur le côté luxembourgeois et vu le cofinancement par le Luxembourg.

Le Méco appelait donc le Ministère du développement durable et des Infrastructures à intervenir afin que les partenaires français respectent la législation européenne concernant les études d’impact et ce notamment quand des sites Natura 2000 du côté luxembourgeois sont impliqués. Il s’agit d’insister sur la nécessité d’une évaluation des incidences des tracés potentiels sur les sites Natura 2000 autant du côté luxembourgeois que du côté français.

"Tout autre façon de faire risque d’entraîner de longues procédures juridiques, n’étant dans l’intérêt d’aucun des acteurs", concluait le Méco.