A l’issue d’une téléconférence qui s’est tenue le samedi 9 juin 2012, les ministres des Finances de la zone euro ont communiqué une déclaration au sujet de l’Espagne. "L’Eurogroupe soutient les efforts résolus des autorités espagnoles visant à régler la restructuration de son secteur financier et salue son intention de demander une aide financière des Etats membres de la zone euro à cet effet". Les ministres des Finances ont en effet été informés que les autorités espagnoles allaient introduire dans de brefs délais une demande formelle dans ce sens, ce qu’a confirmé le ministre espagnol de l’Economie, Luis De Guindos, peu après. Ils ont assuré leur volonté d’y répondre favorablement.
L’aide financière sera fournie par l’EFSF/l’ESM en vue de la recapitalisation des institutions financières. Le prêt sera conçu de façon à offrir une protection efficace couvrant tous les besoins de capitaux possibles estimés par le diagnostic demandé par les autorités espagnoles à des évaluateurs externes et des auditeurs internationaux, indique le communiqué de l’Eurogroupe, qui prévoyant aussi une marge de sécurité en plus des capitaux estimés nécessaires par les experts, envisage un montant total de 100 milliards d’euros.
Dès que la demande formelle sera reçue, une évaluation sera menée par la Commission en lien avec la Banque centrale européenne (BCE), l’Autorité bancaire européenne (EBA) et le Fonds monétaire international (FMI), et une proposition de politiques de conditionnalité pour le secteur financier qui devra accompagner l’aide financière sera formulée.
L’Eurogroupe a d’ores et déjà identifié le Fonds public espagnol d'aide au secteur bancaire (FROB), qui recevra les fonds au nom du gouvernement espagnol et les redistribuera aux institutions financières concernées.
Le gouvernement espagnol prendra la pleine responsabilité de cette aide financière et signera le protocole d’accord, stipule le communiqué de l’Eurogroupe. Les ministres des Finances observent que l’Espagne a déjà mis en œuvre d’importantes réformes portant sur le budget le marché du travail, ainsi que des mesures renforçant le capital de base des banques espagnoles ; ils affichent donc leur confiance quant au fait que l’Espagne honorera ses engagements liés à la procédure de déficit excessif et aux réformes structurelles visant à corriger les déséquilibres macroéconomiques dans le cadre du semestre européen. Des progrès qui seront suivis de près parallèlement à l’aide financière, assurent les ministres. Au-delà de ces engagements, l’Eurogroupe considère toutefois que la conditionnalité pour cette aide financière va devoir se concentrer sur des réformes spécifiques ciblant le secteur financier, et notamment des plans de restructuration en ligne avec les règles européennes sur les aides d’Etat ainsi que des réformes structurelles horizontales du secteur financier national.
José Manuel Barroso et Olli Rehn ont aussitôt réagi par voie de communiqué, se disant "certains que l'Espagne pourra progressivement regagner la confiance des investisseurs et des marchés et créer les conditions d'un retour à une croissance durable et à la création d'emplois". Ils ont "salué l'annonce par l'Espagne de son intention de demander le soutien de la zone euro pour restructurer son secteur financier et la réponse positive de l'Eurogroupe".
La directrice générale du FMI, Christine Lagarde, a elle aussi salué l'aide "crédible" promise par la zone euro pour aider l'Espagne à recapitaliser ses banques. "Je me félicite vivement de la déclaration de l'Eurogroupe qui complète les mesures prises par les autorités espagnoles ces dernières semaines pour renforcer leur système bancaire", indique-t-elle dans un communiqué. "Fournir un pare-feu crédible pour recapitaliser les segments les plus faibles du système bancaire est une des recommandations clés de la mission (...) récemment menée en Espagne" par le FMI, a ajouté Christine Lagarde pour qui la volonté des partenaires de l'Espagne dans la zone euro de financer le Frob à hauteur de 100 milliards d'euros est "une mesure cruciale pour le succès de la stratégie des autorités espagnoles". A ses yeux, "le montant du financement proposé, qui est conforme aux besoins en capital identifiés par la mission du FMI, donne l'assurance que les besoins en financement du système bancaire espagnol seront pleinement satisfaits". "Le FMI se tient prêt, à l'invitation des membres de l'Eurogroupe, a apporter son soutien à la mise en œuvre et à la surveillance de cette assistance financière par le biais de rapports réguliers", a assuré Christine Lagarde.
Pour le chef du gouvernement espagnol, Mariano Rajoy, qui s’est exprimé en conférence de presse au lendemain de cette annonce, "c'est la crédibilité de l'euro qui a gagné, son avenir, l'Union européenne". "Je suis très satisfait, je crois que nous avons franchi une étape très décisive", a-t-il affirmé. "Cela n'a pas été facile", mais "ici c'est l'euro qui a gagné, en envoyant un message très clair et très fort", a-t-il insisté. Au terme d'une "semaine très intense", "l'Europe a été à la hauteur des circonstances", s'est-il félicité.
Le ministre luxembourgeois des Finances, Luc Frieden, a quant à lui insisté sur le fait qu’on ne donne pas tout simplement comme ça une somme pouvant aller jusqu’à 100 milliards d’euros. "Si les banques espagnoles s’écroulaient, cela ne poserait pas problème qu’à l‘Espagne, mais à toute la zone euro", a expliqué le ministre sur les ondes de la radio DNR. Luc Frieden n’a pas manqué de souligner qu’il ne s’agissait pas d’un cadeau, mais d’un prêt qui sera remboursé. Il a d’ailleurs assuré que cela ne représenterait pas une nouvelle charge pour le budget du Luxembourg, à part si l’Espagne n’était pas en mesure de rembourser le prêt qui sera octroyé par le biais de l’EFSF ou de l’ESM.
Le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, a salué par voie de communiqué "la détermination du gouvernement espagnol à procéder à la recapitalisation et par le biais de ce programme d'avoir recours à l'EFSF ou à l'EMS"."L’EFSF est prêt à fournir l'argent correspondant à une demande de l'Espagne. Ce serait encore mieux si l’EMS, qui est encore plus efficace, pouvait être utilisé", a-t-il ajouté. Le ministre allemand a également salué le fait que "Madrid attende les résultats d'une deuxième évaluation indépendante du besoin de ses banques pour déposer une demande concrète", se félicitant que "le gouvernement espagnol ait annoncé vouloir équiper le fonds de restructuration bancaire espagnol le plus complètement possible de façon à ce que l'on puisse faire face à tous les scénarios, même les plus improbables". "L'Espagne est sur la bonne voie et l'Allemagne, comme les autres pays et institutions de la zone euro et probablement le FMI, vont accompagner et soutenir l'Espagne dans l'assainissement de son secteur bancaire", a-t-il assuré.
La ministre finlandaise des Finances, Jutta Urpilainen, a déclaré pour sa part à l’issue de la réunion que les discussions sur les détails de ce plan de sauvetage étaient encore en cours. "Il est clair que le plan de sauvetage aura lieu", a-t-elle indiqué, mais elle a aussi précisé que "si les fonds sont pris sur l’EFSF, la Finlande demandera des garanties". En revanche, s'ils proviennent du fonds permanent EMS, la Finlande ne demandera pas de garanties car ce sera moins risqué pour les contribuables finlandais, a-t-elle déclaré, citée par la radio publique YLE.