Principaux portails publics  |     | 

Agriculture, Viticulture et Développement rural - Environnement - Santé
La récente étude démontrant la toxicité à long terme du maïs transgénique NK603 relance la controverse sur les OGM
20-09-2012


Une étude scientifique conduite à l’Université de Caen par le professeur Gilles-Eric Séralini et dont les résultats ont été publiés le 19 septembre 2012 dans la revue "Food and Chemical Toxicology" a remis sous les feux de l’actualité la question controversée de l’utilisation d’OGM.

Cette étude montre en effet comment la consommation du maïs transgénique NK603, conçu par Monsanto pour résister aux herbicides, a provoqué chez des rats de laboratoire de graves problèmes de santé et un taux de mortalité précoce. Ce qui distingue ces travaux de ceux déjà menés sur ce produit, c’est qu’ils ont été conduits sur une durée bien plus longue, à savoir deux ans, contre trois mois pour les études présentées par les industriels dans le cadre des demandes d’autorisation d’OGM.

Aussitôt, le ministre français de l'Agriculture, Stéphane Le Foll, a réagi en disant sa détermination à en finir avec le "flou juridique" européen en matière de cultures transgéniques. "Il faut revoir les protocoles d'homologation et permettre aux Etats de faire des choix, pour ou contre" les OGM sur leur territoire, a-t-il déclaré à l'AFP. Il juge en effet "indispensable de préciser dans le droit européen les conditions dans lesquelles on peut déclencher un moratoire" suspendant ces cultures.

Le gouvernement français est prêt, "en fonction de l'avis de l'ANSES", à demander à Bruxelles de suspendre "en urgence l'autorisation d'importation dans l'UE du maïs NK603" incriminé, ont prévenu les ministères de l'Agriculture, de l'Environnement et de la Santé dans un communiqué commun.

Une démarche soutenue par le Premier ministre français Jean-Marc Ayrault qui a annoncé le lendemain que si le danger des OGM était vérifié, c’est-à-dire si la validité scientifique de cette étude devait être reconnue, la France "défendrait au niveau européen" leur interdiction. "La publication d'une étude par des chercheurs français mettant gravement en cause l'innocuité à long terme du maïs transgénique NK 603 a provoqué la saisine immédiate de l'agence de sécurité sanitaire et de l'autorité européenne de sécurité des aliments", a-t-il expliqué.

Greenpeace Luxembourg appelle l’UE à décréter un moratoire sur tous les OGM

Au Luxembourg, où le gouvernement a choisi, au nom du principe de précaution, d’activer la clause de sauvegarde et d’interdire la mise en culture sur son territoire du maïs MON 810 et de la pomme de terre Amflora, c’est Greenpeace qui a réagi par voie de communiqué.

"Cette étude renforce considérablement les inquiétudes portant sur les impacts négatifs des OGM sur la santé humaine et animale", estime Maurice Losch, chargé de campagne OGM chez Greenpeace Luxembourg. L’ONG appelle par conséquent l’UE à décréter un moratoire sur tous les OGM, tandis que le gouvernement luxembourgeois est invité à se saisir de cette nouvelle étude pour interdire ce maïs transgénique au Luxembourg.

Greenpeace saisit l’occasion pour mettre l’accent sur la nécessité d’une recherche scientifique indépendante sur l’évaluation des risques des OGM. C’est l’Autorité européenne de sécurité des Aliments (EFSA) qui est à ce jour chargée d’évaluer ces risques, mais les militants dénoncent de longue date "la proximité flagrante des membres de l’EFSA avec les industriels vendant des OGM" et son manque d’indépendance. "L’EFSA doit être profondément réformée afin de protéger les citoyens européens et cesser de servir les intérêts commerciaux exclusifs des entreprises de biotechnologie. Greenpeace demande à ce que l’EFSA évalue les OGM en prenant en compte des études scientifiques menées sur le long terme, mais également en s’appuyant sur des études indépendantes et non uniquement sur les analyses fournies par les industriels du secteur comme c’est le cas actuellement", poursuit Maurice Losch.

Pour l’heure, la bataille scientifique sur les OGM bat son plein, nombre de scientifiques ayant en effet décelé des lacunes dans le protocole d’étude appliqué par l’équipe du professeur Séralini.

Quant à l’EFSA, ses services ont publié dans les plus brefs délais un communiqué annonçant que l’Autorité a pris connaissance de l’article en question et qu’elle "prendra en considération la pertinence de cet article en tenant compte des preuves scientifiques disponibles, notamment certaines études récentes évaluant la toxicité potentielle d’aliments dérivés de récoltes GM sur une période de temps prolongée".

"L’EFSA s’engage à apporter son assistance aux décideurs au niveau national et au niveau de l’UE et elle veillera à se pencher, dans ses avis scientifiques, sur ce sujet qui requiert une expertise dans les domaines des organismes génétiquement modifiés, des pesticides, des substances endocriniennes actives et des effets éventuels à faibles doses", est-il annoncé.

La Commission européenne a en effet chargé l’EFSA de rendre un avis aussi rapidement que possible et le porte parole du commissaire à la Santé, John Dalli, a assuré que "si des faits scientifiques nouveaux sont démontrés, nous en tirerons les conséquences".

Mais le professeur Séralini s’oppose à cette contre-expertise. "Il n'est pas question que ceux qui ont autorisé le NK 603 réalisent la contre-expertise de nos données, car il y aurait un conflit d'intérêt avec leur autorité et leur carrière", a-t-il déclaré au cours d'une conférence de presse avec l'eurodéputé française Corinne Lepage. Gilles-Eric Séralini et Corinne Lepage sont tous deux membres du CRII-GEN, le comité d'information indépendante sur le génie génétique, et plaident pour "l'interdiction immédiate du NK 603 à l'importation et le réexamen de toutes les autorisations d'OGM et de pesticides". Ils demandent également "la généralisation des études sur deux ans" pour les demandes d'autorisations.