Son discours politique du 1er mai, le président de l’OGBL Jean-Claude Reding, l’a prononcé le 29 avril 2013 au Tramsschapp du Limpertsberg, devant un parterre de presqu’un millier de militants, de parlementaires et de membres du gouvernement, afin que les militants et sympathisants puissent passer la journée du 1er mai en fête.
L’Europe était très présente dans ce discours, par la crise économique qui est en train de se transformer en crise politique et bloque la sortie de la crise écologique, comme l’a souligné Jean-Claude Reding. La responsabilité de la crise "incombe aux dirigeants du monde financier", pas aux dettes souveraines, elle incombe à leur cupidité, à leur court-termisme et à leurs erreurs de gestion. Elle est aussi le résultat d’orientations politiques fondamentales : la dérégulation du secteur financier pratiquée depuis 20 ans, la globalisation économique sans règles sociales et sans égards pour son impact écologique, le développement du marché unique de l’UE sans mise en place de la dimension sociale de cette même UE. S’y ajoutent l’introduction de l’euro sans budget commun, sans mécanismes de solidarité économique et sans démocratisation de l’UE.
Les promesses émises au début de la crise que des efforts seraient faits pour réguler le secteur financier ou pour freiner la spéculation n’ont pas été tenues, critique Jean-Claude Reding. Pas plus qu’il n’y a eu des réformes qui auraient renforcé les droits sociaux, freiné les privatisations effrénées et les dépeçages d’entreprises et de services publics qui se développent depuis les années 90 sans que cela ait amélioré le service aux clients. Le dirigeant syndical a parlé "d’attaques contre la sécurité sociale", de "démantèlement des prestations sociales", notamment des systèmes de pension, avec des conséquences graves pour les personnes, avec plus d’inégalité, de risque de pauvreté, y compris au Luxembourg.
L’austérité a été selon lui présentée comme la panacée, malgré tous les avertissements du côté des syndicats et d’économistes renommés, alors qu’elle a abouti à une impasse. Les taux de chômage record, l’aggravation de la crise de la dette souveraine, le risque d’une récession durable, Jean-Claude Reding les impute à la politique de la chancelière allemande et de ceux qui la suivent : la Commission Barroso, le FMI, l’OCDE. Le mouvement syndical européen s’oppose à cette politique avec tous les moyens politiques et syndicaux à sa disposition, affirme Jean-Claude Reding, et "l’OGBL s’oppose à la variante luxembourgeoise de cette politique, qui est propagée par l’ancien chef de l’Eurogroupe, Jean-Claude Juncker" et qui a pour conséquence que "le patronat se sent soutenu par lui".
L’OGBL s’oppose ainsi à un plafonnement de l’indexation des salaires, comme l’a proposé le Premier ministre lors de son discours sur l’état de la nation. Il veut même un retour à l’indexation telle qu’elle a été pratiquée avant sa modulation. Il est sceptique aussi à l’égard d’une hausse de la TVA, qui touche selon lui en premier lieu les petits salariés, et les touchera encore plus si elle devait être neutralisée dans le calcul de l’index des prix.
L’OGBL voudrait aussi savoir pourquoi le gouvernement ne veut pas relever le taux marginal de l’impôt sur le revenu et changer le barème. Pour Jean-Claude Reding, "toutes les pistes doivent être analysées : hausse du taux marginal, imposition des revenus sur le capital, impôt sur les gains de société, la fortune, lutte contre la fraude fiscale". Et pour renflouer les systèmes sociaux, il propose la suppression du plafond cotisable, ce qui épargnerait à la majorité une hausse des cotisations et permettrait aux individus d’avoir de meilleures prestations. Jean-Claude Reding s’est aussi attaqué à l’inégalité de traitement des frontaliers à l’égard de certaines prestations sociales, comme les chèques-service ou bien le système des bourses universitaires, où l’affaire est en train d’être jugée à la CJUE.
La question des salaires a été un autre chapitre important de son discours. Elle a tourné autour de l’indexation des salaires, auquel l’OGBL ne veut pas que l’on touche et qu’il veut voir intégralement restauré, du salaire minimum, que l’OGBL veut voir ajusté tous les deux ans, des salaires en début de carrière et leur développement, une discussion qui touche d’abord les jeunes et tend à faire évoluer à la baisse l’échelle des salaires, et de la reconnaissance des formations, de l’expérience et de l’ancienneté, que l’on veut remplacer par des exigences de performance uniquement, alors que l’on demande à tour de bras aux salariés de se former tout au long de leur vie, une manière, selon Jean-Claude Reding, de faire baisser les salaires et d’opposer les salariés les uns aux autres afin de mater leur solidarité.
Le Luxembourg comme site industriel et site financier ne dépend pas selon l’OGBL du développement des salaires. L’industrie doit être encadrée et le cas échéant "protégée" par une politique européenne. L’Etat ne doit pas se retirer comme actionnaire de la BGL tout comme il devrait rester actionnaire d’Enovos, ainsi que de Luxair et Cargolux.
Dans une interview donnée à Claude Molinaro dans l’édition du Tageblatt du 29 avril, Jean-Claude Reding a par ailleurs expliqué que son syndicat briguait un bon résultat aux élections sociales de novembre 2013, "pour être en mesure d’influer sur les élections européennes et législatives". Il voit l’OGBL comme "une opposition structurée qui empêchera une politique qui n’est que la copie de la politique européenne". Et d’ajouter : "La politique actuelle n’est pas bonne, mais sans la résistance de l’OGBL, nous aurions le modèle allemand, avec toutes ses conséquences." Ces conséquences, ce sont pour lui d’abord les grèves "comme prix à payer pour la rupture du consensus social". Une mise en garde, comme son discours au Tramsschapp.