Dans son édition du 5 juillet 2013, le Lëtzeburger Bauer, l’organe de la Centrale paysanne, a publié un éditorial sur la réforme de la Politique agricole commune (PAC) et la loi agraire qui en découlera, éditorial qui livre une sorte de billet d’humeur avant des négociations que la plus grande des organisations du monde agraire voudrait plus intenses avec le Ministère de l’Agriculture.
Un des grands éléments de la nouvelle PAC sera la convergence interne. Celle-ci signifie que les États membres qui continuent d’allouer des fonds sur la base de références historiques doivent évoluer vers des niveaux de paiements plus similaires dans lesquels les fonds sont alloués par hectare. Les États membres pourront choisir parmi différentes options pour parvenir à ce type de convergence: adopter une approche nationale ou une approche régionale, appliquer un paiement forfaitaire régional/national d'ici à 2019, ou veiller à ce que tous les agriculteurs qui reçoivent moins de 90 % du paiement moyen régional/national voient un accroissement graduel – assorti de la garantie supplémentaire que chaque agriculteur atteigne un paiement minimum de 60 % de la moyenne nationale/régionale d'ici à 2019. Les montants mis à la disposition des agriculteurs qui reçoivent plus de la moyenne régionale/nationale seront ajustés en proportion et les Etats membres auront la possibilité de limiter les pertes à 30 %.
Les agriculteurs luxembourgeois s’attendent donc à des diminutions des paiements directs, et même si l’on n’en connaît pas encore l’ampleur et que l’on sait que cette diminution sera limitée à 30 %, cette mesure "menace", selon l’éditorial, "la viabilité économique de certaines exploitations, même d’exploitations de plus grande taille". La mise en œuvre de la réforme devrait donc se faire selon la Centrale Paysanne "avec intelligence et doigté" afin d’éviter le pire pour les exploitations.
Une autre source de réduction des revenus agricoles sera la redéfinition des zones défavorisées. Il est ici prévu que les États membres (ou régions) pourront octroyer un paiement supplémentaire pour des zones soumises à des contraintes naturelles (telles que définies en vertu des règles applicables au développement rural) d'un montant maximal équivalent à 5 % de l'enveloppe nationale. Cette pratique est facultative et n'a pas d'incidence sur les options disponibles au titre du développement rural en ce qui concerne les zones soumises à des contraintes naturelles et les zones défavorisées. Dans ce contexte, il est important de savoir que, sauf la région de la Moselle et quelques petites parties du Bon-Pays, les surfaces agricoles du Luxembourg sont sous le régime de l’ancienne PAC considérées dans leur ensemble comme des zones défavorisées. Ce régime sera changé pour le Luxembourg, sans que l’on en connaisse les détails. Mais l’on sait déjà que le nombre des surfaces considérées comme zones défavorisées diminuera, et de ce fait aussi les revenus des exploitations concernées.
Autre sujet de litige : la Centrale paysanne est convaincue que le gouvernement veut réduire l’aide à l’investissement dans la nouvelle loi agraire et reste opposée à la règle que le plafond de ces aides, qu’elle estime de toute façon trop bas, soit lié à la taille d‘une exploitation. Selon la Centrale, une telle manière de voir les choses met un frein au développement des petites et moyennes exploitations. Par ailleurs, elle demande que le taux des aides soit de 50 % pour les exploitations en zone défavorisée et de 40 % pour les autres types d’exploitation, alors qu’il est actuellement de 35 %, une revendication à laquelle le ministre, Romain Schneider, a d’ores et déjà donné son assentiment. Mais la Centrale paysanne ne veut pas par contre d’une liste de machines agricoles qu’il faudrait subventionner en priorité.
Finalement, la Centrale paysanne estime que la profession n’a pas été assez consultée et qu’il serait donc difficilement admissible que la loi agraire soit présentée avant la pause estivale. Elle reproche au ministre de ne pas avoir entamé une discussion plus large sur l’orientation de l’agriculture luxembourgeoise, de ne pas accorder une attention suffisante aux revendications de la profession et de ne pas mettre assez au centre de ses préoccupations la majorité des exploitations, mais de privilégier des "groupes marginaux" et lui demandent de changer de cap