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Changement climatique - Énergie - Environnement
L’amélioration de l’efficacité énergétique, parent pauvre des politiques des Etats membres selon le rapport 2013 de l’Agence européenne pour l’environnement qui dresse un bilan très mitigé des performances du Luxembourg
09-10-2013


climat-rapport-2013 (Source: Agence européenne pour l'environnement)L’Union européenne devrait atteindre plus tôt que prévu ses objectifs 2020 en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) et de recours aux énergies renouvelables, mais ce résultat commun cache des disparités importantes entre les Etats membres, selon l’édition 2013 du rapport dédié de l’Agence européenne pour l’environnement (EEA) publié le 9 octobre 2013.

En revanche, les  Etats membres sont à la peine pour remplir leurs engagements en termes d’efficacité énergétique, seuls quatre d’entre eux ayant enregistré des progrès tangibles en la matière, toujours selon le rapport de l’EEA.

Grâce aux dernières données communiquées par les Etats membres, l’Agence européenne a analysé les progrès de l’UE et de ses membres en vue d’atteindre les objectifs "20-20-20" à l’horizon 2020. Elle en a également profité pour vérifier le respect (ou non) des engagements  pris par les Etats membres en vertu du protocole de Kyoto pour la période 2008-2012.

Les objectifs de Kyoto "globalement atteints"

Selon le rapport, les Etats membres de l’UE seraient de manière générale sur le point de remplir les objectifs assignés par le protocole de Kyoto. En se penchant sur les résultats des pays qui composaient l’UE des 15, la moyenne des émissions totales de GES dans la période 2008–2012 a reculé de 12.2 % en comparaison avec l’année de référence (1990).

Pour mémoire, le protocole prévoyait une diminution des émissions de GES de l’ordre de 8 % par rapport à l’année de référence pour l’UE (alors composée de quinze Etats membres). En interne, les objectifs des États membres avaient été différenciés en vue d’atteindre la réduction globale de 8 %. Ces objectifs variaient de 28% de réduction pour le Luxembourg, 21 % pour le Danemark et l’Allemagne jusqu'à des augmentations qui pouvaient atteindre 25 % pour la Grèce et 27 % pour le Portugal.

Le système définit que, pour parvenir à la réalisation de leurs objectifs, les pays doivent équilibrer leurs émissions de GES avec la quantité d'unités d’émission de Kyoto (les quotas d’émission) qui leur est allouée. Un tel équilibre pouvait être atteint en réduisant leurs émissions domestiques ou en augmentant leur budget d'émissions grâce à la contribution de certaines activités (changement d'affectation des terres) tels que la gestion forestière, ainsi qu'en ayant recours aux mécanismes flexibles du protocole permettant d’acquérir des quotas d’émission dans d'autres pays (système ETS d’échange et de rachat d’émissions) lorsque ceux-ci dépassent leurs engagements.

Chaque Etat membre était libre de répartir ses efforts comme il le souhaitait sur ces deux piliers. "Grâce à l'allocation de quotas liés aux unités de Kyoto pour la période d'échange 2008-2012, chaque objectif national a été scindé entre un budget d'émissions pour les secteurs de l'ETS et un autre budget d'émissions pour les secteurs non couverts par l'ETS", rappelle le rapport.

Les installations de production énergétique de même que la plupart des secteurs industriels étaient couverts par le système d’ETS, tandis que  les secteurs non concernés par le système d’échange comprenaient entre autres ceux du transport routier, de la construction, de l'agriculture et du traitement des déchets.

Les bons élèves

Ainsi rapporte le document de l’EEA, "presque tous les pays européens qui avaient un objectif individuel de limitation des émissions de GES ou un objectif de réduction en vertu du protocole de Kyoto (soit 26 États membres actuels de l'UE, auxquels s’ajoutent l’Islande, le Liechtenstein, la Norvège et la Suisse) sont en bonne voie pour atteindre leurs objectifs respectifs".

Il s’agit selon l’EEA d’une évolution favorable par rapport aux évaluations des années précédentes. "Six Etats membres de l’UE des 15 (Finlande, France, Allemagne, Grèce, Suède et Royaume-Uni) et onze Etats membres parmi les treize ayant adhéré après 2004 ainsi que l'Islande et la Norvège sont en bonne voie d'atteindre leur objectif de Kyoto uniquement grâce à la réduction domestique des émissions de GES", lit-on dans le rapport.

Lorsque les activités dites "de puits de carbone" sont prises en compte (c’est-à-dire notamment le carbone absorbé grâce au développement et la croissance de zones forestières), le rapport note que trois Etats membres supplémentaires (Irlande, Portugal et Slovénie) sont également en bon chemin pour remplir leurs objectifs.

Les gros utilisateurs du système d’échange de quotas

En revanche, trois Etats membres, à savoir l’Autriche, le Luxembourg et l’Espagne, auxquels s’ajoute le Liechtenstein, dépendent pour leur part largement du système d’échange des quotas d’émission pour se conformer à leurs engagements.

Pour atteindre leurs objectifs de Kyoto, neuf Etats membres et le Liechtenstein avaient en effet initialement mis davantage l'accent sur la réduction des émissions dans les secteurs non ETS, or, souligne le rapport, il s’agit des secteurs "où les réductions d'émissions domestiques sont en général plus coûteuses à réaliser que dans ceux couverts par l'ETS".

"À la fin de la première période d'engagement de 2008-2012, l’écart relatif entre la moyenne des émissions non ETS pour cette période et le budget respectif des Etats membres n’a pas diminué en Autriche, en Belgique, au Danemark, au Liechtenstein, en Italie, au Luxembourg, aux Pays-Bas, en Espagne et en Suisse. Tous ces Etats entendent combler l'écart en faisant usage des mécanismes de flexibilité du Protocole de Kyoto", détaillent les auteurs du rapport.

L’Autriche, le Liechtenstein, le Luxembourg et l'Espagne présentent les écarts relatifs les plus importants en la matière.  Afin de remplir leurs objectifs, ces pays ont l'intention d'acquérir d'importantes quantités de quotas d’émission au niveau national. Celles-ci représentent entre 13 % et 21 % de la quantité d’émissions de GES de ces Etats par rapport à leur année de référence respective souligne encore le rapport, alors que la moyenne est seulement de 1,9 % pour l’UE composée de 15 Etats membres.

"Le Luxembourg n'est pas sur les rails pour remplir son objectif de Kyoto. Son gouvernement a l'intention de combler le fossé entre  les émissions de GES effectivement produites lors de la période 2008-2012 et son objectif d'émissions en acquérant un certain nombre d'unités de Kyoto, soit l’équivalent, par an, de 21% de ses émissions de GES lors de l'année de référence", peut-on lire dans un second rapport de l’EEA qui détaille le profil des Etats membres dans ce domaine.

En Italie, le montant du crédit qui serait nécessaire pour respecter ses engagements ne représente que 1,1 % des émissions de l'année de base. Toutefois, l'Italie demeure le seul Etat membre de l’UE des 15 recourant à des mécanismes flexibles qui n’a pas fourni d'informations sur le montant du crédit qu’il a l'intention d’acheter, ni  sur les ressources financières qu’il prévoit d’allouer à cette fin, précise l'EEA. 

Les objectifs "20-20-20"

La seconde partie du rapport de l’EEA se focalise sur les progrès réalisés par l’UE et les Etats membres par rapport aux objectifs climatiques et énergétiques à atteindre d’ici 2020 qui sont repris dans la stratégie "20-20-20".

Validée par le Conseil européen en 2007 et introduite dans la législation communautaire via le paquet "énergie et climat" de 2009 et la directive sur l’efficacité énergétique de 2012, cette stratégie est triple et vise ainsi à:

  • Réduire de 20 % les émissions de GES de l’UE par rapport à leur niveau de 1990;
  • Recourir à une part de 20 % d’énergie renouvelables dans la consommation énergétique  finale de l’UE;
  • Augmenter de 20 % l’efficacité énergétique de l’UE.

Un premier objectif sur les rails, sauf pour six Etats, dont le Luxembourg

Selon le rapport, le premier objectif sera plus que probablement réalisé, car l’Union a réduit ses émissions de gaz à effet de serre de 18 % entre 1990 et 2012. "L'UE est sur le point d'atteindre son objectif de réduction de 20 % des émissions de GES huit ans avant 2020", écrit l'EEA. Selon l’agence, l’UE pourrait même le dépasser de quatre points de pourcentage.

En vertu des prévisions de l’EEA, la réduction des GES devrait avoir atteint 21 % à l’échéance 2020, alors que la mise en œuvre des mesures actuellement encore en planification dans les Etats membres devrait permettre "une réduction de 24 % par rapport à 1990".

Si la plupart des Etats membres s’attendent à remplir leurs objectifs individuels de réduction dans les secteurs non couverts par l’ETS, près de la moitié "devront mettre en place des mesures supplémentaires (actuellement en cours de planification) ou avoir recours aux mécanismes flexibles de l’ETS" pour les atteindre, précise le rapport.

Les dernières prévisions concernant six Etats membres (Allemagne, Autriche, Belgique, Finlande, Irlande, Luxembourg et Espagne) indiqueraient d'ailleurs que ces derniers n’atteindront pas leurs objectifs individuels dans les secteurs non couverts par l’ETS, cela malgré des mesures supplémentaires actuellement en préparation.

Les énergies renouvelables augmentent leur part

Le deuxième objectif, qui vise à ce que les énergies renouvelables représentent une part de 20 % dans la consommation finale d’énergie dans l’UE, semble également en bonne voie selon l’EEA. L’agence souligne ainsi qu’en 2011, cette part était de 13 % pour les 28 Etats membres, alors que l’objectif intermédiaire fixé pour 2012 était de 10,7 %.

En 2011, 14 Etats membres (Bulgarie, Allemagne, Estonie, Finlande, Grèce, Hongrie, Italie, Lituanie, Luxembourg, Roumanie, Slovaquie, Slovénie, Espagne et Suède) ainsi que la Norvège avaient atteint, voire dépassé leurs objectifs intermédiaires, tandis que six Etats membres (Belgique, France, Lettonie, Malte, les Pays-Bas et le Royaume-Uni) sont restés sous les niveaux attendus. Le Luxembourg a ainsi atteint l’objectif intermédiaire de 2,9 % de part d’énergies renouvelables en 2012, qui devra augmenter jusqu’à 11 % d’ici 2020.

Le rapport précise néanmoins que l’effort qui s’annonce est de taille. Par apport à la période 2005-2011, "les Etats membres devront doubler leur utilisation d’énergies renouvelables s’ils veulent atteindre les objectifs contraignants de 2020", prévient l’agence.

L’efficacité énergétique, un troisième objectif à la traîne

Le troisième objectif de la stratégie "20-20-20" - l’augmentation de 20 % de l’efficacité énergétique des Etats membres -, semble en revanche beaucoup moins réaliste selon les auteurs du rapport, qui notent que si la réduction de la consommation d’énergie à l’horizon 2020 devrait, en volume, se rapprocher des objectifs politiques de l’UE, elle ne sera pas suffisante pour atteindre l’amélioration voulue de 20 % de l’efficacité énergétique au niveau européen.

Selon les chiffres du rapport, seuls quatre Etats membres (Bulgarie, Danemark, France et Allemagne) enregistrent des progrès en la matière "grâce à des politiques équilibrées à travers les différents secteurs importants", tandis que pour la majorité des Etats membres "les politiques en place ne sont pas suffisamment développées" ni équilibrées. Selon les auteurs,  cette situation est attribuable au déficit de mesures politiques en la matière, mais également aux effets de la crise économique.

Huit Etats membres, dont le Luxembourg, sont considérés comme ayant réalisé des progrès limités en la matière, le rapport jugeant que de nouveaux efforts, notamment en termes de développement de nouvelles politiques, seront nécessaires pour ces pays. Selon le dernier Programme national de réforme (PNR) du Luxembourg dans le cadre du semestre européen, publié en avril 2013, le pays devra améliorer ses performances en termes d’efficacité énergétique de 14,06 % en 2016, pour espérer remplir ses engagements.

Poursuivre les efforts

De manière générale, le rapport souligne ainsi que "globalement, l’UE fait de relativement bons progrès vers ses objectifs énergétiques et climatiques". Si aucun Etat membre ne semble à même d’atteindre les buts fixés dans les trois domaines à l'échéance promise, aucun n’est à la traîne dans l'ensemble des secteurs non plus souligne le rapport. Ainsi quatorze d’entre eux font une performance globale positive par rapport aux trois objectifs, quatre présentent une performance globale neutre, et neuf une performance globale négative.

Le rapport conclut ainsi que pour atteindre les objectifs fixés, "assurer la cohérence optimale entre les différents domaines politiques est crucial pour maximiser les co-bénéfices entre tous les secteurs. Cela nécessite non seulement des objectifs précis, mais des perspectives à long terme et des instruments politique adéquats".