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Budget de l'Union européenne - Traités et Affaires institutionnelles
Les comptes de l’UE pour 2012 ont été validés, mais des erreurs subsistent dans tous les domaines de dépenses principaux, selon la Cour des Comptes de l’UE
05-11-2013


La Cour des Comptes européenneLa Cour des comptes européenne a publié le 5 novembre 2013 le rapport annuel sur le budget de l’Union européenne pour l’exercice 2012. En sa qualité d’auditeur indépendant, elle a validé les comptes de 2012 de l’UE, comme elle le fait tous les ans depuis l’exercice 2007. Cependant, le rapport conclut que, dans la plupart des domaines de dépenses du budget de l’Union, la législation en vigueur n’est toujours pas pleinement respectée.

La Cour invite à réexaminer la réglementation applicable aux dépenses de l’UE et recommande de simplifier le cadre législatif. Il est probable que la période de programmation 2014-2020 sera encore axée sur les dépenses – c’est-à-dire conçue pour garantir que le budget de l’UE soit affecté et dépensé – au lieu d’être centrée sur l’optimisation des ressources visée.

Si l’on considère le budget de l’UE dans son ensemble, le taux d’erreur estimé par la Cour pour les dépenses s’élève à 4,8 % pour l’exercice 2012 (contre 3,9 % en 2011). Tous les domaines couvrant les dépenses opérationnelles étaient affectés par un niveau significatif d’erreur en 2012. Le taux d’erreur estimé ne constitue pas un indicateur de fraude ou de gaspillage. Il s’agit d’une estimation des paiements qui n’auraient pas dû être effectués parce que les montants versés n’ont pas été utilisés conformément à la législation applicable. Les erreurs concernent généralement des paiements effectués en faveur de bénéficiaires ou au titre de projets inéligibles, ou pour des achats de services, de biens ou des investissements réalisés sans que les règles de passation de marchés publics aient été respectées.

En 2012, l’UE a dépensé 138,6 milliards d’euros, dont quelque 80 % sont gérés conjointement par la Commission et les États membres. La Cour s’est montrée critique envers les autorités des États membres lorsque celles-ci disposaient de suffisamment d’informations pour détecter et corriger les erreurs avant de demander un remboursement sur le budget de l’UE. Avec les règles en vigueur pour la période de dépenses en cours (2007 2013), les États membres ne sont pas fortement incités à utiliser plus efficacement les systèmes de gestion financière. Par exemple, pour les dépenses de cohésion, il est possible de retirer et de remplacer les demandes erronées sans que les montants provenant du budget de l’UE en soient diminués.

Les constatations et les opinions d’audit de la Cour abordent la manière d’améliorer la gestion financière de l’UE. La Cour recommande par conséquent qu’elles soient pleinement prises en considération au moment d’arrêter les règles gouvernant la gestion et le contrôle pour le cadre financier 2014 2020.

Des éléments pour mieux comprendre la démarche et les conclusions de la Cour des Comptes

La Cour des comptes européenne est l’institution de contrôle indépendante de l’Union européenne. Les rapports et opinions d’audit de la Cour constituent un élément essentiel de la chaîne de responsabilité de l’UE. Ses réalisations sont utilisées pour demander des comptes – notamment dans le cadre de la procédure de décharge – aux responsables de la gestion du budget de l’UE. Il s’agit essentiellement de la Commission, mais cela concerne également les autres institutions et organes de l’UE. Les États membres jouent également un rôle important dans la gestion partagée.

La Cour teste des échantillons d’opérations pour fournir des estimations statistiques de la mesure dans laquelle les recettes, les dépenses dans leur ensemble et les différents domaines de dépenses (groupes de domaines politiques) sont affectés par des erreurs.

La Cour estime que les comptes consolidés de l’Union européenne présentent fidèlement, dans tous leurs aspects significatifs, la situation financière de l’Union au 31 décembre 2012, les résultats de ses opérations, ses flux de trésorerie, ainsi que l’état de variation de l’actif net pour l’exercice clos à cette date.

Les recettes de l’UE sous-jacentes aux comptes de 2012 sont, dans tous leurs aspects significatifs, légales et régulières. Les engagements sous-jacents aux comptes de 2012 sont, dans tous leurs aspects significatifs, légaux et réguliers.

Les systèmes de contrôle et de surveillance examinés sont partiellement efficaces pour garantir la légalité et la régularité des paiements sous-jacents aux comptes. Tous les groupes de politiques qui couvrent les dépenses opérationnelles sont affectés par un niveau significatif d’erreur. Selon les estimations de la Cour, le taux d’erreur le plus probable pour les paiements comptabilisés en charges sous-jacents aux comptes est de 4,8 %.

C’est pourquoi la Cour estime que les paiements sous-jacents aux comptes relatifs à l’exercice clos le 31 décembre 2012 sont affectés par un niveau significatif d’erreur.

Le taux d’erreur estimé pour l’ensemble des dépenses au titre du budget de l’UE a une nouvelle fois augmenté, passant de 3,9 % en 2011 à 4,8 % en 2012. Cette augmentation est en partie (0,3 points de pourcentage) imputable à une modification de l’approche d’échantillonnage de la Cour. Le taux d’erreur estimatif a augmenté chaque année depuis 2009, après trois années de baisse consécutives.

Le domaine de dépenses Développement rural, environnement, pêche et santé reste le plus exposé aux erreurs, avec un taux d’erreur estimé à 7,9 %. Il est suivi par le domaine de dépenses Politique régionale, énergie et transports, avec un taux d’erreur estimé à 6,8 %.

Les domaines de dépenses Emploi et affaires sociales, Agriculture: soutien du marché et aides directes, ainsi que Politique régionale, énergie et transports, présentent les augmentations les plus importantes du taux d’erreur estimatif.

Pour la majorité des opérations entachées d’erreurs relevant des domaines en gestion partagée (comme l’agriculture et la cohésion), les autorités des États membres disposaient de suffisamment d’informations pour détecter et corriger les erreurs.

L’écart substantiel entre crédits pour engagements et crédits pour paiements, associé à une sous-utilisation considérable des crédits au début de la période de programmation actuelle, a entraîné une accumulation d’engagements inutilisés équivalant à deux ans et trois mois (217 milliards d’euros fin 2012). Cette situation exerce une pression sur le budget pour les crédits de paiement. Pour y remédier, il est essentiel que la Commission planifie à moyen et à long termes ses besoins en matière de paiement.

Dans un grand nombre de domaines du budget de l’UE, le cadre législatif est complexe et la performance n’est pas suffisamment prise en considération. Les propositions relatives à l’agriculture et à la cohésion pour la période de programmation 2014-2020 restent principalement fondées sur les intrants (et donc axées sur les dépenses); elles sont par conséquent encore centrées sur la conformité aux règles plutôt que sur la performance.

Quelques exemples de problèmes qui se sont posés

Pour une majorité de projets, les résultats et les bénéfices sont menacés à moyen et à long terme : Dans son audit sur l'aide au développement en matière d'approvisionnement en eau potable et de services d'assainissement de base dans les pays subsahariens, la Cour a constaté que les projets examinés étaient durables sur le plan technique, car ils favorisaient l'utilisation d'une technologie standard et de matériaux disponibles sur place. Néanmoins, pour une majorité de projets, les résultats et les bénéfices se tariront à moyen et à long terme si des revenus non tarifaires ne peuvent être assurés.

Surdéclarations – demandes d'aide portant sur des terres inéligibles : En Espagne, en Autriche et au Portugal, certaines terres déclarées et ayant donné lieu à des paiements en tant que pâturages permanents étaient en réalité couvertes, totalement ou en partie, par des rochers, de la forêt ou des buissons denses, ce qui devait les exclure du bénéfice de l'aide de l'UE. Dans certains cas, les terres avaient peut-être un jour été exploitées à des fins agricoles, mais il a été constaté qu'elles avaient été abandonnées depuis plusieurs années.

Des paiements calculés sur la base de données incorrectes : La superficie des terres agricoles (sur laquelle sont fondés les droits au financement octroyés aux bénéficiaires) est déterminée grâce aux systèmes d'identification des parcelles agricoles (SIPA) et aux systèmes d'information géographique (SIG). Au Royaume Uni (Angleterre), l'organisme payeur ne détermine pas l'éligibilité des terres à usage commun (329 000 hectares) et ne recourt guère aux images aériennes pour apprécier l'éligibilité des autres parcelles pour lesquelles les agriculteurs ont déposé des demandes de paiement. La Cour a constaté que des aides avaient été versées pour des parcelles de forêt inéligibles. Au Royaume Uni (Irlande du Nord), des éléments constituant une cause d'inéligibilité n'apparaissent pas  en tant que terres inéligibles dans le SIG. La Cour a relevé plusieurs cas où des parcelles de forêt (inéligibles) étaient enregistrées comme des pâturages permanents (éligibles). Dans d'autres cas, la surface éligible enregistrée dans le SIPA était nettement supérieure à la réalité.

Erreur concernant l'éligibilité – non-respect des engagements agroenvironnementaux : En Pologne, un bénéficiaire s'est engagé à respecter des exigences spécifiques concernant, d'une part, le maintien d'herbages extensifs permanents et, d'autre part, la protection d'espèces d'oiseaux menacées et de leur habitat. Le principal engagement pris consistait à laisser la végétation pousser sans la couper sur 5 à 10 % de la surface concernée, dans une zone différente chaque année. En contrepartie, le bénéficiaire recevrait 270 euros par hectare. La Cour a constaté que les exigences n'étaient pas respectées: sur certaines parcelles, l'herbe était entièrement coupée et sur d'autres, la zone non coupée était la même que celle des années précédentes ou bien se trouvait à un emplacement différent de celui indiqué par l'ornithologue. L'ensemble des exigences n'étaient respectées que sur environ 15 % de la surface. Ce même type d'infraction aux exigences agroenvironnementales a été relevé en République tchèque, en Allemagne (Schleswig-Holstein), en Grèce, en France et au Royaume Uni (Angleterre).

Qualité insuffisante des contrôles administratifs d'un État membre : Dans le cas d'une procédure de passation de marchés publics contrôlée en Allemagne (Brandebourg et Berlin), l'organisme payeur a lui-même bénéficié, entre 2008 et 2012, d'une aide du Feader s'élevant à plus de 2,2 millions d'euros au titre de la mesure «assistance technique» pour son système informatique externalisé. La Cour a constaté que le contrat relatif au système informatique et à des travaux de maintenance de ce dernier avait été octroyé à une entreprise au moyen d'une procédure négociée sans avis plutôt qu'au moyen de la procédure ouverte ou restreinte requise. Le non-respect des procédures en vigueur rend ces dépenses inéligibles à un financement de l'UE. La même situation concernant l'octroi de contrats relatifs à des systèmes informatiques a été observée dans 11 autres Länder allemands.

Manquement grave aux règles en matière de passation de marchés publics : Dans le cadre de la construction d'une ligne ferroviaire à grande vitesse en France, deux marchés de génie civil ont été attribués par entente directe à la société qui avait précédemment fourni des services similaires. Une telle attribution par entente directe n'est pas conforme aux règles applicables en matière de passation de marchés et les travaux auraient dû faire l'objet d'un appel d'offres. Des cas similaires d'attribution par entente directe injustifiée ont été relevés dans le cadre de projets de politique régionale en Pologne.

Dépenses déclarées en dehors de la période d'éligibilité : Dans le cas d'un projet visant à établir le plan de construction d'une autoroute de contournement en Finlande, six factures qui avaient été émises avant le début de la période d'éligibilité ont été incluses dans la déclaration de dépenses. Ces dépenses ont été certifiées à tort à la Commission comme étant éligibles. Des cas similaires de dépenses inéligibles en raison du non-respect de la période d'éligibilité ont été relevés dans des projets FEDER en France et en Autriche.

Participants inéligibles : Un concours a été octroyé à des entreprises espagnoles engageant des chômeurs. L'une des conditions d'éligibilité des participants était que l'employeur garde la personne nouvellement recrutée pendant une période minimale de trois ans, voire de cinq ans dans certains cas. Cette condition n'a pas été respectée pour 12 personnes. Les coûts déclarés pour les participants inéligibles représentaient 39,2 % du mon­tant contrôlé. Des constatations similaires ont également été effectuées dans un projet en Italie.

Dépenses inéligibles : La Commission a effectué des paiements pour un montant de 90 000 euros en faveur d'une ONG au Guatemala. Elle a remboursé la TVA, alors qu'elle était inéligible, ainsi que le salaire d'employés ayant travaillé en dehors de la période couverte par la subvention. Environ 18 % des dépenses remboursées étaient inéligibles.

Coûts inéligibles : La Cour a détecté plusieurs erreurs affectant les frais déclarés à la Commission par un bénéficiaire parti­cipant à un projet de recherche: des dépenses de personnel calculées de manière incorrecte sur la base de montants budgétisés plutôt que de montants réels, des frais de transport non justifiés, ainsi que des coûts indirects reposant sur le calcul erroné des taux horaires applicables et comprenant des catégories de coûts inéligibles sans rapport avec le projet. Les coûts inéligibles déclarés par le bénéficiaire corres­pondaient à quelque 60 000 euros. Le taux de cofinancement de l'UE pour ce projet étant de 70 %, la Commission a indûment remboursé 42 000 euros.

La Commission n’a pas fixé de condition de paiement particulière pour l'appui budgétaire : La Cour a examiné un paiement de 600 000 euros relatif à l'appui au programme de réformes économiques pour 2007-2010 au Vanuatu, y compris une tranche variable en fonction de la performance, d'un montant de 200 000 euros. En vertu de la convention de financement, la Commission était tenue de définir des indicateurs de performance spécifiques relatifs à la gestion des finances publiques, mais ne l'a pas fait.